Une fragilité financière qui coûte cher à l’ESG

La précarité financière de l’UQAM a conduit le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur à lui refuser un projet d’expansion de son École des sciences de la gestion (ESG), au profit d’un nouveau pavillon des Hautes études commerciales (HEC) de l’Université de Montréal au centre-ville, selon un document obtenu par le Montréal Campus en vertu de la Loi sur l’accès à l’information.

Le ministère y évoque quatre raisons. D’abord, le Secrétariat du Conseil du trésor visait à «privilégier des projets qui ne demandaient pas une contribution additionnelle au prochain plan québécois des infrastructures.» On y souligne également une «faible concordance entre les objectifs du projet […] et les objectifs du FIS [Fonds d’investissement stratégique]». Par ailleurs, on déplore la «capacité financière très défavorable» de l’UQAM, «qui se retrouve en plan de redressement» à l’heure actuelle. Enfin, on calcule qu’un «apport philanthropique de 16M$» serait nécessaire pour aller de l’avant avec le projet.

En entrevue avec le Montréal Campus, la présidente du Conseil d’administration de l’UQAM, Lise Bissonnette, a affirmé que «ce n’était pas une réponse suffisante». L’ancienne directrice du Devoir soutient que «le plan de redressement [de l’Université] a été suivi à la lettre» et que d’autres universités québécoises sont elles aussi en déficit. Pour ce qui est du manque à gagner de 16 millions de dollars, ce financement devrait être considéré comme un «processus parallèle» à l’approbation du projet, a-t-elle déclaré.

Rappelons que le 17 octobre dernier, la ministre responsable de l’Enseignement supérieur, Hélène David, annonçait l’injection de 94 millions de dollars pour les HEC Montréal. Cet investissement leur permettait ainsi d’entreprendre des démarches pour venir s’installer tout près de l’École des sciences de la gestion (ESG) de l’UQAM.

Cette annonce avait soulevé l’ire de la direction de l’UQAM, ayant elle-même soumis un projet visant à étendre son pavillon J.-A.-DeSève dans un édifice situé en face de ce dernier,  sis au 1250 rue Sanguinet. L’UQAM souhaitait aménager dans le bâtiment, qui abritait jusqu’à juillet 2015 le CLSC des Faubourgs, de nouveaux locaux pour l’ESG. Le projet avait été décliné par le ministère qui n’avait fourni aucune forme d’explication à la maison d’enseignement du Quartier latin.

Mme Bissonnette et le recteur de l’UQAM, Robert Proulx, ont été mis au fait de ces motifs par le document obtenu par le Montréal Campus. Étant donné que le document n’a toujours pas été présenté au Conseil d’administration officiellement, celui-ci n’a pas pris position pour l’instant.

Au moment d’écrire ces lignes, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur n’avait pas été en mesure de répondre à nos questions.

Demandes claires, réponses nébuleuses

Parallèlement, le Conseil d’administration de l’UQAM avait aussi déposé une demande d’accès à l’information, réclamant les raisons principales qui ont forcé le ministère à accepter le projet soumis par les HEC. «La réponse qu’on a eue du ministère, c’était cinq lettres, mais aucune ne donnait les raisons pour lesquelles le gouvernement du Québec avait autorisé le financement […] l’emplacement, la délocalisation, soutient Mme Bissonnette. C’était des lettres de transmission [montrant] le cheminement du projet de 2012 à nos jours.»

Le gouvernement semblait aussi sous-entendre que la réponse aux questions de l’UQAM viendrait en communiquant avec les autres acteurs impliqués dans le dossier. «La conclusion qu’on en tire, du fait qu’on nous renvoie aux HEC, au [ministère des] Finances, au [conseil du] Trésor, c’est que ce dossier-là avait été, pour le ministère de l’Enseignement supérieur, une chose entendue. Ce n’est pas eux qui avaient fait l’analyse» souligne Lise Bissonnette. Elle remet donc en doute l’implication même du ministère de l’Éducation, qui est au cœur de ce projet.

Contacté par courriel, le doyen de l’ESG, Stéphane Pallage, s’est contenté de répondre qu’il y avait actuellement des discussions avec le gouvernement provincial.

Le projet initial déposé en 2012 par les HEC nécessitait un financement de 18 millions du Plan québécois sur les infrastructures. Le CA de l’UQAM se questionne alors sur ce qui a entraîné une hausse de 76 millions de dollars — pour un total de 94 millions.

On trouve qu’on a été traité de façon inéquitable
Lise Bissonnette, présidente du CA de l’UQAM

Projet potentiel dans le Quartier des spectacles

Dans le même document obtenu par le Montréal Campus, on apprend que le projet d’un nouveau pavillon de l’UQAM dans le Quartier des spectacles a été approuvé par le gouvernement provincial. Les coûts seraient évalués à 70 millions de dollars.

À ce sujet, la porte-parole de l’UQAM, Jenny Desrochers, confirme que le projet prendrait forme devant l’édicule du métro Saint-Laurent, comme l’avait rapporté le journal Métro en mai 2015. Elle soutient que le gouvernement fédéral n’a pas encore annoncé publiquement les projets qu’il allait financer à la suite du dépôt des projets priorisés par le gouvernement provincial. Le financement du potentiel pavillon des Arts n’est donc pas encore confirmé.

Photo: CATHERINE LEGAULT MONTRÉAL CAMPUS

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