La recherche en chaire et en os à l’UQAM

Les chaires de recherche, se déclinant sous une multitude de thématiques et de programmes différents, sont au coeur de la mission de l’UQAM. La Chaire Raoul-Dandurand, très en demande en 2020, est d’ailleurs un exemple prenant de ces chaires qui arrivent à se démarquer à l’extérieur de l’UQAM. Elles ont connu, au cours des 40 dernières années, maintes transformations. 

Une chaire de recherche est un mandat attribué à un enseignant ou une enseignante ou encore un chercheur ou une chercheuse pour développer un champ d’études sur une thématique précise. À l’UQAM, il existe divers programmes auxquels une chaire peut s’associer.

Selon le dernier rapport annuel de l’UQAM (2018-2019), le financement global pour la recherche était de 72,70 millions, dont 68,53 provenaient de sources externes comme  des subventions, des dons de la Fondation de l’UQAM ou des ententes contractuelles avec un partenariat privé ou public. L’UQAM compte 26 chaires recherche-innovation/recherche-création, dont le financement est externe. Elles ont un mandat minimal de cinq ans et requièrent un montant d’au moins 100 000$ par année. Un financement record de 3,9 millions a été accordé à l’été 2020 pour la création à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM de la Chaire de recherche-innovation en planification des systèmes intelligents de logistique et de transport.

Les chaires stratégiques de l’UQAM ont quant à elles une enveloppe de 25 000$ par année pour un mandat de trois ans. Leur financement est interne, donc assumé par l’université. Le 13 janvier dernier, quatre nouvelles chaires stratégiques de l’UQAM se sont ajoutées aux 17 chaires déjà créées depuis 2014. Neuf d’entre elles sont en prolongation de mandat. 

Il existe aussi le Programme des chaires de recherche du Canada. Créée en 2000, l’initiative investit annuellement 295 millions et compte plus de 2000 chaires, dont 32 à l’UQAM. Des organismes subventionnaires soutiennent leur financement. À l’été 2020, 3,9 millions ont été octroyés pour le renouvellement de deux chaires et la création de quatre chaires à l’UQAM.

C’est à l’arrivée de Claude Corbo au vice-rectorat à la Recherche en 1981, puis comme recteur de 1986 à 1996, que la recherche à l’UQAM prend un second souffle. En 1988, les fonds en recherche avaient plus que triplé en cinq ans. La part de financement contractuel n’aura cessé d’augmenter sous son mandat, passant de 8,5% en 1988 à 24,5% en 1992. 

Plusieurs thématiques de recherche telles que l’environnement et les sciences de la gestion sont centrales pour l’université. Celle-ci devient cheffe de file dans ces domaines grâce à la création de plusieurs chaires, dont la Chaire de coopération Guy-Bernier en 1987 avec la collaboration du Mouvement Desjardins et la Chaire de recherche en environnement Hydro-Québec en 1989.

Les chaires UNESCO

Sous les grâces de M. Corbo et du directeur général de l’UNESCO, Federico Mayor, la professeure à l’UQAM et précédemment secrétaire générale adjointe aux Nations Unies à New York Thérèse Paquet-Sévigny cofonde le réseau international des chaires UNESCO en communication (ORBICOM) en mars 1994. Aujourd’hui âgée de 86 ans, la cofondatrice du réseau se confie sur cette importante réalisation. « Il y avait beaucoup d’intérêt, les gens étaient un peu surpris dans divers pays parce qu’au mois de juin on était déjà 9 chaires et aujourd’hui […] cela dépasse 35 chaires dans tous les continents », témoigne-t-elle. Il y a actuellement six chaires UNESCO à l’UQAM, dont deux en partenariat avec d’autres universités.

Mme Paquet-Sévigny rappelle que « c’était l’explosion dans le domaine des communications » dans les années 1990. Tous les pays n’étaient pas au même plan technologique, ce qui constituait une charge de travail substantielle. « Le défi était de mettre en contact […] des gens de différentes cultures, de différentes langues, et cetera », se souvient-elle. Elle souligne aussi l’appui inestimable de l’UQAM dans la création d’ORBICOM.

Problèmes d’indépendance

La collaboration de plus en plus étroite entre l’université, dont certaines chaires, et le milieu des affaires soulève parfois des questions éthiques. Des donateurs et des donatrices peuvent exiger un droit de regard sur les orientations de la recherche et des résultats, ou encore que la chaire porte leur nom.

L’auteur d’Université inc. et doctorant en pensée politique de l’Université d’Ottawa, Éric Martin, dénonce la « marchandisation du savoir ». « [Il y a eu] un détournement de la mission des universités qui vont les détacher du rôle qu’elles auraient dû avoir d’être au service de l’esprit, de la raison, de la culture et de la science et plutôt les amener à la production de savoirs dits utilitaires », constate-t-il. Cette réorientation est aussi politique selon M. Martin : « On a réduit systématiquement le financement public et on a encouragé les universités à devenir dépendantes de nouvelles sources de financement corporatif. »

Des mécanismes de gouvernance sont malgré tout présents pour assurer le respect de la liberté académique des chercheurs et des chercheuses. « Il existe donc au sein des chaires de recherche-innovation un comité de direction et un comité scientifique sur lesquels la participation des partenaires externes est égale ou moindre à celle des représentants de l’UQAM », précise le vice-recteur à la Recherche, à la création et à la diffusion de l’UQAM. 

Pour le titulaire de la Chaire recherche-innovation Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques depuis 2016, Frédérick Gagnon, même si l’occasion d’obtenir un financement d’un ou une partenaire souhaitant s’ingérer dans la recherche s’est présentée dans le passé, l’indépendance de la chaire est non négociable. « Mon principe premier est la liberté académique, c’est toujours clair quand j’obtiens un financement », indique-t-il. Ainsi, grâce à des dons purement philanthropiques, des bourses sont entre autres créées pour les étudiants et les étudiantes. Le doctorant en pensée politique Éric Martin soutient que, dans le contexte où la survie d’une chaire dépend pour beaucoup de la capacité du ou de la titulaire à trouver assez de financement, l’ingérence est parfois incontournable pour des chaires ayant un champ d’études plus niché.

Cet article est paru dans l’édition papier du 1er décembre 2020.

Mention photo : J.-A. Martin (Archive UQAM), Fonds d’archives du service des communications

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