Art coquin et curieux

 Photo: Courtoisie Alexandre Masino

 

Mouvements aguichants, costumes ajustés, sex-appeal: la pin-up, qui séduit sans tout dévoiler, est très présente en 2008 au Québec. Avec leurs spectacles sensuels où fantasmes riment avec bon goût, le Bluelight Burlesque et les PinUp Saints font salle comble. Portrait d’un féminisme nouveau genre.


 

Dans les années 1940 et 1950, les spectacles burlesques rassemblaient des magiciens, humoristes, musiciens et se concluaient avec la performance d’une effeuilleuse. Depuis 1994 au Québec, les artistes néo-burlesques reprennent le flambeau et présentent des numéros de striptease séducteurs et coquets. Sur scène, les artistes se dévêtissent avec un soupçon d’érotisme, sans tout dévoiler. Les hommes gardent au minimum un cache-sexe et les femmes, une culotte et des pastilles qui couvrent leurs mamelons.

 

Pour l’emblème du burlesque au Québec, Mlle Oui-Oui Encore, la danse burlesque est un moyen d’exprimer ses idéaux féministes. «Ça apporte un certain pouvoir, confie l’artiste. Les femmes prennent en main leur côté érotique et l’affichent. C’est une arme de plus dans notre ceinture.» Celle qui déclarait récemment que le féminisme était autant de «brûler son soutien-gorge que de l’enlever en public» est fière d’enseigner son art de prédilection à des femmes de tous âges. «C’est un grand plaisir pour moi de les voir se transformer et prendre confiance en elles à mesure que les séances avancent», dit celle qui enseignait le swing auparavant. «Que ce soit sur scène ou en privé, la danse burlesque permet de s’affirmer, de s’amuser, d’être en union avec son corps.»

Show chaud

Avec des noms d’artistes tels que Coco Vanille, Lolita Sucrée et Red Lips, la prémisse du spectacle de Bluelight Burlesque a de quoi faire saliver les spectateurs. Chaque deuxième mercredi du mois, ils sont nombreux à se rendre au Petit Campus pour assister aux nouveaux numéros de la troupe. D’entrée de jeu, le maître de cérémonie titille la foule réchauffée d’effluves de malt avec une phrase au goût douteux: «Vous allez avoir du fun et c’est mieux que de faire l’amour sur la banquette arrière d’une Lada.» Puis, deux femmes déguisées en momie entrent sur scène sur l’air de Walk Like an Egyptian. Dès qu’elles commencent à retirer leurs bandelettes, la foule est en liesse. Dans un autre tableau, un homme d’affaires, cigare à la main, indique à une employée sexy et naïve de ramasser un bout de papier par terre et observe son postérieur avec intérêt. Le cliché fait rire la foule aux éclats.

Ce penchant pour la séduction à l’ancienne n’est toutefois pas partagé par tous. Dans la revue Châtelaine, la journaliste Geneviève St-Germain écrivait à cet effet que «vouloir être belle, séduisante et sexy, c’est normal; je ne suis pas bégueule. Mais aller perdre son temps à se trémousser pour nourrir les fantasmes des hommes, c’est parfaitement ridicule.»

 

D’autres encore dénoncent une banalisation de la sexualité, un propos avec lequel Mlle Oui-Oui Encore n’est pas d’accord. «Nos numéros plaisent autant aux hommes qu’aux femmes et ne sont ni offensants ni dégradants. C’est plutôt une célébration de la femme dans l’esprit typique du burlesque. Les numéros sont artistiques, rehaussés d’un côté glamour et d’une touche d’humour grivois.» Le Bluelight Burlesque se défend ainsi d’encourager le port du g-string chez les filles de 15 ans. «Jamais! Je ne suis moi-même pas un modèle typique de la danse exotique moulé en silicone et grimpé sur des échasses, souligne la pulpeuse reine québécoise du Burlesque. Je permets seulement aux femmes d’accéder à leur sensualité tout en se respectant.»

Saintes pin-ups

S’inscrivant aussi dans l’esprit du néo-burlesque, mais très différent des productions du Bluelight Burlesque, la troupe PinUp Saints explore les fantasmes, les tabous et la sensualité des corps dans des spectacles flamboyants depuis 2005. «Le style burlesque s’essouffle un peu depuis les dernières années et il fallait renouveler le genre», dit la fondatrice et productrice de la troupe, Mabel Palomino. Les numéros des PinUp Saints sont au goût de 2008, rythmés aux accents urbains et hip hop et souvent rehaussés d’images multimédias. La troupe s’est distinguée dans plusieurs événements importants, notamment lors du festival Mode et Design, de collectes de fonds pour le Musée des Beaux-Arts et du week-end du Grand Prix. Bien qu’ils s’adressent aux 18 ans et plus, leurs spectacles ne contiennent pas de nudité. «Je préfère préserver le mystère, dit Mabel Palomino. Je crois qu’on peut avoir un spectacle très sensuel sans tout dévoiler.»

Tout comme Mlle Oui-Oui Encore, Mabel Palomino apprécie que les femmes viennent la voir à la fin des spectacles pour lui dire leurs impressions. «Plusieurs me confient qu’elles se sentent bien, féminines et sexy en voyant des artistes comme les PinUp Saints, confiantes et fières d’elles-mêmes sur scène, dit la productrice de la troupe. Nous présentons des artistes auxquels les spectateurs peuvent s’identifier.» Ainsi, les PinUp sont des gars et des filles de différentes grandeurs, tailles et  nationalités. «Leur beauté provient de leur confiance en eux, c’est ce qui les rend sexy. Moi je dis à toute le monde when you got it, show it. Tu es belle, aimes-toi, donc vas-y, ose et affirmes-toi.»

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