La fête des pères : Papa, pourquoi t’es parti? 

Présenté en première mondiale au Cinéma du Musée le 4 février, le documentaire La fête des pères d’Ayana O’Shun aborde l’absence des pères et les relations père-fille dans les communautés noires de manière habile et pertinente. 

Par Félix Rousseau-Giguère

Mené par Ayana O’Shun, réalisatrice, scénariste et productrice du film, La fête des pères est d’abord la quête de cette femme qui a été abandonnée par son père. Les statistiques en termes de familles sans père en Amérique du Nord l’ont sonnée. Dans les communautés noires, la moitié des familles est sans père, alors que, dans la population générale, c’est autour de 20 %. « Je me suis demandé : “Comment ça se fait que le chiffre est quasiment deux fois plus élevé dans les communautés noires que dans la communauté en général ? ” », explique-t-elle en entrevue avec le Montréal Campus.

Des témoignages déchirants

La force de ce long-métrage de 75 minutes réside dans les témoignages et entrevues présentés. O’Shun rend visite à une multitude de femmes noires, au Québec et en Guadeloupe, qui ont subi un abandon paternel. 

Ces intervenantes sont éloquentes et leurs histoires d’abandon, quoique similaires par leur nature, sont uniques et apportent toutes un éclairage différent au thème. 

Vers la fin du film, Carlos Moore, ethnologue guadeloupéen réputé, apporte son point de vue et donne une explication historique de l’abandon massif des pères dans les familles noires. Son exposition de la situation permet de mieux comprendre la racine de ce problème, et mène de façon lumineuse à l’épilogue.

La crainte des stéréotypes

Au début du film, Ayana O’Shun énonce que le sujet de son documentaire est tabou. Elle a longtemps hésité avant de le produire, entre autres, parce qu’elle ne souhaitait pas renforcer encore plus ce stéréotype pesant sur les hommes noirs. 

 « Je veux aller au-delà du stéréotype pour essayer de comprendre le phénomène et d’avoir certaines vérités par rapport à ça. Ma démarche en était une de réconciliation et de guérison, j’espère que c’est ça qui va transparaître du film », raconte-t-elle.

Même si, pendant la première moitié du film, on craignait que ces stéréotypes soient renforcés dû aux témoignages négatifs envers les pères, on n’a pas le choix de dire que c’est mission accomplie pour Ayana O’Shun. La deuxième moitié donne place aux récits de plusieurs pères présents dans la vie de leurs filles, et nous laisse avec une note d’espoir. Depuis 2020, le nombre de familles noires monoparentales a baissé de moitié. Le pourcentage de familles noires sans père au pays est aujourd’hui de 24 %.

Une esthétique recherchée

Visuellement, le long-métrage est très léché. On voit de magnifiques plans de Montréal, de la Guadeloupe et des différentes femmes interviewées dans leur quotidien. La caméra rend justice à toutes les personnes filmées et le côté dynamique des entrevues – elles ont parfois lieu dehors, debout, en mouvement – vivifie le visuel du film. 

L’inspiration du cinéma-vérité est d’ailleurs très sentie. « Je voulais vraiment que le public rentre dans leurs vies hyper intimement, qu’on ait l’impression d’entrer dans les secrets de toutes ces femmes-là. C’était le cinéma-vérité d’abord et avant tout », note la réalisatrice. 

Malgré une fin un peu trop scénarisée et sentimentale, La fête des pères est un documentaire à voir absolument. Les réalités qu’il présente chamboulent et font réfléchir. On y apprend une multitude d’informations tout en passant du rire aux larmes. 

Le film sera diffusé sur ICI Télé le 22 février et a pris l’affiche le 7 février au Cinéma du Musée, au Cinéma Public et à la Cinémathèque québécoise.

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