Troque ton pogo

Les garderies à tendance végétarienne

Oubliez les enfants qui ne jurent que par les croquettes de poulet et les pizzas pochettes. Des bouts de chou brisent le stéréotype de l’enfant anti-brocoli grâce aux initiatives végétariennes des garderies montréalaises.

Photo: Jean-François Hamelin

En collaboration avec Mathieu Papillon

Attention, ceci n’est pas de la science-fiction: à la garderie, les enfants raffolent des carrés aux épinards et finissent leur plat de lentilles. Partout dans la métropole, des menus végétariens sont intégrés dans les garderies. Le but? Améliorer la santé et les habitudes de consommation de la nouvelle génération.

À la Garderie Papillon, la directrice Sandrine Adjahi a implanté les Lundis végés au printemps dernier. «Pour des raisons économiques, la cuisine commence par devenir végétarienne avant de devenir biologique. Aussi, la fête de l’Halloween est écologique depuis deux ans, tout comme le mur d’escalade fait de matériaux recyclés.» L’idée a germé dans la tête de la directrice avant même qu’elle ne connaisse le mouvement américain Meatless Monday, prôné par nul autre que Paul McCartney.

Pour l’instant, le cuisinier du Centre de la petite enfance (CPE), qui n’a rien d’un végétarien, tâte le terrain. «On travaille sur des menus plus colorés. Mais on note déjà un gros succès, juste dans le peu de nourriture que les enfants laissent dans leur assiette comparativement aux autres jours de la semaine», explique la directrice. Elle rappelle que la viande n’est pas nécessairement un choix naturel pour un enfant de deux ans. «Quand on l’enlève, ça ne leur manque pas.»

Si la Garderie Papillon se familiarise avec le processus, certains CPE ont pleinement intégré le végétarisme à leur quotidien. Fajitas sans viande, tofu et brioches maison font partie des dîners du CPE Harmonie, sur le Plateau-Mont-Royal, 100% végé depuis 25 ans. Hélène Théberge, cuisinière, affirme que les commentaires des parents ont toujours été très positifs à l’égard de ses menus. «Ça fait découvrir toutes sortes d’aliments aux enfants. Vers l’âge de 7 ou 8 ans, on les amène manger au Commensal et ils connaissent déjà tous les plats!» La directrice du centre, Denise Goulet, remarque qu’à leur sortie, les enfants sont de grands mangeurs de salade. «Il y a tellement de goûts, de saveurs, d’odeurs dans les plats cuisinés ici. Tellement que les parents veulent rester manger!»  

Party de lentilles

Mais les enfants sont-ils aussi enthousiastes? C’est grâce à l’influence des copains que les bouts de chou acceptent la nouveauté et les légumes verts. «J’entends parfois les parents dire qu’à la maison, l’enfant ne veut pas manger ses légumes. Mais à la garderie, ils sont en groupe. C’est plus facile», souligne la cuisinière Hélène Théberge. Simon Piotte, qui a été directeur par intérim de plusieurs CPE montréalais, est du même avis. «Certains enfants sont réticents aux mets qu’on leur propose, mais l’influence des pairs a son effet. Quand ils voient que tout le monde mange ce qu’ils n’aiment pas, ils finissent par se résigner.» Tous s’entendent pour affirmer qu’à long terme, les enfants sont plus ouverts. «Je pense que ça peut avoir l’impact de créer une génération qui acceptera mieux les lentilles et le pain brun», rigole Simon Piotte. «Un enfant est même revenu deux ans après avoir quitté pour me demander ma recette de calmars», raconte en riant l’ancienne cuisinière du CPE Champagneur d’Outremont, Lise Gauthier.

C’est que la clientèle de ces CPE n’est pas toujours végétarienne à la maison. «Dans la mesure où les parents servent déjà de la viande, si on en servait nous aussi, on survaloriserait la viande. Tout ce qu’on souhaite, c’est respecter le Guide alimentaire canadien», explique Simon Piotte. Un guide que les parents ne respectent pas toujours. «Ils ne font qu’applaudir l’initiative. Ça les déculpabilise d’offrir eux-mêmes des frites à leurs enfants. Les CPE ont un rôle éducatif à jouer.»

Trouver son fermier

Malgré tout, l’agent de développement du Regroupement des centres de la petite enfance de l’Île de Montréal (RCPEÎM), Martin Cliche, ne croit pas en une tendance généralisée. Mais l’agent s’empresse d’affirmer qu’une entente de collaboration est faite avec Équiterre depuis quelques années, pour permettre à une quarantaine de garderies de suivre la voie du biologique plus facilement. «On incite les garderies à se mettre en lien avec un producteur biologique local. Parmi les CPE qui participent, certains sont aussi des points de chute pour les paniers biologiques que les parents achètent chaque semaine», explique la chargée de projet chez Équiterre, Lova Ramanitrarivo. Les garderies font alors un réaménagement dans le menu pour ne pas dépasser les budgets, dans le choix des pièces de viande, par exemple. Lova Ramanitrarivo explique qu’en plus du volet approvisionnement, le projet comprend également un volet éducatif. «On a développé des outils pour les services de garde, qui comprend des dégustations ou des visites chez les producteurs, par exemple.» Pour Martin Cliche du RCPEÎM, ces activités avec la nourriture sont essentielles pour la conscience de l’enfant. «Ça permet de découvrir que ce qui est dans votre assiette ne tombe pas du ciel.»

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