La tendance végane n’en est maintenant plus une puisqu’elle a pris d’assaut le marché de la restauration. Les établissements montréalais populaires et même les chaînes de restauration rapide s’appliquent maintenant à rehausser la variété de leur menu en fournissant des options végétaliennes à leur clientèle.
« On a dépassé le temps où on servait tout simplement une salade à ceux qui ne consommaient pas de viande », confirme le responsable des communications et affaires publiques pour l’Association Restauration Québec, Martin Vézina. À la chaîne de restauration rapide A&W, on retrouve désormais le burger Beyond Meat, fait à partir de protéines végétales.
Selon le sondage Tendances 2019, effectué auprès de 500 professionnels et professionnelles de la cuisine au Québec, environ 42 % de l’échantillon affirme vouloir faire une place dans son menu pour un ou plusieurs plats sans protéines animales. Parmi les répondants et les répondantes, 18 % disent vouloir ajouter un plat végétalien dans leur menu.
Une tendance naissante, mais vouée à se répandre, selon M. Vézina. Il constate que ces options attirent également des gens qui sont omnivores ou flexitariens. Ce changement de menu est donc tout à fait naturel pour Martin Vézina. Les établissements ressentent une pression, mais n’y sont pas réticents et y voient une occasion de rehausser leur chiffre d’affaires en attirant une clientèle diversifiée. « La cuisine végane arrive en 5e position des Tendances 2019. Ça représente un début de tendance qui va assurément progresser », constate M. Vézina.
Montréal compte d’ailleurs son lot d’institutions offrant un menu exclusivement végane, du très convivial Aux Vivres, jusqu’au plus chic restaurant LOV. Ces endroits, devenus rapidement très populaires, ont contribué à propulser le régime végétalien vers toutes les tables.
Adhésion en hausse
« C’est un mouvement réel : les gens veulent diminuer leur consommation de viande et de produits laitiers », explique le directeur scientifique de l’Institut des sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie, Sylvain Charlebois.
« On estime qu’il y a environ 900 000 véganes au Canada, âgés pour la plupart de 39 ans et moins » confirme M. Charlebois. Le nombre d’adeptes du véganisme augmentera, puisqu’ils ont de plus en plus d’influence, gagnent plus d’argent et détiennent donc un pouvoir d’achat conséquent auquel s’intéresse le marché de la restauration et de l’alimentation. »
Il indique que la hausse significative du prix de la viande en 2014 a eu son rôle à jouer. « Oui, certains sont vegan, mais pratiquement 4 millions de Canadiens sont simplement flexitariens. Ce nombre dépasse la population montréalaise », avance-t-il. Les flexitariens, des végétariens décrits comme étant ouverts à la consommation occasionnelle de viande, sont une clientèle potentielle pour les restaurants et produits véganes.
Une diète au prix salé
M. Charlebois se dit toutefois préoccupé par les prix exorbitants d’une diète végétalienne, sous l’emprise du marketing. Ce mouvement est parfois traité comme une simple tendance lucrative. L’expert insiste sur le besoin de « démocratiser ce régime qui pour le moment reste dispendieux».
L’industrie de la viande, dans le but de rehausser son image et de s’adapter aux consommateurs et aux consommatrices, aurait avantage, selon M. Charlebois, « à se diversifier, à utiliser des protéines végétales populaires dans leur production, comme des lentilles, et à faire des associations de recettes. »
Le spécialiste de l’agroalimentaire affirme que « puisqu’on a normalisé le mouvement végane, les restaurants ressentent la pression de modifier leur menu. Il suffit d’avoir une personne végétalienne dans un groupe de dix pour influencer le choix du restaurant autour d’un établissement adapté à tous. Il y a 20 ans, l’option végane était peu appétissante, à présent elle est recherchée et pleine de saveurs. »
Par contre, « le défi pour les restaurants qui désirent expérimenter la cuisine vegan, que ce soit dans la restauration rapide ou plus sophistiquée, c’est que l’approche par rapport aux saveurs est différente et les techniques le sont aussi », affirme la cheffe spécialisée dans la haute gastronomie végane et la production de fromage végétalien Chloé Robillard. « C’est un type de cuisine à part entière et il faut l’introduire de cette façon. C’est ce qui déterminera si l’ajout du plat végétalien sera un succès ou pas », ajoute-t-elle.
photo: FÉLIX LEBEL MONTRÉAL CAMPUS
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