Un avenir pour les ruelles vertes ?

Montréal est l’une des seules villes du Canada à posséder des ruelles, et grâce à l’initiative de citoyens engagés, 10 % des 500 kilomètres de ruelles dans la ville sont désormais considérés comme verts. Ces ruelles se démarquent par la présence de biodiversité, d’art citoyen et de mesures sécuritaires pour les enfants, et se veulent un moyen de contrer l’exode des familles vers les banlieues.

« Les ruelles vertes sont un espace public qui permet de nombreux bénéfices », pense le directeur adjoint du regroupement des écoquartiers, Simon Octeau. On peut y retrouver des caractéristiques semblables à la banlieue, car on y privilégie la sécurité de l’enfant, l’agriculture urbaine et la créativité. « Certaines sections de ruelles sont fermées à la circulation. On y plante des arbres ou différents végétaux et on y retrouve souvent des bancs, des boites à livres, des murales et de l’art citoyen », explique-t-il.

Pour le professeur d’urbanisme à l’Université de Montréal et directeur de l’Observatoire de la mobilité durable Gérard Beaudet, il n’y a pas de problème d’exode des cerveaux à Montréal actuellement. « Les gens veulent l’équivalent d’un espace de banlieue en ville. Les terrains sont privés et ce sont de plus en plus des terrains de style bungalow que l’on retrouve à Montréal », a-t-il mentionné lors de la conférence Montréal vue par ses ruelles, organisée par le Coeur des sciences de l’UQAM dans le cadre du Forum d’histoire et patrimoine de Montréal.

Selon Simon Octeau, les ruelles vertes, contrairement aux quartiers résidentiels de la banlieue, permettent aux voisins de se rencontrer. Il voit la ruelle comme une extension de la cour qui peut briser l’isolement. « Les gens ne le font pas dans un esprit de privatisation, mais plutôt pour avoir un espace commun autogéré par la communauté », soutient-il.

D’hier à aujourd’hui

Les ruelles ont été conçues au moment où le modèle urbanistique dominant était britannique. À l’époque, elles servaient à faciliter l’accès à arrière des bâtiments, notamment pour les calèches, les livreurs, les vendeurs et la collecte d’ordure. Comme aujourd’hui, les enfants aimaient y jouer et s’y rencontrer.

« La ruelle a ses amoureux, mais elle a autant ses détracteurs », explique le chef de la section des archives de la Ville de Montréal, Mario Robert. Pour certains, la ruelle a mauvaise réputation, car elle est sale et dangereuse. Une position ne rejoignant pas Simon Octeau, qui croit que les ruelles font vraiment partie de nos trésors cachés.

Réelle priorité ?

Selon Gérard Beaudet, Montréal n’est pas dans une situation d’urgence avec ses ruelles et peut prendre le temps d’élaborer un plan de développement. « L’avenir doit être multiforme. Il faut laisser les choses se faire graduellement, laisser le tout moduler selon les différents milieux », émet-il.

Simon Octeau est d’un tout autre avis. Le représentant du regroupement des écoquartiers pense qu’une ruelle conventionnelle est un espace sous-utilisé qui contribue aux problématiques urbaines, comme les îlots de chaleurs, le manque de biodiversité en ville, la mauvaise gestion de l’eau et la criminalité. Or, les ruelles vertes travaillent sur les trois axes du développement durable. « En matière d’environnement, planter des arbres réduit les îlots de chaleurs et améliore la qualité de l’air. Sur le plan social, une communauté se construit et des liens sociaux se créent, explique M. Octeau. Puis, économiquement, une ruelle verte peut devenir un argument de vente quand vient le temps de vendre sa maison ».

Bien que Gérard Beaudet reconnaît les avantages des ruelles vertes, le professeur pense que la ruelle montréalaise n’est qu’une des composantes qui fondent l’attrait et l’attractivité de la ville. « On ne peut pas tout faire par la ruelle. Celle-ci a une capacité de contribution à une amélioration de la situation, mais il faut aussi que les propriétaires apportent leur contribution », exprime-t-il.

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photos: LUDOVIC THÉBERGE MONTRÉAL CAMPUS

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