La faillite du système?

Le modèle associatif en panne

Placardez sur une affiche les mots «ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE GRÈVE» et vous rassemblerez 500 personnes dans une salle. Retranchez les deux derniers mots et vous entendrez sans doute une mouche voler. La vie démocratique à l’UQAM est-elle malade?

Les membres de l’Association facultaire des étudiants en sciences politiques et en droit (AFESPED) sont plus généreux qu’ils ne le pensaient. Montréal Campus a appris de sources sûres qu’à l’hiver 2008, près de 3000 dollars sont mystérieusement passés du compte chèques de l’AFESPED à celui de l’un de ses exécutants. Comme l’une des signatures avait été falsifiée, l’institution financière a dédommagé l’association pour qui désormais le dossier est clôt.

Ce n’est pas la première fois que certains membres peu scrupuleux confondent les finances de leur association avec leur propre portefeuille. Bernard Dufour, ancien exécutant de l’Association facultaire des étudiants en langue et en communication (AFELC), raconte qu’à la deuxième semaine de grève au printemps 2008, un ex-administrateur est passé au local de l’AFELC et a demandé une enveloppe d’argent. Il ne voulait dévoiler ni le montant souhaité, ni l’objet de la dépense, soupçonnant les membres de l’équipe d’être des infiltrés de la Fédération des étudiants universitaires du Québec (FEUQ), peu appréciée dans certains milieux de gauche. «Bien entendu, nous avons refusé sa demande! s’exclame Bernard Dufour. Mais ça en dit long sur le genre de pratiques qui prévaut selon l’honnêteté de l’équipe en place. Un membre de l’exécutif a un pouvoir énorme parce qu’il peut donner de l’argent à un tas d’individus sans qu’aucun compte ne lui soit demandé.»

Cela est d’autant plus facile que les membres ne se pressent pas aux portes des assemblées générales lorsque vient le temps de débattre des affaires courantes. «Nos étudiants démontraient peu d’intérêt pour des questions relatives au budget», déplore Philippe Lapointe, ancien exécutant à l’AFESPED. Maxime Tassé, président de l’Association facultaire des étudiants en science de l’éduction (ADEESE) en 2008-2009, reconnaît que les enjeux autres que la grève ne déplacent pas les foules. «Mais même si seulement 40 personnes se présentent à l’assemblée, il faut prendre des décisions tôt ou tard. C’est là que le lien de confiance avec tes membres est important. En leur absence, tu espères faire les meilleurs choix possibles.»

Ne faudrait-il pas plutôt revoir le modèle politique étudiant se demande un ancien exécutant de l’AFELC, Laurent-Simon Lapierre. «Dans le meilleur des mondes, la majorité des étudiants se présenteraient aux assemblées et voteraient en connaissance de cause, mais la réalité est différente. Si, sur quelques milliers de membres, tu ne réussis qu’à en réunir 30, tu dois te poser des questions! Soit tu es trop politique, soit tu es trop loin de tes membres ou soit ta structure est trop lourde!»

Affaire de paperasse

La structure associative est exigeante envers ses bénévoles. «Bien que je bénéficiais d’une compensation financière, mes tâches demandaient 20 heures par semaine, se rappelle Maxime Tassé. Souvent, mes études passaient en deuxième.»

D’énormes responsabilités attendent les administrateurs des associations étudiantes. Les volontaires, qui ne sont pas nécessairement formés pour s’occuper d’une corporation, gèrent un budget d’une centaine de milliers de dollars et un vaste programme de services. «La plupart n’ont pas d’étudiants en gestion parmi leurs membres pour s’occuper des finances, déplore Laurent-Simon Lapierre. De plus, il est difficile de faire appel à des professionnels, puisque leurs services coûtent chers et que les associations sont trop serrés financièrement.»

Laurent-Simon Lapierre considère que les étudiants auraient tout intérêt à surveiller de près ce qui se passe dans leur association. «Bien souvent, quand le quorum d’une assemblée n’est pas atteint, le mot d’ordre entre les purs et durs est de ne pas demander au président un comptage des participants. C’est dans ce genre de réunions douteuses que sont passées en vitesse des mesures questionnables pour l’intérêt des membres et qui ne seraient pas votés devant une salle comble. Durant mon mandat, je n’ai assisté qu’à une seule assemblée avec le quorum requis!»

Philippe Lapointe croît que «pour plusieurs, l’université est un lieu d’apprentissage et pas nécessairement de débats politiques. Cependant, ceux-ci doivent comprendre que pour garantir la qualité de l’enseignement, il faut parfois faire de la politique. Les étudiants ont la responsabilité de prendre position.»

À ce sujet, Bernard Dufour, ne masque pas sa déception face au comportement de ses pairs. «Par ennui ou par paresse, les universitaires désertent la politique associative. Entendons-nous, c’est plus amusant de prendre une bière que de discuter finance. Mais aux votes de grèves, ils se pointent massivement parce qu‘ils réalisent que quelque chose leur glisse des doigts!»

 

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