De plus en plus de ménages québécois cherchent à intégrer une coopérative d’habitation. Si certains n’y voient qu’une opportunité d’aubaine, pour d’autres, l’implication dans leur milieu est le véritable moteur d’un mode de vie participatif.
La Coopérative d’habitation Adrienne dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal fêtera sa 15e année d’existence à l’automne. Loin de préparer de grandes cérémonies festives, l’organisme est à l’heure de faire des choix décisifs pour le bien commun. Montréal Campus est allé rencontrer ces «locataires-propriétaires»
Récemment, une assemblée générale extraordinaire réunissait les membres afin d’expliquer l’ampleur des travaux à effectuer sur l’un des cinq bâtiments, et diverses options ont été débattues par les membres présents. «La structure de décision d’une coopérative est démocratique, un conseil d’administration est élu par l’assemblée des membres afin de gérer les affaires courantes et distribuer les tâches aux divers comités composés par les autres membres», explique Josiane Philion, responsable du comité de sélection.
Parmi les 28 locataires actuels, seulement trois sont des membres fondateurs. Le projet a été mis sur pied par le groupe de recherche technique (GRT) Bâtir son quartier, avec l’aide financière d’AccèsLogis, un organisme qui encourage le regroupement des ressources publiques, communautaires et privées. «Lors de l’acquisition des édifices, les locataires qui occupaient les logements se sont fait offrir le choix d’intégrer la COOP ou déménager», témoigne l’une des fondatrices, Pauline Lespérance.
Avec des familles nucléaires, monoparentales, des personnes vivant seules, en couple ou en colocation, issues de divers milieux culturels et professionnels, «le visage de la coopérative d’habitation Adrienne, c’est la diversité», résume Wagna Célidon. Arrivée en 2011, au moment où se tenait l’assemblée générale annuelle (AGA), Wagna Célidon se décrit comme une femme d’action. «Je me suis montrée intéressée dès le départ à l’ensemble du projet et aux défis du moment. Le trésorier d’alors quittait la COOP et il m’a proposée de lui succéder, indique-t-elle. C’est ainsi que je me suis retrouvée au conseil d’administration dès mon entrée».
En signant le contrat de membre, chaque locataire bénéficie d’un rabais sur le coût du loyer inscrit au bail. En contrepartie, il doit s’impliquer activement et s’occuper lui-même de son logement. «Il n’y a pas de propriétaire à qui demander de l’aide, il faut faire preuve d’initiative et de débrouillardise», insiste l’actuel trésorier, Simon Litalien. Même si l’expérience et certaines compétences sont souhaitables, les membres peuvent tous apprendre et développer leurs compétences. «L’éducation, la formation et l’information, ça fait partie des grands principes du mouvement coopératif québécois», énonce Mathilde Fraga, employée par la COOP depuis 2012, pour soutenir la gestion.
Diverses raisons ont amené le conseil d’administration à aller chercher de l’aide professionnelle extérieure. Le travail de comptabilité exige une assiduité exemplaire et beaucoup de temps. «Les années où je me suis impliquée en tant que trésorière, j’ai senti que j’étais utile car la COOP venait de passer à travers des années de difficultés financières, observe Wagna Célidon. J’ai travaillé fort et même si c’est éreintant, je l’ai fait pour le bien commun», ajoute celle qui aujourd’hui fait partie du comité d’entretien. L’aide à la gestion qu’apporte Mathilde Fraga est aussi d’un grand secours lorsque vient le temps de se présenter à la Régie du logement. «Comme tout le monde se connaît, ce n’est pas évident en tant que représentant du C.A. d’aller plaider un dossier de non-paiement de loyer, par exemple, contre un autre membre de la COOP», exemplifie Josiane Philion, qui a occupé le poste de présidente durant trois ans.
Avant d’arriver dans la COOP en 2008, Josiane Philion était étudiante à l’UQAM. Déjà impliquée dans une association étudiante, elle voulait poursuivre son implication au niveau de l’habitation. «L’idée d’avoir accès à des logements de meilleure qualité à un prix raisonnable était une source de motivation additionnelle pour nous», évoque la jeune femme de 30 ans.
Le processus de sélection des membres peut ressembler à celui de l’embauche pour un emploi. À la suite de l’affichage d’une annonce, le comité de sélection reçoit les lettres de motivation des gens intéressés. Le comité procède alors au tri des candidatures pour contacter les gens correspondant au profil recherché. Ceux-ci sont d’abord invités à visiter le logement offert et si l’intérêt est toujours présent, les candidats sont reçus en entrevue. «Selon notre politique de sélection, pour chacun des logements à louer, il faut rencontrer un minimum de trois candidats, rapporte Josiane Philion. Après les entrevues, les candidats sont évalués en fonction d’une série de critères tels que leurs compétences, leurs besoins, leurs antécédents, et le comité de sélection fait son choix qu’il propose au C.A.», détaille-t-elle.
Le mode de vie coopératif est certes un style de vie qui ne conviendrait pas à tous les individus, mais il est important de savoir qu’il s’adresse à tout le monde. «Il y a encore beaucoup de préjugés sur les coopératives. Beaucoup de gens prennent les COOP pour des organismes communautaires de bienfaisance, alors qu’il s’agit plutôt d’une entreprise sociale qui doit dégager des profits pour assurer sa pérennité», fait valoir Simon Litalien.
Dans le contexte actuel, Wagna Célidon considère que les coopératives sont des organismes précieux, qu’il faut absolument conserver. «Présentement, avec le coût des loyers du marché qui augmentent sans cesse et avec l’individualisme ambiant, je trouve que d’appartenir à une COOP c’est très important», témoigne-t-elle.
Aucune décision n’a encore été prise en ce qui concerne le bâtiment à rénover, puisque les dossiers de demandes de financement sont toujours à l’étude par les bailleurs de fonds. La plupart des résidents de l’immeuble en question disent garder espoir de vivre encore longtemps à l’angle des rues Sainte-Catherine et Létourneux.
Photo: Benoit Lortie
Avant d’arriver dans la COOP en 2008, Josiane Philion était étudiante à l’UQAM. Déjà impliquée dans une association étudiante, elle voulait poursuivre son implication au niveau de l’habitation.
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