La clinique juridique pour les survivant(e)s d’actes à caractère sexuel se tourne vers la prévention

La clinique pour les survivant(e)s d’actes à caractère sexuel, une branche spécialisée de la clinique juridique de l’UQAM, a pour but de répondre aux questions des victimes quant à leurs droits et de les diriger vers les ressources appropriées. Cependant, en raison de la pandémie, l’équipe a décidé de se tourner aussi vers des outils de prévention.

Créée en 2017 lors du mouvement #metoo, la clinique offre de l’information juridique, gratuite et confidentielle, aux victimes d’actes à caractère sexuel, qu’elles fréquentent l’université ou non.

Toute personne désirant de l’information juridique peut contacter la clinique par courriel ou via sa page Facebook, et ce, malgré le contexte sanitaire actuel. Suite à ce premier contact, les modalités de l’échange sont établies (Zoom, courriel, téléphone ou par Facebook). Il est possible de poser une question générale ou de rencontrer individuellement un(e) clinicien(ne).

Compte tenu de la sensibilité des sujets abordés, c’est la victime qui établit ses limites quant à la quantité de faits qu’elle désire partager.

Plusieurs projets de prévention en cours

La clinique se tourne désormais vers des projets de sensibilisation servant à éduquer la population sur ses droits, ainsi qu’à vulgariser l’information légale pour la rendre plus accessible. « On va essayer de juste livrer de l’information, sans même que les gens aient à le demander », explique Daphnée Warnet-Atlas, vice-directrice de la clinique.

« La clé de la prévention, c’est l’éducation. De là sont nés plusieurs de nos projets », rapporte la directrice de la clinique, Ophélie Boisvert. Depuis quelques mois, l’équipe travaille donc sur diverses initiatives, dont la création d’une baladodiffusion, la vulgarisation d’information légale et l’élaboration de capsules éducatives pour les jeunes du secondaire.

Créées initialement dans le but de faire des ateliers dans les écoles, les capsules éducatives visent essentiellement à éduquer les jeunes, notamment les 12-13 ans, sur leurs droits et la limite de ceux-ci. « C’est généralement assez vieux », spécifie Ophélie Boisvert, en parlant de la loi au sens général. « Ça ne s’applique pas très bien aux actes à caractère sexuel qui ont un lien avec Internet. »

Les capsules adresseront des problématiques telles que la sextorsion, qui se définit comme, entre autres, la possession de photo ou vidéo intime d’une personne que l’on menace de diffuser, dans le but d’avoir une emprise sur celle-ci. Selon la directrice de la clinique, il est important de définir ces concepts. « Il y a beaucoup de jeunes qui pensent que, puisqu’ils n’ont pas 18 ans, ils ne sont pas responsables de quoi que ce soit », poursuit-elle, en mentionnant qu’en réalité, on devient criminellement responsable à partir de 13 ans. 

La création d’un balado, second projet de l’équipe, va donner la parole à des professionnel(le)s sur des sujets reliés aux actes à caractère sexuel. Par exemple, la vice-directrice, Daphnée Warnet-Atlas, souhaite élaborer la notion d’intersectionnalité, un concept qui désigne la situation de personnes subissant simultanément plusieurs formes de stratification, domination ou de discrimination dans une société. Ces situations pourraient avoir un impact sur les victimes d’actes à caractère sexuel, selon elle. « On pense, par exemple, aux personnes avec des handicaps », souligne-t-elle.

Un premier défi de taille

Les communications à distance sont plus complexes pour les personnes ayant vécu de la violence ou des actes à caractère sexuel, selon Daphnée Warnet-Atlas. « Le contact humain est vraiment important » indique-t-elle, précisant que beaucoup de personnes ont besoin d’un soutien psychologique, plus qu’un service juridique. L’accès à des locaux à l’UQAM permettait aux clinicien(ne)s de créer un environnement calme et confortable, pour mettre à l’aise la victime, ce qui est plus difficile avec les modalités à distance, selon elle.

L’aspect de confort n’est pas le seul affecté par le contexte inhabituel de la crise sanitaire. Selon la directrice de la clinique, Ophélie Boisvert, l’accessibilité aux services est d’autant plus complexe pour les personnes qui, ayant vécues de la violence, doivent demeurer injoignables et intraçables pour des raisons de sécurité. De plus, la nécessité d’une confidentialité absolue rend les rencontres dans des lieux publics inconcevables. « La pandémie, c’est une des premières fois qu’on a des défis qu’on n’est pas capable de surmonter. Donc, on les contourne, d’une certaine manière », exprime-t-elle.

 Aller au-delà du système légal

L’implication sociale de la clinique provient, entre autres, des conclusions tirées de la deuxième vague de dénonciations survenue cet été au Québec. Selon Ophélie Boisvert, le discours a beaucoup tourné autour des failles du système légal. « On a […] souligné la lourdeur [et] le fait que c’était, et c’est vrai d’ailleurs, traumatisant de passer au travers le système légal, quand on parle de violences sexuelles, peu importe le type », explique-t-elle.

Conscient(e)s de ces failles, les membres de la clinique se penchent sur cet enjeu. « Pour le moment, la confiance n’est pas établie. En fait, elle est loin d’être rétablie, entre la victime survivante et le système légal », ajoute-t-elle.

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