Lendemain de veille

Portrait de Benoit Paradis

Après avoir roulé sa bosse tout en pirouettes au sein d’une troupe de théâtre internationale, Benoit Paradis a troqué son nez de clown pour une trompette. Entre deux soirées arrosées, ce personnage haut en couleur fait vibrer les gens au son d’un jazz décalé.
Ève Lévesque et Élise Jetté

Mouillé par la pluie, les cheveux en bataille, Benoit Paradis vient de se lever. Il est 15h. Un petit peu éparpillé, comme le titre d’une de ses chansons, il s’assoit, trompette en main. Au lendemain d’un spectacle au bar Les Pas Sages qui s’est terminé aux petites heures du matin, Benoit Paradis raconte son parcours d’artiste comme il chante: d’un air alangui, mais complètement passionné. «J’ai besoin de me renouveler en tant qu’artiste. Tout m’intéresse alors je mets toutes les facettes de l’art au service de ma musique». Multi-instrumentiste, clown, comédien et acrobate, Benoit Paradis est aussi le tromboniste de l’auteur-compositeur-interprète montréalais Bernard Adamus.

Benoit Paradis est avant tout l’auteur de deux albums autoproduits et le leader du trio qui porte son nom. Après des études en musique à l’école secondaire Pierre-Laporte, le jeune homme issu d’une famille d’artistes et de musiciens continue ses études au Conservatoire de musique du Québec à Montréal. Il a la chance d’avoir Alain Trudel, chef d’orchestre reconnu, comme professeur et immense source d’inspiration. Mais le cadre rigide dans lequel s’inscrit la musique classique le dérange. Ce qu’il aime n’est ni pompeux, ni puriste. Tiraillé par l’envie de suivre les traces de son frère et de sa sœur ainés vers les arts de la scène, il délaisse la musique pour deux ans. Une pause qui s’avère déterminante puisqu’elle lui permet de prendre des cours de théâtre et de développer le personnage qu’il est aujourd’hui. Peu après, il est engagé par DynamO Théâtre, compagnie de théâtre d’envergure internationale qui touche surtout à l’art du mouvement. Il part en tournée, en Europe, où la troupe donnera une centaine de spectacles en un an. L’envie d’écrire demeure intense. C’est la participation de Benoit Paradis au sein de Plywood _, groupe de rock et de country, à l’ambiance de cirque artisanal, qui est finalement le déclencheur de son amour pour la chanson.

C’est avec Benoit Paradis Trio qu’il remporte le Festival de la chanson de Petite-Vallée en tant qu’interprète. Depuis, le groupe et lui ont été entendus à trois reprises aux Francofolies ainsi qu’au Festival de la chanson de Tadoussac et dans certaines premières parties de Bernard Adamus.

Jazzer au gré du vent

vec son groupe, Benoit Paradis brise le cadre précis qu’on connaît du jazz. Avec Chantal Morin au piano et à l’écriture et Benoit Coulombe à la contrebasse, le groupe mélange la chanson, le jazz et l’humour. Et quand sa présence auprès de Bernard Adamus est requise, Benoit Paradis en profite pour établir un premier contact avec un nouveau public en y jouant quelques-unes de ses chansons. Il est conscient que son trio propose un travail moins accessible que ce qu’Adamus fait. Est-ce que l’évolution de ces deux projets parallèles est difficile à gérer? «Je fais ce que je peux. Je veux profiter du fait que je puisse gagner ma vie avec ma musique. Je fais ce que j’aime. C’est moi le noyau du groupe.»
Benoit Paradis Trio donne à sa musique une approche théâtrale qui se voit et s’entend. Sans perdre de son authenticité, le personnage qu’adopte le tromboniste est une caricature de lui-même. «Ça me permet d’aller au bout d’une folie qui m’habite.»

Faire sa musique de A à Z

Benoit Paradis n’est pas un homme de mondanités, il vit avec la musique dans son état le plus simple. «Je veux aborder la scène avec authenticité, laisser place à la spontanéité. C’est ça le jazz, ça a des racines super profondes. Ce n’est pas chic, ce n’est pas prétentieux.»
Sa passion transparait d’ailleurs dans ses méthodes de diffusion, car il crée, arrange et produit ses morceaux à l’aide de ses deux acolytes. Musicalement, on peut distinguer l’empreinte absurde de Boris Vian, les textes bruts de Dédé et de Fred Fortin, la folie de Gainsbourg. Tout est lié par un jazz cadencé ainsi que par des passages instrumentaux où vrombissent la trompette et le trombone de Benoît Paradis.

Au-delà de la musique, les spectacles de Benoit Paradis sont des œuvres multi-artistiques influencées par l’appartenance innée au théâtre de son chanteur qui, mi-drôle, mi-sérieux, nous raconte une histoire en musique. C’est au bar Les Pas Sages que le trio a établi domicile, entre autres en y déménageant le piano de Benoît qui «aime revenir faire des prestations à cet endroit où l’on se sent à la maison.»

Il y expérimentera sans doute son prochain spectacle, sur lequel il planche et qui devrait coïncider avec la sortie d’un nouvel album en 2011. L’ambiance sera-t-elle similaire au précédent? «Le prochain spectacle sera moins joué, je veux me décoller de mon personnage, revenir à moi». Autant dire que le clown en lui fera encore des siennes.

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