Toi sans ton carré rouge…

Mon fil Facebook est un ramassis de cochonneries. Liens vers des chansons quétaines, des jeux attrape-nigauds et j’en passe. En ce moment, ce qui m’énerve le plus, ce sont les pseudo-gauchos fils et filles à papa qui militent contre la hausse des frais, mais qui étrangement sont aussi contre la grève illimitée. Deux cent cinquante ans de lutte dans le monde, et voilà que le Saint-Graal de la contestation vient de germer dans la tête de ces jeunes révolutionnaires, celui de pouvoir faire reculer un gouvernement sans lever le petit doigt.

Pause. Rembobinage. C’est une comédie sans fin. Un mauvais film qu’on nous ressort à chaque fois. Il n’y a pas de différences entre la grève et la hausse des frais. Ceux qui ne veulent pas le croire se mettent le petit doigt de tantôt dans l’œil. Lorsque Line Beauchamp et Jean Charest nous traitent à la dure, nous devons répondre de la sorte. J’aimerais bien participer à un mouvement de contestation entouré de Câlinours, se cajoler pendant trois jours, puis que le gentil premier ministre nous fasse des cupcakes à tous pour avoir été si méchant avec nous. Le jour où cela arrivera, il existera bien une différence entre grève illimitée et hausse des frais de scolarité.

En attendant, réfléchissez avant de vous plaindre des enragés de la contestation. Ce sont souvent des gens bien moins nantis que vous, mais qui ont appris dans leurs livres d’histoire que les grandes protestations ont toujours commencé par la volonté de quelques-uns. Quelques-uns en France en 1789, ici en 1837, à Chicago en 1886, en Russie en 1917, à Benghazi en 2011.

Cette grève n’amènera pas une révolution, on s’entend, mais cracher contre les meneurs de grève, c’est cracher sur les idées qu’ils défendent. Même si le monde associatif étudiant n’est pas le plus transparent qu’il soit, il faut leur accorder le mérite de défendre leurs droits, vos droits! D’autant plus que la communication autour de la grève est importante et leur volonté de vous convaincre, réelle. Les différentes vidéos explicatives qui tournent sur internet, les causeries sur l’heure du dîner, les assemblées générales de grèves – ah oui, encore faut-il y aller, ce qui ne semble pas être le cas des gens que je vise dans cette chronique.

Râlez autant que vous voulez contre la grève, votre gesticulation ne restera pas moins qu’une résonance d’un mouvement pour la hausse des frais de scolarité que le gouvernement s’empressera de récupérer. Que vous le vouliez ou non. «Regardez ces étudiants qui ne sont pas en grève, c’est qu’ils sont avec nous!» Que cela se répercute sur l’été de ceux qui travaillent, c’est une possibilité. Mais qu’est-ce qu’un été, si dans deux ans il faut en travailler deux pour aller étudier? Arrêtez donc de geindre sous des motifs invalides. Les vraies raisons qui vous motivent à être contre la grève, c’est parce que cela empiétera sur vos vacances d’été. Les frais de scolarité, c’est papa et maman qui vous les offrent de toute manière. Défendre l’étudiant qui devra trimer pour se payer des cours à votre profil n’est qu’un moyen de faire passer votre égoïsme amplifié par un je-m’en-foutisme de l’avenir de votre société pour une opinion presque valable. Le Québec a plus à perdre que vous et vos vacances. Collez cette phrase sur votre frigo et venez dépenser votre énergie pour la lutte plutôt que contre en polluant mon fil Facebook.

Arnaud Stopa
Chef de pupitre UQAM
Uqam.campus@uqam.ca

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