Blocage des nouvelles : la riposte des journalistes

Depuis le blocage des nouvelles sur les plateformes de Meta, les journalistes québécois(e)s font front commun et multiplient les solutions pour poursuivre leur mission d’informer la population.

« S’il y a une erreur qu’on a faite, c’est qu’on a beaucoup trop misé dans nos stratégies de déploiement de l’information sur Facebook », reconnaît Sylvain Desmeules, vice-président information et numérique pour les Éditions Nordiques, un groupe de presse qui détient quatre journaux distribués sur la Côte-Nord et dans Charlevoix.

Malgré les défis qui s’annoncent pour les salles de presse du Québec, Sylvain Desmeules voit le blocage des nouvelles par Meta comme une opportunité pour le journalisme de se sevrer de Facebook. « C’est l’occasion de développer des moyens différents afin de permettre aux gens d’accéder à l’information », estime celui qui occupe aussi le poste d’éditeur au Charlevoisien.

Ce constat est partagé par Steve Proulx, président et fondateur de l’agence de marketing 37e AVENUE. « On voyait [Facebook] comme une nouvelle patente. On trouvait ça excitant et on ne s’est pas posé de question », illustre l’ex-chroniqueur du magazine Voir

Après le bilan, les actions

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) se penche sur les manières de sensibiliser la population aux enjeux entourant le bras de fer entre le géant californien et Ottawa. 

« Au début du mois d’août, Facebook publiait un message qui pointait du doigt le gouvernement canadien et le projet de loi C-18 pour le blocage des nouvelles. C’est comme ça que nous avons eu l’idée d’organiser la “journée sans Meta”, pour valoriser les médias et déjouer la campagne de désinformation de Meta », résume Michael Nguyen, journaliste au Journal de Montréal et président de la FPJQ. 

Le 15 septembre dernier, la population a été invitée à larguer les plateformes de Meta. Selon Jean-Hugues Roy, professeur à l’UQAM, le nombre de publications destinées au public québécois a chuté de 15 % au cours de la « journée sans Meta ». Les interactions sur la plateforme ont quant à elles chuté de 7 %. M. Roy se base sur les données des six vendredis précédant la « journée sans Meta » pour établir une moyenne.

S’unir pour informer

Sylvain Desmeules constate que de nombreux citoyens et citoyennes lui ont fait part de leur étonnement de ne plus pouvoir lire les nouvelles de leur hebdo local sur les réseaux de Meta. « Certains consomment ce que Facebook leur donne, sans nécessairement se poser de question. C-18 est un enjeu très politique et pas nécessairement sexy pour monsieur et madame tout le monde. De là l’importance d’en parler », défend l’éditeur du Charlevoisien.

Le périodique basé à Baie-St-Paul et à La Malbaie s’est donc associé avec des radios locales pour mettre de l’avant une campagne de sensibilisation. « On explique aux gens comment s’informer sans vivre aux crochets de Facebook. On en profite pour présenter le travail de nos journalistes et souligner leur présence sur le terrain », argue monsieur Desmeules, qui salue au passage la solidarité entre les médias de sa région. 

De plus, les Éditions Nordiques sortiront au début du mois d’octobre une application mobile, regroupant les nouvelles des quatre périodiques du groupe médiatique. « On a mobilisé nos équipes pour devancer la sortie de l’application depuis quelques semaines. Ce sera une application créative », résume Sylvain Desmeules.

Se réapproprier les médias sociaux  

Le fondateur de 37e AVENUE doute que le modèle d’affaires de Meta soit compatible avec la mission des médias d’information, d’où la pertinence d’une nouvelle plateforme locale. « Pour le moment, ce n’est qu’un élan. Nous ne sommes pas certains de la forme exacte que ça prendra », confie Steve Proulx. 

L’objectif de cette plateforme ne sera pas de concurrencer les GAFAM, mais plutôt d’offrir une nouvelle alternative aux Québécois et aux Québécoises qui désirent consommer de l’information locale : « Imaginez une plateforme où l’on peut suivre ce qui se passe au Québec comme actualité, comme culture, comme sport […] dans le style d’Apple News, mais concentré sur le Québec. »

Pour tenir le public au parfum des avancées du projet, M. Proulx a mis sur pied la série de balado hebdomadaire La nouvelle place. Le premier épisode a été mis en onde le 23 septembre dernier. L’ex-chroniqueur s’est entretenu avec Maxime Larrivée-Roy, créateur de ZuckHub.ca, un site visant à contourner le blocage des nouvelles en générant des liens partageables sur Facebook.

Mention photo : Chloé Rondeau

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