Une douleur nécessaire

Cantate de guerre de Larry Tremblay amorçait cette année la saison au Théâtre d’aujourd’hui. La pièce à ferveur poétique raconte le récit d’un père qui apprend la haine à son fils pour en faire un soldat. À travers l’histoire du père, c’est pourtant toute l’horreur des guerres religieuses et ethniques qui se dévoilent au public. Le pari de la pièce se résume à la lumière de cette horreur: faire ressentir par les mots le terrible de la guerre jusqu’à sa toute limite. Il ne reste alors d’audible que l’horreur du sang versé inutilement.

Une douleur que la pièce veut nécessaire. Cependant, cette douleur autant montrée n’arrive qu’en partie à susciter l’angoisse. On arrive aisément à comprendre les volontés de la pièce, mais les émotions peinent à être ressenties. Pourtant, tous les éléments sont présents pour une recette gagnante. Anick La Bissonnière nous livre une scénographie fidèle à son travail chirurgical. Une scène inclinée, sobre et épurée, qui laisse l’espace aux comédiens. En arrière-scène: des poutres de bois asymétriques qui forment un intéressant jeu de lignes presqu’oppressant pour le public, à travers lesquels les comédiens évoluent. Le rôle du père est tenu par Paul Ahmarani, qui livre une interprétation électrifiante, comme à l’accoutumé, dans son costume de soldat torturé. Il est accompagné par un chœur de comédiens parmi lequel Denis Roy, Frédéric Lavallée, Mathieu Lepage et Abdelghafour Elaaziz. Comédiens qui ont l’habitude d’assumer les rôles de soutien avec brio, le chœur dans Cantate manque drastiquement de profondeur. Malgré quelques idées originales de mise en scène, il ne vient que surligner des thématiques déjà comprises par le public. Le rôle du fils est joué avec justesse par Mikhaïl Ahooja, mais le rôle manque d’occasions de se faire valoir, confiné à de courts passages qui n’ont pour but que de relancer le monologue du père.

Dans l’ensemble, la pièce est assez décevante et sans subtilité, ce qui surprend d’une pièce de Larry Tremblay. Cantate de guerre rappelle d’ailleurs Blasté et Éxécuteur 14. Deux pièces sur l’horreur de la guerre dans lesquelles Paul Ahmarani endossait si bien le costume de soldat torturé. Son interprétation atteint ici les mêmes sommets, mais à travers une pièce d’une toute autre ampleur. Avec une multitude d’œuvres similaires dans le paysage artistique actuel, à ne penser qu’à Incendies au cinéma, les chances sont grandes pour que Cantate de guerre demeure anecdotique.

Cantate de guerre, de Larry Tremblay, Théâtre d’Aujourd’hui, jusqu’au 15 octobre 2011.

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