Intéresser la population québécoise à l’histoire de l’Holocauste, partager les récits des survivant(e)s et encourager la tolérance : c’est ce qu’espèrent réaliser les créateurs et créatrices du documentaire Shoah, je me souviens à l’occasion du 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz.
Le 27 janvier est la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, ou Shoah : la persécution et l’assassinat systématique de six millions de personnes essentiellement de confession juive. Entre 1947 et 1951, 40 000 personnes juives ont quitté le continent européen pour le Canada. 20 000 d’entre elles se sont installées à Montréal. En quatre épisodes, Shoah, je me souviens retrace leurs pas et leur influence sur le Québec d’aujourd’hui.
À leur arrivée à Montréal, beaucoup s’installent sur le boulevard Saint-Laurent. Le traumatisme de la Shoah et les tensions entre anglophones et francophones, déjà existantes, rendent leur processus d’intégration long et complexe. Malgré cela, les survivant(e)s ont laissé leur trace dans la métropole.
Shoah, je me souviens est parsemé d’images du Montréal de l’époque et d’aujourd’hui. Une histoire méconnue et qui n’est pas si lointaine se dissimule sous des scènes du quotidien montréalais, comme au parc Jeanne-Mance ou sur le boulevard Saint-Laurent.
« Leur histoire est profondément québécoise parce qu’ils ont occupé les lieux »
Isabelle Lacasse
« Leur histoire est profondément québécoise parce qu’ils ont occupé les lieux », explique Isabelle Lacasse, qui a dirigé la recherche pour le documentaire. Dans les lieux qui y sont présentés, « on reconnaît la ville, on reconnaît le Québec ».
Garder le souvenir vivant
À Montréal comme partout ailleurs, il reste de moins en moins de survivant(e)s de l’Holocauste qui peuvent raconter leur histoire. Histoire qui, pour les plus jeunes, peut sembler distante. « Le temps fait son œuvre, ce qui fait en sorte que la mémoire s’effrite […] il y a de l’oubli qui se passe », déplore Mme Lacasse.
Muguette Myers est l’une de ces survivantes. Cachée dans un petit village de France pendant la Shoah, elle quitte l’Europe avec sa mère pour aller rejoindre des oncles à Montréal après la guerre.

Mme Myers donne maintenant des conférences aux groupes scolaires qui visitent le Musée de l’Holocauste Montréal. « C’est difficile, mais c’est nécessaire » de raconter son histoire, dit-elle.
Le documentaire présente d’autres survivant(e)s : George Reinitz, fondateur du centre de lutte où s’entraîne l’ex-champion d’arts martiaux mixtes Georges St-Pierre, et Elie Dawang, qui racontait aussi son histoire aux groupes scolaires visitant le Musée de l’Holocauste Montréal. M. Dawang est décédé le 29 décembre 2024, à l’âge de 91 ans.
Le Musée de l’Holocauste Montréal a contribué au documentaire, il s’agit du seul musée consacré à l’histoire de la Shoah au Canada.
« Rien ne pourra remplacer les survivants. C’est une façon d’humaniser l’histoire et de former une connexion personnelle avec quelqu’un », affirme la directrice des communications du musée, Sarah Fogg.
Jamais plus
Le dernier épisode de la série documentaire, intitulé L’avenir, encourage la réflexion sur l’importance de la commémoration de l’Holocauste au Québec.
L’anthropologue et historien Pierre Anctil explique dans le documentaire que « dans une société qui veut réfléchir à la tolérance, aux droits fondamentaux, à l’accueil des différences, ces évènements-là nous apportent une leçon, nous font comprendre à quoi peut mener l’intolérance ».
C’est pour cela que Muguette Myers témoigne. « Je dis [aux enfants que] plus tard, c’est vous qui ferez les lois, c’est vous qui serez au pouvoir. […] Il faut être tolérant. Si vous voyez qu’une injustice a été commise, il faut parler, il faut protester, il faut s’impliquer. »
Shoah, je me souviens entretient le souvenir de la tragédie du 20e siècle. Pour que l’histoire ne sombre pas dans l’oubli. Pour que la tolérance et la vie démocratique perdurent. Pour que tous(tes) les Québécois(e)s, jeunes et moins jeunes, le disent d’une seule voix : jamais plus.
Le documentaire est disponible en ligne et sera diffusé à Savoir média le 27 janvier à 21h30.
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