La grève du Syndicat des employé-e-s étudiant-e-s de l’UQAM (SETUE) cause le ralentissement et même la fermeture de certains laboratoires à l’université. Sans l’aide de leurs assistants de recherche, des professeurs voient leurs travaux ralentis et parfois, carrément bloqués.
C’est le cas de Daniel Chartier, professeur en études littéraires à l’UQAM, qui dirige le Laboratoire international d’étude multidisciplinaire comparée des représentations du Nord. Environ 70% des travaux de son laboratoire sont suspendus en raison de la grève du SETUE. «L’absence d’assistants pour l’intégration des œuvres [à la base de données] et pour l’accueil des visiteurs étrangers et étudiants a forcé la fermeture presque complète du Laboratoire depuis décembre, a indiqué M. Chartier. Cela pose des problèmes pratiques au sens où le travail des assistants ne se fait pas. Ça bloque la recherche.»
Le Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises (CRILCQ), bien qu’il demeure ouvert, constate aussi des problèmes créés par l’absence des assistants. «L’impact de ce conflit se fait sentir de manière de plus en plus insidieuse», soulève la directrice du CRILCQ, Chantal Savoie. Elle et son équipe s’inquiètent du «ralentissement généralisé» causé par la grève et qui génère «de l’incertitude». Selon la directrice, ce ralentissement des activités va bien au-delà «d’une bibliographie produite en retard», c’est la réalisation des projets menés par des équipes au sein du CRILCQ qui sont mis en péril. «Dans le contexte extrêmement concurrentiel dans lequel nous évoluons, à titre de chercheurs subventionnés, [cela] peut avoir des conséquences néfastes», a déclaré Mme Savoie.
Que des perdants
Non seulement l’assistanat est une nécessité pour certains chercheurs, mais c’est aussi un atout majeur pour les étudiants qui le pratiquent. «C’est un outil de formation très puissant», affirme Daniel Chartier. Selon lui, les étudiants qui assistent leur professeur en laboratoire sont souvent ceux qui «obtiennent des bourses et réussissent» par la suite, car ils ont été en contact avec de la «vraie recherche» dans leurs études.
Le problème est aussi monétaire. Bien sûr, les employés étudiants perdent leur revenu pendant qu’ils sont en grève, mais les subventions ont une durée limitée et pourraient être perdues si le conflit s’éternise. Dans le cas de Daniel Chartier, l’UQAM est parvenue à prolonger d’un an certaines subventions, mais pas toutes. «On a donc un an de plus pour dépenser [cet argent]. Mais 70% des dépenses dans un laboratoire comme ici, c’est de l’assistanat. Qu’est-ce que je peux dépenser? Acheter d’autres ordinateurs, d’autres livres?», s’interroge le professeur.
Pour sa part, l’administration convient que cette situation est «malheureuse». «Les effets de la grève déclenchée par le SETUE sont inégaux ou variables, car les travaux de recherche ne sont pas tous réalisés avec l’appui des employés étudiants», explique la porte-parole de l’UQAM, Jennifer Desrochers. Elle a indiqué que la direction «souhaite parvenir à un règlement négocié dans les meilleurs délais» et demeure «disponible» à la poursuite des discussions avec le syndicat étudiant. Les négociations sont présentement au point mort .
Selon le syndicat, cependant, c’est l’administration qui est à blâmer pour l’état de la situation. «Nous voulons discuter de plusieurs éléments, notamment notre plancher d’heures avec l’administration et la seule réponse que nous avons est un refus unilatéral», a critiqué Chloé Fortin-Côté, porte-parole du SETUE. Elle a rappelé que le Syndicat des professeures et des professeurs (SPUQ) et le Syndicat des chargé-es de cours (SCCUQ) se retrouvent «dans la même situation» que le SETUE actuellement. «Nos membres ont hâte de retourner au travail, personne ne veut que la grève perdure, mais c’est l’administration qui fait perdurer le conflit», a-t-elle conclu.
Daniel Chartier, sans accuser quiconque, est las de la situation. «Il y a des recherches qui ne se font pas, il y a des travaux qui ne se font pas, il y a des projets qu’on a obtenus et qu’on ne [pourra] pas réaliser, déplore-t-il. On a besoin des assistants, c’est clair.» Selon lui, avec un peu de bonne volonté des deux parties, ce conflit qui dure depuis trois mois pourrait se régler «en une heure».
Sur la photo : Daniel Chartier, professeur en études littéraires à l’UQAM. Crédit : Alexis Boulianne
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