Au gré des votes et des sondages, les partis politiques privilégient habituellement l’éducation, la santé, l’environnement ou encore la question nationale pour séduire l’électorat québécois, laissant souvent l’enjeu de la culture à l’arrière-plan. Rencontre avec trois artistes qui revendiquent des gestes concrets pour valoriser la culture québécoise.
Malgré des temps pandémiques houleux pour le milieu culturel et ses finances, la ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy, dresse un portrait positif de son dernier mandat.
Le gouvernement caquiste sortant a mis en place des mesures d’aide aux artistes en période de crise sanitaire, augmenté le budget de Télé-Québec et financé l’émission estivale La belle tournée diffusée à TVA. La formation politique dirigée par François Legault a également annoncé la création de la Maison de la chanson et de la musique du Québec ainsi que des Espaces bleus, un réseau de musées historiques visant à promouvoir des bâtiments patrimoniaux dans chacune des régions du Québec.
Le chanteur Émile Bilodeau demeure malgré tout critique du gouvernement sortant. Il indique que le climat politique actuel est peu invitant pour les artistes engagé(e)s comme lui. « Quand j’ai fait le spectacle de la Fête nationale en 2020 avec mon macaron [contre la loi 21], […] je me suis fait ramasser dans les médias », raconte-t-il. « Ça n’encourage pas les artistes à militer activement […]. Je trouve le premier ministre arrogant là-dessus, il veut juste que ça marche à ses idées. »
Au cours de cette campagne électorale, l’artiste a salué les plateformes du Parti québécois (PQ) et de Québec solidaire (QS). Ces deux partis proposent plus de bons d’achat culturels pour les jeunes et les personnes immigrantes.
Faire rayonner les projets québécois
L’acteur et réalisateur Luc Picard (Confessions, Omertà) rappelle que « la culture a toujours eu besoin d’argent ». Celui qui a récemment remporté le prix Gémeaux du meilleur premier rôle masculin (série dramatique) pour Aller simple espère que le prochain gouvernement fera une promotion soutenue de la culture d’ici. En plus du soutien de l’exportation des productions culturelles à l’étranger, il estime que l’aide aux secteurs télévisuel et cinématographique devrait aussi être bonifiée.
« Il y a des pays comme la Corée du Sud où ils ont décidé de faire une grosse promotion [de leur culture], pis ça marche! », observe-t-il. Le comédien défend que la culture est ce qui garde en vie une nation. « C’est à travers elle que l’on trouve des points communs entre les générations », plaide-t-il.
Alors que la scène artistique se remet à peine de la pandémie et que plusieurs productions artistiques obtiennent peu de redevances en ligne, Émile Bilodeau affirme qu’au moment où « [le Québec] devien[drait] un pays, notre rayonnement et notre sécurité culturels vont aller de pair ».
Des artistes en politique
Plusieurs personnes artistes ont eu une deuxième carrière sur la scène politique québécoise, telles que Gérald Godin, Catherine Dorion, Pierre Curzi ou Denis Trudel. Pour l’acteur Pierre-Luc Brillant (C.R.A.Z.Y., Stat), candidat du PQ dans Rosemont, son engagement politique s’inscrit dans un axe résolument culturel : « J’avais le goût de faire ma part pour entreprendre un grand projet collectif : réaliser notre indépendance, protéger notre langue et notre culture de l’américanisation », explique-t-il. Depuis le début de la campagne, l’aspirant député courtise les électeurs et électrices de Rosemont en compagnie de sa conjointe, l’actrice Isabelle Blais (Les invasions barbares, Stat).
M. Brillant a annoncé le 17 septembre dernier la plateforme culturelle détaillée de son parti. Le PQ promet la création d’un bureau de promotion internationale et la production d’émissions jeunesse québécoises. Pierre-Luc Brillant s’avance en outre sur la création d’un Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications québécoises (CRTQ). Cet organisme remplacerait son pendant fédéral bilingue, soit le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) qui régit les contenus diffusés sur les ondes publiques et privées.
« On n’a plus le contrôle sur les contenus artistiques numériques [comme Netflix], il n’y a aucune garantie [stable] pour du contenu québécois là-dessus », fait remarquer M. Brillant. « S’il y avait un CRTQ, on aurait le contrôle là-dessus. […] On s’appauvrit comme peuple, les gens […] regardent moins leur propre culture », déplore-t-il.
L’aspirant député propose aussi une assurance-artiste qui protégerait leurs revenus souvent précaires. Selon M. Brillant, plusieurs artistes ne peuvent pas refuser de contrat, même si le sujet de la pièce, du téléroman ou du film ne leur plaît pas, parce qu’ils ont besoin des revenus.
Au-delà des promesses électorales, Émile Bilodeau souhaite avant tout que l’importance du rôle des artistes soit reconnue. « Dans le temps de la pandémie, on s’est fait dire [par le gouvernement] qu’on n’était pas des travailleurs essentiels, qu’on n’était que du divertissement. […] Il faut que ça change dans le prochain gouvernement! », conclut-il.
Mention photo : Camille Dehaene | Montréal Campus
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