L’électrification des transports, une solution avec des complications

Face aux phénomènes météorologiques extrêmes, de plus en plus fréquents en raison des changements climatiques, le réseau de transport québécois s’avère inadapté. Alors que la province amorce sa transition vers l’électrification des transports, de nombreuses infrastructures nécessitent d’être repensées.

« Nos infrastructures, pour la plupart, n’ont pas été construites [en tenant] compte de la modification du climat et des événements météorologiques », souligne Philippe Gachon, professeur en hydroclimatologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). « Dans le passé, on ne [pensait pas aux] changements climatiques », ajoute-t-il. Certaines des infrastructures québécoises comme les égouts et les « ouvrages d’évacuation des eaux de ruissellement » ne sont pas adaptés pour les instabilités météorologiques, relève M. Gachon.

Daniel Gill, professeur honoraire de la faculté d’aménagement de l’Université de Montréal, abonde en ce sens, mais il souligne qu’il existe tout de même des stratégies pour s’adapter à des tempêtes comme celle du 13 septembre dernier. 40 millimètres de pluie se sont abattus sur le centre-ville de Montréal entre 17 h et 18 h, inondant notamment la station de métro Square-Victoria-OACI et forçant sa fermeture temporaire.

« Ce qu’il faut faire, c’est de la rétention d’eau en surface, c’est-à-dire qu’on remplit des bassins et quand ils sont pleins, on les déverse dans le système d’égout », décrit M. Gill. Les « bassins capteurs » sur l’avenue Papineau à Montréal sont des exemples d’infrastructures vertes qui servent à prévenir les débordements d’eau en surface lors de tempêtes.

Un réseau ferroviaire électrique envisageable 

Au-delà des conditions météorologiques extrêmes, le Québec devra adapter son système de transport aux changements climatiques en misant sur l’électrification.

Philippe Gachon relève un élément peu abordé au Québec en matière de transport collectif électrique. Le professeur de l’UQAM se demande pourquoi le Québec ne développe pas un réseau ferroviaire électrique qui permettrait de se déplacer partout dans la Belle Province. Selon lui, le temps presse.

« Plus on retardera le transport efficace de personnes, de passagers, [moins] nous pourrons répondre aux objectifs qu’on s’est créé en termes d’électrification de transport et d’efficacité de transport », déclare M. Gachon. Ce dernier préconise l’électrification d’un réseau de trains provincial plutôt que l’utilisation de voitures électriques personnelles.

VIA Rail avait écarté en juin 2021 la construction d’un train à grande vitesse (TGV) reliant Montréal à Toronto ou à Québec. Il a plutôt annoncé la construction d’un train à grande fréquence (TGF) entre Québec et Windsor.

Toutefois, M. Gachon ne croit pas qu’un tel projet règlera le problème. « Le gouvernement vient de faire éclore un projet qui date des années 70 qui s’appelle un train à grande fréquence. […] Les gens ne prendront pas ce train-là s’il n’est pas plus rapide que l’auto ou l’avion », explique le professeur. Il mentionne que malgré les températures instables, un réseau ferroviaire électrique efficace à travers le Québec est envisageable. « Ça ne veut pas dire que ça fonctionnerait 365 jours sur 365 à cause de la rigueur de nos hivers, mais la technologie existe », note-t-il.

Les voitures électriques ne sont pas épargnées 

En 2035, il sera interdit au Canada d’acheter une voiture neuve à essence. Plusieurs personnes se sont déjà préparées au changement, comme Mélissa Massicotte, qui réside à Terrebonne. Le transport en commun y étant moins développé qu’à Montréal, les voitures électriques semblent être la solution pour se déplacer aisément partout sans polluer. Cependant, la Terrebonnienne rapporte que les températures hivernales du Québec peuvent avoir une incidence sur son véhicule électrique.

« L’hiver, je perds plus ou moins 30 % d’autonomie », dit-elle en parlant de la batterie de sa voiture. « Quand il faisait vraiment froid, on a souvent eu des problèmes avec la [borne de recharge]. Elle n’ouvrait pas et ne se connectait pas bien, parce qu’il y avait un flocon sur la prise », ajoute Mme Massicotte. 

Ce sont quelques exemples d’inconvénients propres aux voitures électriques dû au climat nordique de la province. « Personnellement, j’aurais plus tendance à dire que c’est mieux de louer que d’acheter une voiture électrique. À long terme, les remplacements de batterie peuvent être vraiment coûteux », conclut-elle.

En ce qui concerne l’aménagement des villes pour accommoder les voitures électriques, l’emplacement des bornes rechargeables est fondamental. « Installer des bornes de recharge un peu partout dans la ville, c’est un gros investissement et il y a des impacts en termes de design », indique Daniel Gill. Par conséquent, une révision de l’aménagement urbain est à prévoir pour répondre aux besoins d’un parc automobile électrique, conclut-il.

Mention photo : Camille Dehaene|Montréal Campus

Commentaires

Une réponse à “L’électrification des transports, une solution avec des complications”

  1. Avatar de André Bastien
    André Bastien

    Même si la batterie perd de l’autonomie par grand froid l’hiver, cela n’a généralement pas d’impact: les véhicules électriques de cette année ont presque tous plus de 400 km d’autonomie et le parcours quotidien moyen des québécois est inférieur à 60 km pour la très grande majorité des gens.

    On peut aussi réduire la baisse d’autonomie en préchauffant la batterie avant de partir, pendant que le véhicule est encore branché sur la borne de recharge.

    La prise de recharge peut être protégée l’hiver avec un petit accessoire qui empêche la neige d’y entrer; cet accessoire se vend sous le nom de « capuche »… Et bien des gens débrouillards la protège avec un truc maison.

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