Avec les délais d’obtention de documents officiels rallongés à cause de la pandémie, des étudiants et étudiantes étranger(ère)s de l’UQAM encore en attente de leur permis d’études perdent la possibilité de travailler comme auxiliaires à l’enseignement ou à la recherche, ce qui pourrait nuire à leur parcours académique.
En temps normaux, tous devraient avoir leur permis avant même de commencer la session. Avec la fermeture des frontières, en mars dernier, plusieurs étudiants et étudiantes continuent leur parcours à partir de leur pays d’origine, sans leurs papiers canadiens.
Le gouvernement fédéral a annoncé que les étudiants et étudiantes étranger(ère)s pourront retourner au Canada à partir du 20 octobre prochain. Cependant, sans documents officiels, il est tout autant impossible de traverser la frontière que de travailler à distance.
C’est le cas d’Emilie Lecoq, qui était depuis un an adjointe à la coordination et aux communications au Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté de l’UQAM. L’étudiante à la maîtrise en communication a perdu son poste le 31 août dernier, lorsqu’elle a quitté le Canada alors que son permis d’études et son numéro d’assurance sociale (NAS) avaient expiré.
« Il y a tellement d’informations qui sont contradictoires. On lit des choses et après on se rend compte qu’avec la COVID il y a d’autres dimensions, ce qui fait que moi, je m’y perds », dit l’étudiante.
Alors qu’elle se demandait encore si elle devait retourner en France, à la session d’hiver dernier, elle ne savait pas vers qui se tourner pour obtenir des réponses. « Je cherchais par moi-même », dit-elle, ajoutant que c’est finalement un webinaire de l’école Polytechnique qui lui a appris qu’elle ne pourrait pas travailler de l’extérieur du pays. Elle est partie quand même, en se disant qu’elle pourrait faire de nouvelles demandes de documents au besoin.
Des délais administratifs
Le site internet d’Immigration Canada ne donne pas d’explication sur le cas particulier d’Émilie Lecoq. La porte-parole du ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Béatrice Fénelon, jointe par le Montréal Campus, explique qu’un « ressortissant étranger qui n’est pas physiquement au Canada peut travailler à distance pour un employeur au Canada sans avoir besoin de quelconque type de permis de travail ou d’autorisation de travail étudiant ».
Par exemple, que l’on réside au Canada ou à l’étranger, il faudrait d’abord obtenir un permis d’études, pour ensuite demander un NAS. Or, d’après le site d’Immigration Canada, il n’est pas possible de « traiter les demandes normalement » en raison de la pandémie. Les délais de traitement varient d’un pays à l’autre. Alors qu’une Française comme Emilie Lecoq attendra 15 semaines avant de recevoir son permis d’études, un résident temporaire du Canada devra patienter 23 semaines. Ces chiffres sont mis à jour chaque semaine.
Les délais pour l’obtention d’un NAS ne sont pas indiqués.
En quête de solutions pour l’UQAM
Cette situation est « problématique » , selon le responsable à la convention collective du Syndicat des étudiants et étudiantes employé(e)s de l’UQAM (SÉTUE), Luc Chicoine. Les contrats d’auxiliaires accordés aux étudiants et étudiantes sont pour lui « une bonne porte d’entrée » pour obtenir des emplois dans leur domaine. Sans ces postes formateurs, ils et elles n’ont « pas nécessairement la pleine expérience ».
« Nous avons communiqué ce point oralement aux représentants de l’UQAM lors d’une rencontre de notre Comité des relations de travail le 10 septembre dernier », ajoute M. Chicoine.
Interrogée à ce sujet, la directrice de la Division des relations de presse et événements spéciaux de l’UQAM, Jenny Desrochers, confirme que l’université prend la situation au sérieux. « Les réflexions ont débuté et se poursuivent avec différents intervenants » pour trouver des alternatives qui « respecte[nt] les lois qui sont en vigueur », dit-elle. Elle n’a pas été en mesure de dire quelles solutions étaient envisagées.
Au moment d’écrire ces lignes, M. Chicoine indique que le SÉTUE n’a pas encore reçu de nouvelles de l’université à ce sujet. Il appelle la direction « à faire preuve de créativité ».
Le cas de Concordia
L’université Concordia, par exemple, a déjà mis en place un système de paie des étudiants et étudiantes étranger(ère)s hors du territoire. « La somme est déposée dans leurs comptes étudiants », explique la porte-parole de l’université, Vannina Maestracci.
Tel que précisé sur le site de Concordia, les salaires prennent officiellement la forme de bourses, ce qui permet de les recevoir sans posséder de NAS. Les auxiliaires pourront retirer leur argent une fois arrivé(e)s à Montréal.
« C’est un bon exemple, mais ce n’est pas une solution miracle », nuance la conseillère syndicale de l’Alliance de la fonction publique du Canada, Caroline Mallette. Les étudiants et étudiantes qui se font payer avec des bourses ne sont pas reconnu(e)s comme travailleurs et travailleuses syndiqué(e)s, et ne sont donc pas couvert(e)s par une convention collective.
Selon Mme Mallette, à Concordia, « l’employeur a démontré sa bonne foi » en promettant que les étudiants et les étudiantes étranger(e)s auront droit aux mêmes conditions de travail que les autres, et en versant l’équivalent de leurs cotisations au syndicat.
Elle ajoute que malgré tout, beaucoup de détails juridiques et fiscaux restent à régler, et que « les discussions vont bon train » pour peaufiner le modèle.
Crédit photo Lauren Saucier | Montréal Campus
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