Sport universitaire« L’inclusion devrait être la base » 

Les personnes transgenres doivent composer avec des défis d’inclusion dans le monde sportif universitaire, dans des catégories traditionnellement binaires.  

« Les catégories [de genres] en ce moment sont contraignantes », affirme Camille Michon, responsable de conception et chargée de projet à Sport’Aide, un service d’accompagnement contre l’intimidation en milieu sportif. Le sport universitaire commence à remettre en question la pertinence et la nécessité d’instaurer des critères pour les catégories de genre. Ces critères touchent les taux hormonaux, les capacités cardiovasculaires et les caractéristiques physiologiques de l’athlète. 

« Pour moi, toute forme d’exclusion volontaire est de la transphobie », ajoute-t-elle. Elle juge qu’exclure les personnes en cours de transition des catégories sportives genrées dans lesquelles elles souhaitent s’entraîner est un manquement de la part du milieu sportif. Selon elle, il faut regarder au-delà des critères d’admissibilité mis en place, du moins lorsqu’il ne s’agit pas d’un sport de combat ou de compétition.

Les obstacles problématiques plus importants lorsqu’il s’agit de compétitions sportives, mais vont au-delà du sport. Que ce soit au sein d’une équipe LGBTQ+ ou non, « [fréquenter] les vestiaires demeurent un moment délicat » pour Gabriel*, qui n’ose pas prendre de douches dans les vestiaires communs.

Problème complexe et solutions mixtes

La pratique sportive, surtout en compétition, est typiquement divisée en catégories binaires de genre. D’après Camille Michon, le milieu des sports universitaires devrait s’inspirer des sports mixtes, comme l’ultimate frisbee, où « il y a moins de limites ou de contraintes par rapport à l’inclusion ».

 Les équipes mixtes ont leurs avantages et leurs inconvénients. Elles permettent aux personnes transgenres et non binaires d’être incluses « sans se sentir trop marginalisées », dit Antoine Beaulieu, entraîneur avec l’AS Montis, club de soccer de Saint-Bruno-de-Montarville. 

Mais encore, avec les exigences de mixité, il peut y avoir de la transphobie et « des problèmes à faire accepter, tant à l’arbitre qu’à l’adversaire. Par exemple, qu’une femme puisse être considérée comme une femme au sens “sportif” », spécifie Gabriel*.

Dans un monde idéal, Antoine Beaulieu espère que les équipes mixtes permettraient de réduire cette stigmatisation des minorités de genres. Toutefois, plusieurs entraîneurs et entraîneuses, sans être nécessairement transphobes, ont des préjugés sexistes, selon lui. 

Par exemple, il souligne qu’il risque d’y avoir « moins de femmes sur le terrain », pour favoriser les performances athlétiques masculines cisgenre au profit de l’équipe, lors d’une compétition.

Les aspects scientifiques et médicaux sont à la base de la crédibilité de toutes les catégories sportives en compétition. Ils définissent les critères pour les catégories de genre, d’âge ou de poids, comme dans la boxe ou dans d’autres disciplines qui ont des barèmes stricts. Camille Michon clarifie que la recherche est essentielle pour établir ces normes.

Cis ou trans, les femmes sont exclues

Une problématique survient aussi pour les personnes cisgenres avec les critères de genre dans les catégories sportives. À cause de la transphobie, certaines femmes cisgenres « qui ont des attributs jugés masculins sont pénalisées », dit Mme Michon. 

Imane Khelif, une boxeuse cisgenre algérienne, a été accusée d’être transgenre, puis soupçonnée d’avoir un taux de testostérone jugé trop élevé. Ces allégations ont créé une vague de commentaires cherchant à décrédibiliser la victoire de l’athlète aux Jeux olympiques de Paris en 2024. 

« Des caractères génétiques distinctifs chez les hommes, il y en a, mais on ne va jamais discriminer un homme disant qu’il est trop “homme” », dit Mme Michon. 

La polémique concernant les avantages physiologiques était minime chez Michael Phelps, par exemple. La morphologie hors norme du nageur olympien n’a pas influencé sa possibilité de compétitionner.

Chaque sport fait appel à différentes habiletés. Les barèmes et les critères varient donc selon la pratique. C’est le cas de la boxe, où les catégories sont divisées en fonction d’un critère physique particulier : la masse.

Représentation médiatique 

La nageuse transgenre Lia Thomas a reçu beaucoup de critiques sur son admissibilité aux compétitions, après n’avoir obtenu qu’une seule médaille. Jusqu’à ensuite se voir refuser sa participation aux Jeux olympiques en natation féminine par le Tribunal arbitral du sport (TAS). Depuis, pour déterminer l’admissibilité des athlètes transgenres, un travail se fait au cas par cas, « selon les niveaux de compétition et les types de pratique d’activité physique », explique Mme Michon. 

Selon l’experte, la représentation médiatique négative des personnes transgenres au sein du sport compétitif peut décourager des jeunes. « [Les personnes trans] se rendent compte qu’elles vont avoir un choix à faire entre leur sport et leur transition », déplore-t-elle. 

« Juste le fait de faire son “coming-out” peut tellement enlever un poids, puis permettre de performer au meilleur de ses capacités », estime Camille Michon, détentrice d’une maîtrise sur les expériences sportives d’athlètes transgenres au Canada.

La sphère sportive doit s’adapter et explorer les solutions qui se présentent pour les minorités de genre, selon Camille Michon. « Autant dans la conception du sport que dans la culture, il y a des changements à améliorer pour que l’inclusion soit au centre des préoccupations », établit-elle.

D’un autre côté, l’enjeu autour de la transphobie et de l’inclusion ne découle pas toujours de l’aspect physique. « Il ne s’agit pas tout le temps d’une peur que la personne soit plus forte physiquement », dit Gabriel*.

Selon Antoine Beaulieu, la transphobie dans le sport ressort peu de l’aspect physique, mais plutôt des idéologies à sa racine. « C’est un milieu très arriéré », se désole l’entraîneur. 

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