En raison des restrictions pour lutter contre la COVID-19, les salles à manger des restaurants ont été remplacées par les applications de commande en ligne. Entre Uber Eats, Skip The Dishes et Doordash, certain(e)s étudiant(e)s ont conservé cette habitude de consommation, parfois au détriment de leur santé et de leur portefeuille.
Jenna Nadeau, étudiante en droit à l’Université de Montréal, commande de façon régulière sur l’application Uber Eats. « J’ai fait ma première commande au début de la pandémie, et j’ai été obsédée depuis! Ma soeur et moi, on commandait du McDonald’s, du Starbucks, des sushis… C’était notre premier réflexe quand on n’avait pas envie de cuisiner », se remémore-t-elle.
Le cas de Jenna Nadeau n’est pas isolé. Au Canada, les étudiant(e)s sont à l’origine de plus du quart des commandes effectuées dans la dernière année sur l’application Uber Eats, selon les chiffres de l’entreprise. Les déplacements étant également restreints lors de la pandémie, plusieurs ont opté pour les plateformes de commande en ligne, une option simple, facile et surtout, instantanée.
Une « gratification immédiate »
L’aspect pratique de la commande en ligne explique en partie sa popularité grandissante auprès des universitaires. « C’est un gagne-temps formidable pour les étudiants ; ils n’ont qu’à peser sur quelques boutons et la nourriture apparaît presque instantanément à leur porte », explique Laure Saulais, professeure agrégée au Département d’économie agroalimentaire et des sciences de la consommation de l’Université Laval.
En effet, cette « gratification immédiate » incite la communauté étudiante à user de ce genre d’application. L’action de recevoir à sa porte une « récompense » (la nourriture) libère des hormones de bonheur dans le cerveau, comme la dopamine. C’est ce qui fait que certaines personnes se mettent à commander de façon excessive lors de leur entrée à l’université. « Même cet été, quand la pandémie était moins pire, j’ai continué à commander plusieurs fois par semaine, raconte Jenna Nadeau. Je me dis que tant qu’à dépenser 15$ en épicerie, j’aime mieux dépenser 15$ pour me faire livrer un repas complet et déjà prêt. »
Selon la professeure, c’est aussi le côté personnalisé de ces plateformes qui peut mener à une utilisation compulsive : « L’application sait ce que vous aimez : elle offre des promotions selon vos goûts, vos habitudes alimentaires et vos commandes passées », souligne la spécialiste.
Des effets néfastes à long terme
Ces habitudes alimentaires peuvent néanmoins avoir des impacts néfastes sur la santé de la communauté étudiante, estime Roland Savard, professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). « Les repas commandés sur ces applications sont souvent riches en lipides, ce qui donne le goût de manger davantage de ce genre de nourriture. »
À moins de choisir des options plus équilibrées, les commandes répétées peuvent engendrer des carences alimentaires chez les étudiants et les étudiantes. « Les portions des restaurants sont souvent plus généreuses que celles qu’on se ferait nous-mêmes. Exposés à de plus grosses portions, on a tendance à manger un peu plus que notre faim réelle, même si ce n’est pas très nutritif », précise Véronique Provencher, professeure à l’école de nutrition de l’Université Laval et chercheuse au centre NUTRISS (Nutrition, Santé et Société).
Si elle s’étend sur une période prolongée, une telle alimentation peut même altérer le flux sanguin du corps et du cerveau, ce qui nuit à l’apprentissage. « Comme jeune adulte, on est en train de former nos habitudes alimentaires », renchérit Mme Provencher. « Il faut faire des choix éclairés quant aux aliments et aux types de repas que l’on consomme, pour s’assurer d’avoir tous les éléments nécessaires au bon développement de notre organisme. »
Mention photo Manon Touffet | Montréal Campus
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