Une autre crise – la crise climatique – menaçait déjà la santé de la planète bien avant l’arrivée du virus. Voyant l’attention du gouvernement québécois accaparée par la gestion de la pandémie de COVID-19 depuis la dernière année, certains et certaines soulèvent des inquiétudes quant à l’application des politiques environnementales dans un futur rapproché.
Au début de la crise sanitaire, la planète a enregistré une baisse historique de 17 % des gaz à effets de serre (GES), qui s’explique notamment par la diminution du trafic aérien et les fermetures d’usines. Bien que cette diminution de l’émission de GES n’ait été que momentanée, les données recueillies prouvent que la crise climatique peut être ralentie en adoptant des politiques modifiant nos modes de vie.
Simon Langlois-Bertrand, professeur au Département de science politique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), remarque qu’au départ, on pouvait craindre que les difficultés financières et sociales engendrées par la pandémie poussent les gouvernements à adopter une relance économique plus standard pour faciliter la reprise des activités. « Le grand défi [est de déterminer] dans quelle mesure [le gouvernement] peut réussir à allier la relance économique à des programmes qui sont plus bénéfiques du côté environnemental », explique sa collègue Maya Jegen, professeure à la Faculté de science politique et de droit de l’UQAM.
Le vert, la couleur de l’argent
Selon l’attachée de presse au cabinet du ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques Geneviève Richard, la pandémie n’a pas affecté l’importance accordée à cet enjeu au sein du gouvernement québécois. Elle affirme que leurs dossiers qui concernent l’environnement « vont bon train et continuent de progresser ».
La Coalition Avenir Québec (CAQ) a présenté son premier Plan pour une économie verte 2030 en novembre dernier, en dépit de la COVID-19. Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement prévoit investir chaque année, durant cinq ans, jusqu’à 6,7 milliards de dollars dans la lutte contre les changements climatiques. « Ce budget annuel est deux fois plus élevé que celui du Plan 2013-2020, ce qui témoigne de notre réelle volonté d’agir pour réussir la transition climatique », explique l’attachée de presse.
Représentante de la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social (CEVES), Clémence Roy-Darisse estime que « c’est quand même évocateur que la CAQ propose un plan pour une économie verte. » Le professeur de science politique Simon Langlois-Bertrand remarque quant à lui que les gouvernements d’ici et d’ailleurs sont, vu l’urgence d’agir, « un peu forcés de réfléchir » à des mesures pour ralentir la crise climatique.
Dans son plan de mise en œuvre pour une économie verte, le gouvernement québécois prévoit de réduire les émissions de GES de 37,5 % par rapport au niveau enregistré en 1990. Sachant que le Québec n’a pas respecté ses engagements prévus pour 2020 en matière de réductions des émissions des GES, Clémence Roy-Darisse souligne que cette cible n’est « pas assez ambitieuse » pour atteindre les objectifs établis par l’Accord de Paris. Simon Langlois-Bertrand est d’avis que seul le temps permettra de dire si les mesures prises se seront avérées efficaces.
La militante estime qu’il s’agit d’un premier pas pour la cause environnementale si le plan se concrétise, mais qu’« il faut faire plus ». Maya Jegen remarque que seuls les résultats permettront de différencier les mesures effectives de la rhétorique. En ce sens, la CEVES revendique que le gouvernement actuel soit responsable de ses actions en s’imposant des objectifs à très court terme pour que des effets puissent être remarqués avant la fin de son mandat.
Tous et toutes responsables
Clémence Roy-Darisse est d’avis que cette lutte pour la justice climatique ne devrait pas reposer sur les épaules d’un seul ministère : « On doit adopter ces lunettes-là partout. […] Tout le monde doit amorcer cette transition. On a besoin de repenser notre rapport au monde. »
Pour la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social, la conscientisation de la population reste primordiale dans cette lutte pour la justice climatique. La pandémie constitue un défi supplémentaire pour l’organisation, qui continue toutefois à faire pression et à mettre ses initiatives à exécution, même si ce travail se fait surtout en ligne.
La présidente du Comité institutionnel d’application de la Politique en matière d’écoresponsabilité (CIME) de l’UQAM, Annie Corriveau, souligne que « le travail s’est poursuivi malgré la pandémie et toutes les contraintes organisationnelles qu’elle a pu entraîner. » Elle remarque finalement que « le contexte de COVID rend plus difficile la tenue de [certaines] activités, alors la résilience et la créativité sont plus que jamais nécessaires pour dynamiser le milieu. »
Une illustration de Lila Maitre | Montréal Campus
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