Des tonnes de copies, pis ça, ça énerve

Ah, la grisaille de novembre, c’est l’heure de sortir les matantes en nous pour chialer sur tout ce qui va croche au Québec. Dieu sait qu’il s’en passe des choses actuellement. D’autant plus que l’automne, c’est aussi la saison des rapports. Même la culture n’échappe pas à cette pratique. Divers groupes de travail produisent en masse des recueils de tout acabit pour mettre le doigt sur le bobo.

Ça ne fait que commencer : rapport sur le cinéma québécois, rapport sur l’état des musées, projet de loi sur le prix du livre… Et j’en passe. Il y a un problème ? Créons un groupe de travail! Les rapports qui sortent de ces groupes semblent affublés de noms ultra longs pour rebiffer les plus récalcitrants. Je me compte dans le clan des dissipés. Dans le tourbillon de ma fin de session, je n’ai pas le temps de me pencher sur un autre recueil de texte. Je rattraperai le résumé dans le prochain épisode.

D’ailleurs, une belle planche de plywood tout droit sortie de Décore ta vie semble attendre de pied ferme le rapport sur l’état du cinéma québécois. On a longtemps espéré cette liasse de papier qui se mêle les pattes dans ses solutions. Le document devait sortir à la fin octobre. Il est paru le 15 novembre. Un embargo avait été décrété avant qu’on annonce officiellement son contenu en conférence de presse. Le tout a finalement été coulé par différents médias avant sa sortie. Oupsi. Une taxe sur les billets de cinéma à été proposée, ce qui a créé un tollé chez les propriétaires de salle. La notion a été balayée du revers de la main par le ministre de la Culture, Maka Kotto. Bon sens 1, crédibilité 0.

Quand même, il n’y a pas que des mauvaises idées dans ce rapport. On veut donner plus de pouvoirs à Télé-Québec pour promouvoir le cinéma d’ici. La chaîne est l’une des seules à ne présenter presqu’aucune pause publicitaire, un bonheur pour tout cinéphile tanné des insoutenables spots à chaque 30 minutes. Par contre, on jase encore de taxes, notamment sur «les tablettes qui diffusent du contenu culturel». On me chargerait parce que j’ai écouté Hot-dog sur mon iPad ? Je passe.

Il n’y a pas vraiment de crise, dans le fond. Depuis l’annonce de cette fameuse catastrophe cinématographique, j’ai une nette impression d’assister à une tempête dans un verre d’eau. Le septième art vit un creux et déjà on ameute toute la province en criant au loup. Puis l’été pointe son nez avec son lot de productions québécoises et on remonte tranquillement la pente. Tout semble réglé, mais on se coltine maintenant une brique de 160 pages pleines de «suggestions». Une suggestion, c’est à prendre ou à laisser. J’ai hâte de voir ce qu’un parti minoritaire va réussir à voter comme «suggestion». On s’en reparle dans quelques mois, ok ?

À peine sort-on des tergiversations dans le cinéma qu’un autre débat s’enclenche : celui du financement des musées. Qui ne vois-je pas en tête d’affiche d’un article du Journal de Montréal? Rien de moins que Claude Corbo, ancien king de l’UQAM. En trois ans, je n’ai jamais vu la culture en tête des priorités de l’Université. Voilà que son ancien recteur se prend pour le grand défenseur des musées. Il faut bien occuper sa retraite. Trêve de discussion. C’est la même rengaine encore et encore : un manque de financement. Ça ne prend pas 28 000 rapports pour en arriver à cette conclusion.

J’ai parfois envie de sortir ma déchiqueteuse pour enterrer tous les rapports et les chicanes de garderie sur la question. À défaut d’une solution viable, on peut bien se féliciter d’avoir une culture sans contraintes et un tant soit peu en santé. On n’a pas d’argent, mais on a pas mal de talent. C’est déjà ça de gagné.
Marion Bérubé

Chef de pupitre Culture

culture.campus@uqam.ca

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