Quelques jours après la sortie de son premier album, Dreamweaver, la jeune chanteuse d’origine Oji-Crie et Mi’kmaq Anachnid faisait un retour aux sources lors d’une représentation à l’Escalier dans le cadre d’une soirée ART • Culture autochtone, organisée par le Cercle des Premières Nations de l’UQAM.
Cela fait déjà dix ans que le Cercle des Premières Nations de l’UQAM organise tous les premiers jeudi du mois les soirées ART • Culture autochtone dans l’ambiance bigarrée du resto-bar l’Escalier, rue Sainte-Catherine. Ces soirées visent à présenter des artistes autochtones et leurs collaborateurs et collaboratrices.
L’Escalier est emblématique de la scène musicale multiculturelle montréalaise. Le jeudi 5 mars dernier, il est bondé. Sur la petite scène, un DJ achève d’installer son matériel. Gustavo Zamora Jiménez, coordonnateur de l’événement et responsable du Cercle des Premières Nations de l’UQAM, explique qu’il a choisi les jeudis soirs afin de s’ajuster aux étudiants et aux étudiantes de l’UQAM qui ont souvent congé les vendredis. Pourtant, parmi les membres du public interrogés, peu sont présents spécifiquement pour la soirée. « Il est difficile de compétitionner avec la scène culturelle montréalaise, où il se passe quelque chose tous les soirs, admet le coordonnateur. Chaque soirée est différente. »
Utiliser la ville pour créer
Il y a à peine deux ans, Anachnid, une jeune artiste multidisciplinaire, était animatrice pour ces soirées culturelles. Un soir, elle a remplacé au pied levé un invité absent et a charmé la foule avec son tambour et sa voix. Deux ans plus tard, elle est lauréate du Prix de l’auteur-compositeur autochtone par la Fondation SOCAN et elle vient de sortir un album bien accueilli par la critique. Ce soir-là à l’Escalier, elle rend hommage à ces soirées qui lui ont permis de se faire connaître. « Je crois que j’ai appris à être une artiste étape par étape », avoue-t-elle avec un grand sourire, assise à une table un peu avant sa prestation.
« Je m’identifie comme une autochtone urbaine. Ce n’est pas tout le monde qui est capable de s’adapter à la ville. Ça peut jouer avec les esprits plus sensibles. Moi j’ai réussi à m’adapter à ça. Ça fait 5 ans que je suis arrivée à Montréal », raconte celle qui a étudié en arts plastiques au cégep du Vieux Montréal.
Mieux diffuser l’art autochtone
« Il y a eu une évolution dans le milieu culturel autochtone, notamment parce que plusieurs artistes sont devenus connus », explique M. Zamora Jiménez. « En l’absence d’un lieu de diffusion culturel autochtone, qui est une revendication depuis bien avant 2010, c’est ce qu’on a choisi de faire », ajoute-t-il, rappelant que ces soirées n’ont lieu qu’une fois par mois.
En effet, selon lui, les artistes autochtones aimeraient avoir un lieu physique dédié à leur art à Montréal, comme une maison de la culture autochtone. En attendant, les soirées ART • Culture autochtone ont permis à plusieurs artistes, comme Anachnid, de faire leurs premiers pas sur la scène culturelle montréalaise.
Tisser une toile sonore
La musique d’Anachnid, aux tons résolument actuels, s’aventure du côté du soul, du trad, de l’indie et du house. « J’ai grandi dans la ville et dans les bois et c’est ce que je reflète à travers mon album : ma ville et mes bois », explique-t-elle.
La spiritualité et la connexion avec les ancêtres tiennent aussi un rôle primordial pour elle. Son pseudonyme Anachnid reflète d’ailleurs son animal totem : l’araignée. Elle l’a reçu des aîné(e)s quand elle était toute petite. « L’araignée est un esprit féminin, qui représente la grand-mère, la sagesse, la protection de l’innocence quand tu n’es plus innocente (…) C’est comme les capteurs de rêve. Leur but est de protéger les enfants des cauchemars », explique-t-elle.
Son album, qui allie sa voix profonde à des rythmes planants et à des instruments traditionnels, explore des thèmes à la fois durs, comme l’histoire des pensionnats et d’autres, plus légers. « Le message que je souhaite passer, c’est qu’on doit être reconnus et écoutés (…) parce que sans être compris par les autres il n’y a pas de réconciliation », exprime la jeune artiste en expliquant son désir d’utiliser les sons et les émotions pour arriver à cette fin.
Les soirées ART • Culture autochtone se déroulent chaque premier jeudi du mois au resto-bar l’Escalier.
Photo Olivier Smith
Laisser un commentaire