Prêt douteux à l’AEMSP

L’exécutif de l’Association étudiante du module de science politique de l’UQAM (AEMSP) a choisi de prêter 3000 $ à deux québécoises détenues au Mexique et accusées de terrorisme. Cette décision controversée a entraîné la démission d’un coordonnateur de l’AEMSP et l’indignation chez ses membres, non-consultés dans cette affaire.

Le lundi 20 janvier, le coordonnateur aux affaires internes de l’AEMSP, Thomas Laberge, a annoncé sa démission de l’organisation en raison de la décision financière controversée. Cinq des huit  membres de l’exécutif ont pris la décision de soutenir financièrement les deux prisonnières québécoises sans avoir présenté la situation à leurs membres en assemblée générale (AG). «La démocratie directe devrait toujours être prônée dans notre processus décisionnel en tant qu’instance antiautoritaire et je ne peux me résoudre à y faire abstraction», s’indigne Thomas Laberge dans sa lettre publiée sur le groupe Facebook de l’association modulaire. Il ajoute être très inquiet de la voie qu’emprunte l’association.

Fallon Rouiller-Poisson et Amélie Pelletier, ouvertement de conviction anarchiste, sont présentement détenues 40 jours au Mexique à la suite d’actions de vandalisme. Le 6 janvier, armées de cocktails Molotov, les deux activistes auraient mené une attaque contre l’édifice du ministère des Communications et du Transport situé à Mexico. Elles font face à des accusations de délinquance organisée, de dommages à la propriété et de terrorisme. Le prêt de 3000$ vise à améliorer les conditions des prisonnières et à payer leurs cautions.

La surprise a été totale pour plusieurs étudiants en science politique, qui n’avaient jamais eu vent d’un tel prêt avant la lettre de démission de Thomas Laberge. Étudiante en science politique, Maëva Orville, se désole de toute l’affaire. «Ça a été décidé en catimini sans qu’on ait même pu donner notre opinion», remarque-t-elle. Même constat du côté de Philippe Blain, diplômé du programme en 2011, peu surpris d’une telle situation. «Plus ça change, plus c’est pareil. C’était exactement comme ça quand j’étais là, c’est une petite clique qui décide tout et qui manque de transparence», constate-t-il.

Le prêt monétaire cause d’ailleurs un malaise chez certains membres de l’AEMSP. «Ça me dérange qu’on prête une telle somme d’argent à une cause qui n’est pas liée directement à l’association étudiante», explique Maëva Orville. Or, ce n’est pas la première fois que l’association fait un tel prêt à des activistes. D’ailleurs, Thomas Laberge affirme dans sa lettre que ce n’est pas la nature du prêt qui l’indispose, mais la façon dont il a été voté. Responsable des communications de l’AEMSP en 2009 – 2010, Julien Parent-Houle confirme qu’une telle situation s’est produite lors de son mandat. «On a voté un prêt à Youri Couture en 2010 pour les arrestations du G20, car il est resté en prison plus longtemps que les autres», explique-t-il.  L’ancien membre de l’exécutif ne se rappelle plus du montant exact, mais croit que cela ne dépassait pas les 1000 $. Il est cependant surpris du processus décisionnel entourant le prêt de cette année. «Toutes ces décisions ont toujours été votées en assemblée générale pendant mon bac», assure-t-il.

 

À la recherche de la démocratie perdue

L’AEMSP a refusé de commenter la situation, répétant plusieurs fois que l’affaire relevait de la gestion interne. L’exécutif a même incité les membres de l’association à ne pas propager l’affaire en dehors du programme, via leur groupe Facebook. L’AEMSP laisse désormais entendre que 500 $ seront envoyés dès maintenant et que l’autre partie de la somme sera votée en assemblée générale. Cette annonce a été faite après la publication de la lettre de démission de Thomas Laberge. «On m’a répondu que l’AEMSP était morte, que de toute façon nos AG ne sont pas vraiment populeuses, que l’argent dormait sans jamais être utilisé, que nous avions été élu, et que cela était suffisant pour décider ce genre de chose», affirme-t-il dans sa lettre.

Ce changement de position de l’association n’a pas échappé à Maëva Orville. «Il y a un manque de transparence autour de cette histoire, ça me fait beaucoup penser aux magouilles croches que l’on entend à propos de nos politiciens», constate l’étudiante. Bien qu’elle n’approuve pas l’initiative du prêt, l’étudiante dit qu’elle se serait rangée derrière la décision de l’AEMSP si tout avait été discuté en assemblée générale. «Même dans la version de l’exécutif, il y a un 500 $ qui sera envoyé sans aucune consultation des membres», se désole-t-elle. Le président de l’Association des étudiants et étudiantes en sciences économiques de l’Université de Montréal (AEESEUM), Alexandre Hohenzollern-Gamache, trouve également irresponsable d’utiliser les cotisations des membres d’une association sans les consulter. «Ils crachent littéralement sur le processus de démocratie directe que toutes les associations étudiantes devraient prôner», déclare-t-il.

Une dernière incertitude concerne la nature même du prêt aux prisonnières qui pourrait être en fait un don. Dans sa lettre, Thomas Laberge avoue qu’il n’avait jamais été clair que l’argent allait être remboursé dans le futur. L’AEMSP tiendra une assemblée générale le mercredi 29 janvier à 12:30 au local R-2840, où l’affaire sera discutée.

 

Crédit photo : http://fuegoalascarceles.wordpress.com/

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