SOS Ticket conteste vos contraventions contre rémunération
À défaut de pouvoir compter sur une carte de sortie de prison comme au Monopoly, les automobilistes québécois au pied pesant peuvent faire appel aux services de SOS Ticket, une compagnie spécialisée dans la contestation de contraventions en tout genre.
Des dizaines de contraventions prennent chaque jour le chemin du 412, rue du Champ-de-Mars, une vieille bâtisse en pierre située à deux pas de la Cour municipale de Montréal. L’immeuble abrite SOS Ticket, une entreprise qui a développé une expertise pour contester les constats d’infraction remis par les divers corps policiers. Chaque jour, dix-huit employés épluchent les dossiers qui leur sont remis, représentent les clients à la Cour et négocient à la baisse les points de démérite et les amendes. «Avec notre entreprise, on désire changer la mentalité québécoise de ne pas faire valoir ses droits, affirme le président et fondateur de l’entreprise, Alfredo Munoz. C’est une question de respect: il ne faut jamais
baisser la tête devant quelqu’un.»
SOS Ticket souhaite que ses services soient accessibles à une large clientèle. «Ce qu’on veut, explique Alfredo Munoz, c’est permettre à la classe moyenne, qui n’a ni droit à l’aide juridique, ni les moyens de se payer un avocat à 100 dollars de l’heure, de pouvoir être défendue.» Pour 119,95$, les contraventions de trois points de démérite et moins sont prises en charge. Pour celles de quatre points et plus, il faut compter 359,95$. L’entreprise offre également un service de prévention par messagerie texte pour indiquer à ses clients l’emplacement des opérations policières visant à diminuer la vitesse au volant.
La contestation ne vise pas uniquement à alléger la facture des chauffeurs pris en défaut. «Si tu es étudiant à Trois-Rivières, que tu habites loin de l’université et que tu perds ton permis, ça peut vouloir dire la fin de tes études, explique Alfredo Munoz. Dans ce genre de situation, il y a possibilité d’entente entre les avocats.»
Alfredo Munoz possède lui-même une connaissance poussée des contraventions, ayant été membre du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pendant douze ans. «Pour nous, M. Munoz était en conflits d’intérêts, explique un porte-parole du service de police montréalais, Paul Chablo. En tant que superviseur, il devait d’un côté valider des contraventions émises par ses collègues et de l’autre, il les contestait.» Le SPVM lui a donc donné le choix: être policier, ou s’occuper de SOS Tickets. Il a choisi la deuxième option.
Si Alfredo Munoz se sent à l’aise de contester ses anciens collègues, c’est qu’il croit que la mission de la police n’est pas de remettre des contraventions. «Pour moi, être policier, ce n’est pas donner des tickets, c’est aider les gens. La majorité des accidents mortels se passent sur les routes secondaires, pas sur les autoroutes. Pourtant, c’est là qu’on trouve presque toutes les opérations policières. Si on voulait vraiment sauver des vies, on mettrait des radars aux endroits dangereux, pas aux endroits les plus passants. On va dire les choses comme elles sont : présentement, les tickets, c’est une question d’argent.» En 2008, les contraventions ont rapporté 135 millions$ à la Ville de Montréal, un record. Le SPVM nie agir pour des considérations pécuniaires. «Notre objectif est de diminuer le nombre d’accidents, pas de remplir les coffres», affirme Paul Chablo.
Au moment de son départ de la police de Montréal, celui qu’on appelait à l’époque sergent Munoz a semé la controverse en dénonçant les quotas de contravention imposés aux policiers. Selon lui, chaque membre de l’escouade de sécurité routière de la ville de Montréal doit donner une moyenne de 18 contraventions par jour. Si le SPVM dénie l’existence de tels quotas, un policier en fonction a confirmé à Montréal Campus que cette pratique existe. «Les voitures de police qui sont identifiées “Circulation” sont affectées à la sécurité routière exclusivement, explique-t-il. Les policiers qui en font partie ne répondent à aucun appel, ils ne font que donner des tickets et, oui, ils ont des quotas.» «Ça va à l’encontre de l’esprit de la loi, s’insurge Alfredo Munoz. En cour, le bénéfice du doute est accordé au policier parce qu’il est un arbitre impartial, qu’il n’a pas d’intérêt propre à défendre dans le dossier. S’il doit remplir un certain quota pour gagner sa vie, il a un intérêt personnel dans le dossier. Il n’y a plus d’impartialité.»
Au total, SOS Ticket traite de six à sept mille dossiers par année. Alfredo Munoz réfute les allégations voulant qu’un si grand nombre de contestations engorge les palais de justice. «Les juges et les avocats nous aiment. En fait, on désengorge le système. Quelqu’un qui conteste seul, qui ne connaît pas bien la loi, sa contestation peut lui prendre quatre heures. Nous, on peut régler ça en quinze ou vingt minutes.»
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