Claudia, Nelly et Sylvia

Avec son nouveau spectacle Nelly et Sylvia, présenté dans le cadre du Festival international de la littérature (FIL), l’écrivaine et artiste Claudia Larochelle triomphe et démontre sa grande polyvalence.

C’est un amour sans fin pour la culture du mot qui a motivé Claudia Larochelle à réaliser Nelly et Sylvia, un spectacle littéraire unissant les univers de la québécoise Nelly Arcan et de l’américaine Sylvia Plath. S’il y a un fil conducteur dans les nombreuses activités de cette artiste multidisciplinaire, c’est bien sa passion pour l’écriture. Pour Claudia Larochelle, le mot écrit n’est pas seulement une façon de passer le temps, c’est « un don auquel tout le monde devrait avoir accès ».

Présentée les 20 et 21 septembre à la Place des Arts, la performance d’une durée d’environ une heure implique deux artistes, soit Evelyne Brochu, qui performe les extraits d’Arcan, et Alice Pascual, qui livre ceux de Plath. Le décor, les costumes et l’éclairage sont extrêmement simples. Les actrices sont habillées seulement de noir et quelques lutrins ainsi qu’un fond d’écran noir avec des images de nature ou de fumée constituent l’ensemble de la scène. Toutefois, l’esthétique est bien secondaire à l’aspect le plus important de l’événement, la lecture des textes.

Une lecture puissante

Le défi était de taille ; unir deux écrivaines qui ne se sont jamais rencontrées en n’utilisant que leurs textes n’est après tout pas une mince affaire. Pour ce faire, Claudia Larochelle présente des extraits d’une multitude d’œuvres de Nelly Arcan et Sylvia Plath, deux écrivaines aux vies houleuses. Née sous le nom d’Isabelle Fortier dix ans après le suicide de Plath, Nelly Arcan a elle aussi mis fin à ses jours avant d’atteindre la quarantaine. Les textes des ces autrices de talent se rencontrent donc pour une première fois, à l’occasion de l’anniversaire des dix ans du départ de Nelly Arcan. 

La plus grande force du spectacle est de toute évidence la façon dont les deux actrices prennent la parole l’une à la suite de l’autre, connectant ainsi les mots de Plath et d’Arcan. Le but de Claudia Larochelle était que les propos de deux sources totalement différentes « coulent comme de la soie » et l’exercice a été majoritairement un succès. En effet, les monologues se suivent souvent magnifiquement, passant par plusieurs thèmes. La foule peut ainsi observer une sorte de discussion sur la condition de la femme, le suicide, la maternité et la jeunesse. 

Si la simplicité de la pièce peut sembler peu impressionnante, elle joue en fait en faveur de Brochu et Pascual. Cette simplicité permet aux actrices de déployer toute la subtilité des textes lors de leurs performances. Ainsi, elles sont capables de montrer toute la profondeur et parfois l’humour des écrits de Plath et Arcan. Il est aussi important de noter la superbe performance d’Evelyne Brochu qui livre chaque réplique avec une énergie inépuisable, particulièrement lorsqu’elle explose durant un monologue émotif sur la condition de la femme à la fin de la production. 

S’il y a bien un défaut au spectacle, c’est que la belle harmonie unissant les textes se perd un peu au milieu de la performance. Durant une quinzaine de minutes, l’événement voit son charme se réduire alors que les répliques commencent à s’enchaîner moins bien les unes avec les autres. Heureusement, cette période de dissonance ne dure pas. Le spectacle se conclut sur une note douce et mélancolique alors que les textes s’unissent à nouveau.

Un caméléon de la culture

Le parcours éducatif de Claudia Larochelle est tout aussi varié que sa carrière. Diplômée en Sciences de la parole au Conservatoire Lassalle, l’écrivaine étudie le journalisme à l’UQAM, puis y réalise une maîtrise en création littéraire. De chroniqueuse à écrivaine, elle fait de sa polyvalence son plus grand atout et les rencontres que sa vocation l’emmène à faire constituent pour elle une source d’inspiration. 

« L’histoire des âmes augmente mon imaginaire », révèle l’artiste. Nelly Arcan et Sylvia Plath ont d’ailleurs été des inspirations majeures pour Claudia Larochelle, dans son travail. Cela fait maintenant vingt ans que l’artiste s’est trouvé une passion pour les textes de ces autrices, qu’elle a trouvé particulièrement  formateurs . C’est pour son adoration de ces textes qu’elle a voulu les unir dans le cadre du 21e Festival international de la littérature.

C’est avec un tonnerre d’applaudissements bien mérité que le spectacle coulant de sincérité et d’émotion s’est conclu, vendredi soir. L’ouverture du FIL par l’œuvre de Larochelle marque un coup d’envoi fort optimiste pour ce festival à ne pas manquer.

photo: MAXIME CORMIER



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