Masse salariale en chute libre

Inquiétude chez les travailleurs étudiants de l’UQAM

Le Syndicat des étudiants employés de l’UQAM soutient que ses membres obtiennent moins d’argent et d’heures de contrat qu’auparavant, ce qui pourrait nuire au recrutement d’étudiants dans les cycles supérieurs. La direction de l’Université réfute cette version des faits.

Le Syndicat des étudiants employés de l’UQAM (SÉtuE) s’inquiète de la dégradation des conditions de travail de ses membres. Selon le regroupement, la masse salariale des auxiliaires de recherche et d’enseignement a chuté de 13,75% entre août 2006 et août 2008. Le nombre d’heures travaillées par l’ensemble des étudiants employés est passé de 42 500 à 36 000 durant la même période. Cette situation pourrait nuire à la qualité de l’enseignement et à l’attraction qu’exerce l’UQAM sur les étudiants des cycles supérieurs, craint le syndicat.

 

Le SÉtuE a deux hypothèses pour expliquer ces résultats obtenus par la compilation des relevés de paies de leurs membres. «L’UQAM donne plus de contrats aux gens du premier cycle, dont les salaires sont moins élevés», avance le président par intérim du syndicat, Éric Demers. Selon lui, des étudiants n’ayant pas encore obtenu leur baccalauréat remplissent ainsi des tâches de correction, d’accompagnement académique et de recherche habituellement attribuées à des étudiants de deuxième et troisième cycles. Le syndicat croit aussi que le nombre d’heures prévues dans les contrats a diminué, alors que la charge de travail est demeurée la même.

La directrice adjointe du service des relations professionnelles, Michèle Moreau, soutient que les allégations du syndicat sont sans fondement. «Il n’y a pas de consigne disant aux étudiants de faire la même tâche avec un nombre d’heures réduit. L’UQAM répète qu’ils doivent être payés pour le travail effectué.» La médiatrice émet une autre supposition pour expliquer la baisse du temps rémunéré des étudiants. «La seule chose que je vois, c’est que les profs et les chargés de cours en font plus qu’ils en faisaient.»

Michèle Moreau s’étonne des données avancées par le syndicat. «Les chiffres du SÉtuE et mes chiffres ne concordent pas. Il y a eu une faible diminution de la masse salariale des auxiliaires d’enseignement, mais bien moins que 14%! Il y a aussi eu moins d’argent versé pour les salaires des adjoints de recherche, mais ce n’est pas une compression budgétaire puisque cela dépend des subventions accordées aux chercheurs.»

Comparaison désolante
Par rapport aux autres universités de la métropole, l’UQAM fait piètre figure en matière de salaire. Le taux horaire des étudiants uqamiens du premier cycle oscille entre 10,43 et 12,55 dollars. Les étudiants de deuxième cycle gagnent de 12,94$ à 18,12$ de l’heure, alors que les doctorants touchent un salaire de 17,06$ à 20,24$. À l’Université McGill, les étudiants diplômés reçoivent 22,71$ de l’heure. À l’Université de Montréal, le salaire horaire est de 19,35$ à la maîtrise et de 21,30$ au doctorat.

Selon le SÉtuE, cet écart pourrait nuire à l’attrait qu’exerce l’UQAM sur les étudiants des cycles supérieurs. «Quand les gens magasinent leur université, ils magasinent les bourses, les possibilités de parfaire leurs compétences grâce à un emploi et leur salaire», explique Éric Demers.

Certains étudiants avouent prendre en compte les conditions de travail au moment de jeter leur dévolu sur un établissement d’enseignement. Éric Martin, doctorant à l’Université d’Ottawa, a effectué son baccalauréat et sa maîtrise à l’UQAM. Quand est venue l’heure de choisir le lieu de ses études doctorales, il s’est tourné vers l’Ontario, où les universités offrent, entre autres, des conditions de travail beaucoup plus avantageuses. «L’Université d’Ottawa garantit un emploi comme assistant de recherche ou d’enseignement si l’étudiant a une moyenne de plus de 80%. Et le salaire est de 34$ de l’heure.»

Michèle Moreau est quant à elle sceptique devant l’impacts des conditions salariales sur l’attraction des étudiants à la maîtrise et au doctorat. «Est-ce que le salaire sert à retenir nos étudiants? Je ne suis pas certaine. Le recrutement et la rétention ne sont pas nos premières préoccupations quand on négocie les salaires.» Elle croit plutôt que l’objectif est de permettre aux étudiants de se concentrer sur leurs études tout en ayant un revenu d’appoint.

Les conventions deux collectives du SÉtuE sont échues depuis mai 2008. Des négociations auront lieu au cours des prochaines semaines entre l’Université et le syndicat étudiant. Michèle Moreau ne peut toutefois pas promettre d’ajuster les salaires de l’UQAM à ceux des autres universités de Montréal. «On est dans un contexte financier extrêmement difficile, rappelle-t-elle. Le rapport de PricewaterhouseCoopers, en 2008, suggérait des compressions de postes de 4 millions. On a la volonté de donner de meilleures conditions de travail à nos employés, mais on doit le faire avec les moyens qu’on a.»

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Dans un discours prononcé le 22 septembre, Claude Corbo a reconnu que l’Université ne pouvait pas satisfaire les demandes syndicales des employés étant donné la situation financière de l’Université. «Quand un règlement financier aura été conclu avec le gouvernement, il sera possible de négocier efficacement», a-t-il promis.
Il a aussi reconnu l’importance du recrutement étudiant dans le rétablissement des finances de l’UQAM. «Il nous faudra apporter une attention particulière, déterminée et originale au recrutement et à la rétention des étudiants. Il nous faut poursuivre nos efforts pour que les étudiants choisissent l’UQAM et qu’ils restent tout au long de leur parcours académique.» Il n’a toutefois pas précisé si la rétention des étudiants de cycles supérieurs se conjuguait avec une augmentation des salaires des membres du Syndicat des étudiants employés.

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