Découvrir une étonnante diversité de techniques et de styles : c’est ce que proposent les 23 artistes visuel(le)s émergent(e)s qui s’emparent du square Dorchester au centre-ville de Montréal du 12 au 15 septembre 2019 dans le cadre de la deuxième édition de l’exposition Artch.
La pluralité des oeuvres, tant par le fond que par la forme, est frappante pour qui pénètre les 21 petites tentes de l’événement cofondé par les groupes Art Souterrain et Carrefour jeunesse-emploi Montréal Centre-Ville. Malgré l’agencement hétéroclite de l’exposition extérieure, chaque module est une immersion dans l’univers des artistes, tous et toutes âgé(e)s de 35 ans et moins et principalement issu(e)s de l’UQAM et de l’Université Concordia. Ces installations minimalistes confèrent une intimité qui laisse toute la place à la surprise de la découverte de peintures, de sculptures, de photographies et de dessins. Deux oeuvres performatives dynamisent l’ensemble par leur caractère insolite et inattendu.
L’une de ces deux performances réunit quatre personnes autour d’une table, les bras figés par des attelles, afin de discuter et de s’entraider pour manger un gâteau. L’artiste anglophone qui est à l’origine de l’oeuvre, Diyar Mayil, se trouve au bout de la table, tout sourire. « Cette performance, je l’ai réalisée dans mon studio il y a deux ans avec mes amis, mais j’avais toujours rêvé de l’emmener dans un parc, raconte-t-elle. Artch est une occasion parfaite de la présenter au public. » Celle qui se spécialise en sculpture explique que ses oeuvres s’articulent principalement autour du thème de l’adaptation. Avec cette oeuvre, l’autrice dit avoir voulu « créer une dysfonction afin de créer une nouvelle fonction ».
Démocratiser l’art
« La scène de l’art contemporain a souvent beaucoup de mal à identifier et à repérer des artistes qui sont en début de carrière », constate le cofondateur d’Artch et directeur général d’Art Souterrain, Frédéric Loury. À l’aide de quatre membres d’un jury, l’équipe d’Artch a sélectionné 23 artistes qui se distinguaient par leur audace, leur pratique et leur originalité, précise-t-il.
L’objectif de cet organisme à but non lucratif n’était pas d’imposer un thème aux artistes, mais plutôt d’agir en tant que « révélateur » de talent auprès des professionnels et professionnelles et du grand public, poursuit M. Loury. Il ajoute qu’un travail artistique a été fait en collaboration avec chaque artiste afin d’« assurer une cohérence à l’intérieur [de chaque] module. » Ainsi, durant l’été, chaque oeuvre a été soigneusement discutée et observée.
« C’est une plateforme, un outil pour les artistes émergents », considère Colas Eko, titulaire d’un certificat en arts visuels à l’UQAM en plus d’un baccalauréat en beaux-arts à l’Université Concordia. Sur l’herbe, l’artiste présente une réflexion sur sa propre identité. Un petit canot, une tente et une chaise pliante sont décorés par des éléments multicolores de « pagne wax », un type de vêtement africain qui rappelle la courtepointe. Celui dont le père est d’origine camerounaise se surnomme l’« habitant indomptable » et se donne la maxime : « mettre ma maison peu importe où je suis. »
Plus loin, trois bureaux éclairés, installés sur la pelouse, attirent l’attention. Alors qu’elle s’affaire à écrire des lettres à sa mère à son bureau, Geneviève Cadieux-Langlois invite le public à s’asseoir et à imiter son geste. « J’avais envie de créer un espace où on allait s’arrêter et prendre le temps de penser aux gens qu’on aime, dont notre mère », exprime la détentrice d’un double baccalauréat à l’UQAM en enseignement des arts visuels et en pratique artistique. « [Les gens] peuvent comprendre le contexte dans lequel je vais faire mes performances et dans quel univers je travaille mon art, se réjouit-elle. Je trouve que c’est une belle occasion pour les collectionneurs de comprendre la globalité de ma démarche. »
L’aspect entrepreneurial
L’été dernier, les 23 artistes ont reçu, en plus d’une bourse de 1000$, une formation reliée à la mise en marché, à l’aide de douze spécialistes. Elle visait à « donner des outils pour les préparer autant à la commercialisation des oeuvres d’art qu’à savoir communiquer, se protéger concernant les notions de droit d’auteur et faire des demandes de bourses », indique M. Loury.
« Parfois, ça devient difficile de se self promote quand tu es laissé à toi-même, explique Colas Eko en racontant la période qui a suivi ses études. Et Artch vient de donner un support. Ça te montre des gens dans le domaine et que c’est réalisable de faire ce travail et gagner sa vie. »
Pour M. Loury, Artch permet « de prendre le pouls des sentiments de ces artistes face à la société, mais aussi face à leur milieu et à la façon dont ils veulent se distinguer auprès de leurs confrères et de leurs consoeurs ».
Des ateliers gratuits de discussion, notamment sur la sensibilisation à l’art contemporain, sont également offerts au public dans le cadre de l’événement.
photo: FÉLIX LEBEL MONTRÉAL CAMPUS
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