Se dilater l’appendice

Cinq anciens de l’UQAM portent leur humour au petit écran

 

Photo:  Jean-François Hamelin

Pour le commun des mortels, l’appendice est une excroissance inutile, un vestige d’une autre époque, un organe voué à disparaître sans grand fracas. Mais pour de plus en plus de téléspectateurs, Appendices rime avec imitations de fruits et légumes ou parties de donjon et dragons avec Paul Piché.


Vendredi matin, dix heures. Les Appendices profitent d’une pause de montage pour recevoir Montréal Campus dans leur bureau, coin Sherbrooke et De Lorimier. Depuis mai, les cinq humoristes à lunettes ont fait du huitième étage de cette tour de béton sans âme le repère de leur humour absurde et de leurs blagues autodérisoires.

Chaque semaine depuis le début janvier, Julien Corriveau, Dave Bélisle, Jean-François Chagnon, Dominic Montplaisir et Jean-François Provençal invitent les auditeurs de Télé-Québec à suivre leurs divers sketchs humoristiques, présentés sous forme d’un DVD en mode aléatoire. Et comme tout bon DVD, l’émission comprend des suppléments, des bloopers et des faux making of. Certains sketchs sont aussi repris avec des commentaires audio, permettant aux humoristes de pousser certains gags plus loin. Des capsules ont même droit à un director’s cut, où l’un des membres du groupe refait un sketch à son goût en changeant le montage, le scénario ou la mise en scène. «Il y a deux types d’humour qu’on aime vraiment faire, explique Julien Corriveau.  L’humour absurde, à la Simpsons ou à la Ionesco, mais aussi l’humour à malaise, un peu comme The Office ou Andy Kaufman. L’approche DVD permet de jouer sur ces deux plans.»

Loin d’être brouillonne, la facture visuelle de l’émission a été confiée aux bons soins des réalisateurs Gilbert Dumas (Le Sketch Show) et PAF (Fais ça court). «C’était important pour nous de travailler avec un réalisateur qui peut créer une bonne ambiance. Ça aide vraiment à faire la transition entre les sketchs quand chacun a son ambiance très bien définie», explique Dave Bélisle. L’émission jouit donc de nombreuses scènes extérieures et d’un montage dynamique.

 

De Saint-Jean au petit écran
L’histoire des Appendices a commencé il y a longtemps – Dave Bélisle et Jean-François Chagnon sont amis depuis l’âge de sept ans – mais c’est à l’école secondaire de Saint-Jean-sur-Richelieu que le groupe a pris son envol, au fil de parties d’improvisation. Le nom est arrivé assez tôt. «Les Appendices, c’est parce que c’est un organe inutile et qu’on fait un humour un peu inutile, précise Julien Corriveau. En même temps, c’est juste un nom. Les gars d’Aerosmith ne sont pas vraiment des forgerons du ciel.»

Leur passage à la télé, lui, a un petit côté conte de fées. Les cinq amis ont invité le comédien Réal Bossé, le Serge de Dans une galaxie près de chez vous, à improviser avec eux. Il a grandement apprécié leur humour et a invité les Appendices, dont la plupart ont étudié en scénarisation, à écrire pour le Sketch Show, à TVA. Le réalisateur Gilbert Dumas, qui a déjà travaillé avec Pierre Légaré et Bruno Blanchet, est également tombé sous le charme et a tourné avec eux une émission pilote. Quelques visites à des diffuseurs plus tard, Télé-Québec signifiait son intérêt. «Ils ont quand même pris un risque», rigole Julien Corriveau.

Tous dans la mi-vingtaine, les Appendices bénéficient malgré leur jeunesse d’un important soutien du réseau provincial. «Il n’y a pas de censure, précise Jean-François Chagnon. Télé-Québec nous donne carte blanche. On a notre mot à dire à chaque étape de la production, de l’idée initiale au montage final.» La polyvalence des Appendices ne s’arrête pas à leur travail à l’écran puisque ce sont des membres du groupe qui ont composé la musique et conçu le site web de l’émission.

Les cinq humoristes, qui planchent sur leur projet depuis déjà trois ans, travaillent à temps plein depuis mai pour mettre au point les quelque 400 sketchs qui composent les 12 épisodes de cette saison. «Pour arriver à ça, on en a écrit environ 1000», affirme Dave Bélisle. Une situation dont personne ne se plaint, précise Jean-François Chagnon. «J’ai jamais fait quelque chose de plus le fun dans ma vie.»
Jusqu’ici, le succès est au rendez-vous. Pour leur deuxième émission, 121 000 auditeurs ont vu Julien Corriveau imiter un oignon et Jean-François Provençal incarner un médecin persuadé d’être un pompier. Pour Télé-Québec, il s’agit d’un excellent résultat, surtout pour une nouvelle émission.

D’autant plus que l’humour absurde, malgré sa popularité grandissante, est loin de faire l’unanimité – les Appendices soulignent que les Denis Drolet ont déjà reçu des menaces de mort. «L’humour absurde amène vraiment des réactions extrêmes, observe Jean-François Chagnon. Ce n’est pas nécessairement un humour intelligent, mais ça nécessite une certaine compréhension.»

Pas de menaces de mort en vue pour les Appendices. Les réactions, pour l’instant, sont plutôt positives, affirme Jean-François Chagnon. «On a beaucoup de bons commentaires. Il y a même quelqu’un qui nous a écrit qu’on était la chose la plus drôle qu’il avait vu de sa vie. On a le goût de lui dire: tu n’as pas vu grand-chose dans ta vie, mais merci quand même.»

Les épisodes des Appendices sont diffusés chaque mardi à 19h, sur les ondes de Télé-Québec, ou sur Internet, au http://lesappendices.telequebec.tv, jusqu’à une semaine après la diffusion.

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *