Entre ici et ailleurs : apéro-conférence avec une journaliste et son fixeur palestinien

À l’occasion de son 20e anniversaire, le magazine uqamien d’information internationale, L’Apostrophe, a lancé une série de trois apéro-conférence sur le thème du journalisme international. Dans le cadre d’un webinaire décomplexé, la journaliste indépendante Sabrina Myre, basée à Jérusalem, et son fixeur palestinien Hasan Jber ont discuté des défis du métier dans une zone conflictuelle comme la Palestine et l’Israël.

Une centaine de participants et de participantes ont assisté à l’événement, animé par la co-rédactrice en chef de l’Apostrophe Laurence Taschereau. Le public, composé entre autres d’étudiantes et d’étudiants de l’UQAM et du cégep d’Alma en technique médiatique, a pu poser des questions à ces deux invités spéciaux lors du deuxième volet de la série, le 28 janvier, en lien avec les enjeux du journalisme en zone de conflit et les changements dans le métier de correspondante indépendante dans les dernières années.

Sabrina Myre et Hasan Jber ont travaillé ensemble pour couvrir les événements dans la bande de Gaza durant quatre ans, de 2016 à 2020. La journaliste s’est vite rendu compte de l’impératif de faire affaire à un fixeur pour travailler en Palestine, particulièrement dans cette zone contrôlée par le Hamas, l’autorité politique palestinienne. En décrivant son expérience, Sabrina explique: « Pour être autorisé à passer […] entre l’Israël et Gaza, ça prend une carte de presse israélienne, qui est parfois difficile à obtenir, […] un permis du Hamas, et sur le permis du Hamas, j’ai besoin du nom de mon fixeur, de Hasan ». 

Hasan Jber résume l’importance d’un fixeur auprès des journalistes internationaux en une phrase clé : « tous ces gens sont sous ma responsabilité ». En d’autres termes, il sert d’intermédiaire aux journalistes dans une région à risque. En plus d’assurer leur sécurité, son intervention est nécessaire pour avoir accès aux politiciens et aux événements importants. 

Parmi les histoires racontées lors de l’apéro-conférence, Hasan Jber explique la précarité de la sécurité des journalistes et des fixeurs lorsqu’ils et elles communiquent avec le Hamas. Toute suspicion de leur part de connivence avec l’État israélien met à risque les journalistes comme les locaux d’être interrogé(e)s durant des heures, peut-être même renvoyé(e)s hors de la bande de Gaza.

Un poste précaire

Pour Sabrina Myre, les défis ne sont pas que sur le terrain. La logistique du métier de correspondante à l’étranger est compliquée depuis les dernières années. « Les médias n’ont pas assez de budget pour payer des correspondants permanents », souligne la journaliste. Les pigistes doivent donc assumer les frais de leurs séjours à l’étranger et trouver des façons de rentabiliser leurs dépenses par la vente de leurs reportages.

Sans correspondants ou correspondantes permanent(e)s, les médias ont souvent recours à des agences de presse internationales, mais Sabrina soutient « qu’il faut aller plus loin que la nouvelle brute, il faut faire des sujets de société pour mieux comprendre le monde dans lequel on vit, il faut aussi avoir sur place des journalistes québécois […] qui puissent nous raconter l’actualité internationale avec notre lunette. » C’est pourquoi elle appelle au changement dans les pratiques de l’industrie ainsi qu’à la valorisation du métier de correspondant indépendant.

La discussion avec Sabrina Myre et Hasan Jber coïncide tout à fait avec la mission de L’Apostrophe. La co-rédactrice en chef Lila Dussault décrit le magazine comme « une école pour les gens qui s’intéressent au journalisme ». L’objectif de la série d’apéro-conférence est justement « d’aller toucher différentes facettes du journalisme international », ajoute-t-elle. 

La première de la série d’apéro-conférences s’est déployée le 25 novembre dernier sous le thème des enjeux éthiques de l’information internationale, avec pour invité le journaliste indépendant et écrivain Frédérick Lavoie.

Mention photo Édouard Desroches | Montréal Campus

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