L’UQAM butine le savoir

Si le nombre de ruches à Montréal a augmenté du trentuple depuis 2011 pour dépasser les 360 en l’espace de 4 ans, les apiculteurs du Rucher Collectif de l’UQAM ont choisi de ne pas multiplier leurs installations au profit d’une recherche scientifique plus approfondie.

Depuis 2011, l’UQAM est passée de deux à cinq ruches, et n’en compte maintenant que quatre, suite à des complications qui ont eu lieu l’hiver dernier. Or, cette ruche ne sera pas remplacée, et les raisons motivant cette décision sont nombreuses, selon Dorothée Bezançon, apicultrice bénévole au Rucher. «Pour travailler au Rucher Collectif, ça prend une formation de base, comme celle qui est donnée par Miel Montréal, avant de s’impliquer, souligne-t-elle. Il faut aussi un minimum de cinq heures d’implication bénévole par personne, par semaine. C’est beaucoup de travail et d’organisation.» Si le nombre de ruches augmentait, il faudrait plus que les huit apiculteurs bénévoles du collectif autogéré pour prendre soin des abeilles. Le nombre de bénévoles impliqués varie chaque année, en fonction du nombre de personnes répondant à l’appel du collectif, précise le professeur associé à l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM et apiculteur bénévole au Rucher Collectif , Éric Duchemin.

Luis Gomez, coordonnateur du Collectif de recherche en aménagement paysager et agriculture urbaine durable (CRAPAUD), qui regroupe différents projets d’agriculture urbaine dont le Rucher Collectif, ne croit pas qu’il serait possible d’offrir un poste rémunéré pour assurer la gestion des projets du Collectif. «Avec les coupes à l’UQAM, ça ne vaudrait pas la peine de faire ces demandes-là. On ne voudrait pas perdre de temps avec ces procédures qui sont assez complexes et longues», souligne-t-il.  Ce genre de poste est pourtant offert ailleurs à Montréal. Le rucher de l’Université Concordia emploie des apiculteurs à temps plein pour assurer la formation d’une relève apicultrice.

L’apicultrice Dorothée Bezançon ajoute que le Rucher Collectif ne souhaite pas faire croître ses installations à l’UQAM puisque «certaines personnes du milieu ne sont pas nécessairement à l’aise avec la multiplication de ruches à Montréal». Cet avis est partagé par les gens impliqués au Rucher de l’Université Concordia, situé sur le campus Loyola, qui ne pensent pas installer leurs colonies d’abeilles sur le campus du centre-ville. «Il y a déjà trop de ruches», déplore Jackie Martin, coordonnatrice de la City Farm School. On trouve des ruchers notamment à l’UQAM, au Complexe Desjardins, au centre d’écologie urbaine, au Santropol, au Eva B et au Palais des Congrès. Éric Duchemin croit toutefois qu’il faudrait faire plus de recherche avant d’affirmer qu’il y a une surabondance de ruches. «On a un cas vraiment concentré au centre-ville de Montréal, il faudrait évaluer le nombre de ruches par rapport au nombre d’espaces verts», explique-t-il.

Se concentrer sur la recherche

«L’UQAM s’est retrouvée au centre de la recherche sur l’apiculture à Montréal, c’est nous qui faisons la cartographie des ruchers de Montréal. Chaque année, on essaie de répertorier les nouvelles ruches et de voir quels ruchers ont diminué» explique Éric Duchemin, qui est aussi chercheur au AU/Lab, le Laboratoire de recherche, d’innovation et d’intervention en agriculture urbaine aux services de la collectivité. Le AU/Lab fait des analyses de pollen dans le miel qui permettent aux chercheurs de voir où vont butiner les abeilles.

Comme la flore est différente partout, ils arrivent à analyser où les abeilles ont passées, selon Éric Duchemin. Le Rucher Collectif va aussi se pencher plus sérieusement sur la question de la densité des ruches au centre-ville. «On veut vraiment voir quel est le nombre maximal de ruches que l’on peut avoir. Comment on peut mieux répartir les ruches à travers la ville? De quelle nourriture les abeilles ont besoin et comment on pourrait inciter les gens à cultiver des plantes mellifères, c’est-à-dire bonnes pour les abeilles ?» indique-t-il.  

Vers un avenir «intelligent» 

Éric Duchemin, impliqué dans le Rucher Collectif depuis le début du projet, a plusieurs idées pour le futur. «Ce que j’aimerais c’est qu’on réussisse à avoir des ruches intelligentes, pesées de manière régulière; qu’on enregistre le son, qu’on puisse faire une surveillance des différents paramètres dans la ruche», explique-t-il. Il aimerait aussi que le tout soit connecté à un écran, où les visiteurs pourraient voir en temps réel ces paramètres, comme le nombre d’abeilles dans les ruches, qui varie entre 10 000 et 80 000 pendant la saison. 

Si les ruches uqamiennes demeureront au nombre de quatre, les projets du CRAPAUD eux, se multiplient : compostage, jardins collectifs, herboristerie, interventions mellifères, école d’été sur l’agriculture urbaine et autres ont lieu, à longueur d’année, entre le Complexe des Sciences Pierre-Dansereau et le pavillon de Design de l’UQAM.

Photo : Éric Duchemin

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