Maintes associations se sont dissociées de la Fédération étudiante universitaire du Québec en soulignant son manque de transparence à la suite de la grève de 2005. La fédération s’inscrit en faux contre ces allégations. Elle refuse pourtant de diffuser plusieurs documents.
Souvent mis en cause dans le passé, le manque de transparence de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) soulève des questions en cette période de débrayage étudiant. La Fédération, un des principaux organismes nationaux qui représente des collectivités d’associations étudiantes, affirme avoir remédié à la situation. Mais certains sont sceptiques.
Martin*, un étudiant de l’École des sciences de la gestion, se questionne sur les dépenses de l’Association étudiante de l’École des sciences de la gestion (AEESG) qui le représente. Il a demandé à avoir accès aux procès verbaux de la FEUQ comme son association lui donne des fonds. Au moment de mettre sous presse, une semaine après la requête, la réponse se fait toujours attendre. Impossible d’avoir accès à ces documents sur le site Internet de la FEUQ. «C’est disponible pour les associations membres seulement, coupe court la présidente Martine Desjardins, les étudiants n’y ont pas accès.» Le Montréal Campus a demandé s’il était possible d’avoir accès à ces documents. «Tu les auras encore moins si t’es journaliste», tranche-t-elle, visiblement agacée.
Pour sa part, l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE), un syndicat national étudiant, tient à ce qu’il n’y ait aucune ambiguïté. «La question de transparence envers nos membres est vraiment importante, insiste Gabriel Nadeau Dubois, secrétaire aux communications de l’ASSE. Tous nos documents sont publics et disponibles sur notre site Internet.» La FEUQ rétorque que la non-divulgation de ces documents est une stratégie. «Quand on entre en campagne contre le gouvernement, ça nous met à risque si le gouvernement sait où on s’en va», explique Martine Desjardins.
L’accès restreint aux documents à la FEUQ n’est pourtant pas récent. David Maurice, attaché politique du Regroupement des étudiantes et étudiants de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l’Université de Sherbrooke (REMDUS) lors de sa désaffiliation de la FEUQ en 2008, prétend qu’il était ardu d’obtenir les documents de la FEUQ. «On les avait, mais à la dernière minute», se rappelle-t-il, hérissé. Pour l’ancien étudiant, il ne s’agit que d’un exemple parmi tant d’autres. Il relate que les jeux de coulisses et le magouillage étaient pratique courante à la FEUQ. «Des membres de notre exécutif s’étaient rendus à une de leurs instances à titre d’observateur et ils ont été mis dehors», s’exaspère David Maurice. Il allègue également que certains membres du REMDUS ont été victimes de propos discriminatoires de la part de l’exécutif de la FEUQ. «Nous avons déposé une proposition stipulant que les membres de l’exécutif de la FEUQ n’avaient pas le droit de tenir des propos discriminatoires à l’endroit de leurs membres, argue-t-il. La proposition a été battue!»
Situation analogue en Mauricie alors que l’Association générale des étudiants de l’Université du Québec à Trois-Rivières a mis fin à son association avec la FEUQ en 2009. Un membre de l’association, qui désire rester anonyme, souligne qu’il était impossible pour eux d’obtenir les états financiers de la FEUQ et que les plans d’action étaient adoptés en huis clos. «Les congrès étaient très étanches, commence par dire le membre de l’association. Bien que le manque transparence de la FEUQ n’était pas l’argument principal pour la désaffiliation, la situation irritait les étudiants.»
Martine Desjardins balaie du revers de la main les allégations de manque de transparence. «Nos congrès sont très ouverts, réfute-t-elle. L’ASSE était même présente la dernière fois.» La présidente mentionne aussi qu’un plan de diffusion de documents auprès de leurs membres a été mis en place depuis 2009. Elle précise que ce sont les associations membres qui décident en congrès des documents qui seront disponibles ou non. Si plusieurs associations étudiantes taxent la FEUQ de manque de transparence, il n’en est rien pour Martine Desjardins. «Je ne saurais pas quoi leur répondre, confie-t-elle. Chaque organisation est différente. Nous, ce sont nos membres qui ont décidé.»
Les deux associations uqamiennes affiliées à la FEUQ, soit l’AEESG et l’Association des étudiantes et étudiants de la Faculté des sciences de l’éducation (ADESSE), ont exprimé que leurs relations avec la FEUQ étaient bonnes. Contrairement à ce que soutient la présidente de la FEUQ, le président de l’AEESG Andrew Lockhead affirme qu’il est possible pour un étudiant qui fait la demande d’avoir accès aux documents de la Fédération. «Si un étudiant paie ses cotisations, on va lui montrer les documents qu’il veut voir», confirme-t-il. Il ne cache cependant pas que certaines décisions de la FEUQ sont prises en huis clos. «Pour des questions plus problématiques, je crois que c’est de mise», commente ce dernier. De son côté, l’ADEESE allègue qu’il est facile pour eux de s’exprimer lors des congrès de la FEUQ et que leurs documents sont facilement accessibles. Le président de l’ADEESE Jonathan Giguère avoue même être curieux de savoir quelles associations reprochent un manque de transparence à la Fédération.
L’ancien attaché politique du REMDUS, David Maurice doute que la FEUQ ait changé depuis son départ de la politique estudiantine. «Il y a beaucoup de roulement dans la politique étudiante, mais les piliers gravitent longtemps, déclare-t-il. S’ils ont changé, c’est à eux de le prouver.»
*Nom fictif
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