Allez, du balai!

Le Quidditch pour moldus tente depuis quelques années de prendre son envol. Méconnue, sous-estimée et souvent ridiculisée, l’activité est retenue au sol par les préjugés.

Nul besoin de recevoir une lettre de Poudlard ou de savoir faire voler un balai pour être admis dans une équipe de Quidditch de niveau collégial ou universitaire. Pour pratiquer ce sport issu tout droit du monde fantastique d’Harry Potter, les adeptes affirment d’abord devoir être prêt à dépenser beaucoup d’énergie sur le terrain et à faire face à tout un lot de railleries. Malgré l’incompréhension qu’ils suscitent parfois, les joueurs de Quidditch au sol souhaitent mieux faire connaître leur sport afin d’en assurer la pérennité.

Le Quidditch pour moldus, ceux qui ne possèdent pas de don de sorcellerie, en fait sourciller plus d’un. La présidente de la Ligue collégiale de Quidditch (LCQ),Emmanuelle Rhéault, souligne que peu de gens savent comment le sport se joue dans un monde de non-sorciers. «Tout le monde sait de quoi je parle quand je mentionne le Quidditch, mais la version moldue soulève bien des interrogations», témoigne-t-elle. Dans l’œuvre de J. K. Rowling, ce sport se joue à 15 mètres du sol sur des balais et met en jeu quatre balles volantes dont le vif d’or, une balle minuscule munie d’ailes qu’il faut attraper pour mettre fin à la partie.

Entraîneuse au Club de Quidditch de l’Université de Montréal, Cynthia Loutfi dénote que les sceptiques soulèvent en général l’impossibilité de jouer puisque les principaux accessoires du sport restent cloués au sol. Dépourvues de pouvoirs magiques, les équipes se servent de ballons ordinaires, le vif d’or est incarné par un joueur et la présence du balai est symbolique. Son utilisation constitue un handicap qu’il faut toujours tenir à une main, sinon le serrer fort entre ses jambes pour le garder en place.

«C’est un des sports les plus difficiles, c’est demandant physiquement et intellectuellement, soutient Cynthia Loutfi. En plus d’être conscient de tout ce qui se passe sur le terrain, il faut calculer le nombre de points et jouer en conséquence.» Joueur pour le Cégep du Vieux-Montréal et l’Université de Montréal, Isaac Forrest fait lui aussi le portrait d’un sport intense. «Aux niveaux cardio, physique, dextérité, agilité, rapidité, tout est demandé. En plus à l’Université de Montréal, on joue full contact», affirme-t-il.

Isaac Forrest est conscient des préjugés qui accablent le Quidditch. «Souvent, les gens ont peur du ridicule, dénonce-t-il. Le balai, c’est la chose que les gens ne peuvent pas concevoir.»Celui-ci défend son utilisation sur le terrain, car il augmente l’effort à fournir. Cynthia Loutfi se désole aussi de la fermeture d’esprit de certains détracteurs du Quidditch qui n’acceptent pas son côté risible. «Le Quidditch n’est pas geek, ce n’est pas un grandeur nature. Les commentaires négatifs, j’en fais abstraction. En me parlant, si le gens me voient emballée par le Quidditch, souvent ils changent d’idée», raconte-t-elle.

Vers une reconnaissance officielle

Peu d’équipes de Quidditch sont formées au Québec. La Ligue collégiale de Quidditch compte cinq équipes, et du côté universitaire, l’Université de Montréal et  McGill sont les seuls établissements à avoir des équipes reconnues par la Canadian Quidditch Alliance. Ce sport de balais n’est pas reconnu par le Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ), ce qui complique parfois les démarches pour la formation des équipes.

La présidente de la LCQ, Emmanuelle Rhéault, se bute parfois à des portes closes quand vient le temps de solliciter la création de nouvelles équipes collégiales. «Certains établissements refusent de monter une équipe si le sport n’est pas reconnu par le RSEQ», déplore-t-elle.

La présidente n’a toutefois pas encore entrepris de démarches auprès de cet organisme. «En commençant, mon premier but était que le Quidditch soit reconnu comme un sport», relate Emmanuelle Rhéault, qui se dit maintenant plus ou moins intéressée par le RSEQ malgré les avantages de l’adhésion. «Les démarches à faire sont longues et complexes. C’est un réseau très fermé, très conservateur, qui ne reconnaît pas beaucoup de nouveaux sports», explique la présidente de la LCQ. Elle évoque l’exemple de l’ultimate frisbee qui attend encore de joindre les rangs du Réseau après une dizaine d’années de démarches.

Emmanuelle Rhéault souligne tout de même que la ligue collégiale fonctionne très bien, mais qu’il s’agit d’un sport nouveau au Québec. «Il faut se laisser le temps d’être connus. Le Quidditch a fait son arrivée au Québec, il y a environ 6 ans, avec l’équipe de McGill. C’est la deuxième année au collégial», note-t-elle. Il est à ses yeux essentiel de laisser au sport la chance de se développer. «Le plus grand défi, c’est de se faire connaître», défend-elle. Isaac Forrest est du même avis. «Notre défi, c’est de gagner en popularité. Ce n’est pas un sport de geeks, il faut que les gens comprennent ça», soutient-il.

Crédit photo : Facebook du club de Quidditch de l’Université de Montréal

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