Lire son horoscope reste une tradition pour un grand nombre de Québécois, mais le temps où les salles de classe d’astrologie étaient remplies d’apprentis est révolu, laissant l’avenir incertain.
Dépassés par les nouvelles tendances technologiques, les astrologues du Québec ont du mal à assurer leur relève. Si de moins en moins de gens pratiquent l’art de lire le ciel, les curieux continuent d’être attirés par ce domaine mythique pour guider leurs choix personnels et professionnels.
L’ancienne présidente de l’Organisation de recherche interactive en astrologie naturelle (ORIAN), Carole Lalonde, constate depuis quelques années le manque de nouveaux acteurs dans le milieu de l’astrologie. «On a l’impression que tout est en train de mourir. Il n’y a plus de relève, rien ne se passe, personne ne veut diriger les organisations. Notre groupe vieillit et on a l’impression que personne ne veut suivre la formation», relate-t-elle.
Les cours de l’ORIAN se donnaient dans des salles de classe louées à des cégeps. Un parcours typique s’étend sur trois années. La première est consacrée à l’apprentissage du langage de base. C’est à partir de la deuxième année seulement que les étudiants se mettent à interpréter la position des astres. Dans leur dernière année, les élèves peuvent commencer à prédire le futur, en fonction de cartes du ciel. Si les formations ne connaissent plus l’achalandage d’autrefois, c’est en partie parce que le coût des locaux augmente à vive allure et qu’il est plus difficile d’offrir des cours en personne.
Plus d’un facteur expliquent le déclin, selon l’astrologue. «Si on fait un examen de conscience, on se rend compte que nous ne sommes pas ouverts aux gens.» Carole Lalonde fait entre autres référence à l’adoption tardive des réseaux sociaux. Depuis la création de sa page Facebook, ORIAN connaît un peu plus de popularité et sa formation en ligne profite d’une plus importante visibilité. «Les cours à distance deviennent très importants, puisque les gens sont très occupés», ajoute-t-elle.
Les femmes âgées entre 40 et 55 ans correspondent au profil typique de la maigre relève. «Pour les hommes, l’astrologie est une affaire de “bonnes femmes”. Pourtant, les grands astrologues à travers l’histoire ont été en majorité de sexe masculin», évalue Carole Lalonde. Si les bancs d’école de l’astrologie au Québec se vident, la clientèle est toujours aussi intéressée à consulter les lecteurs d’astres. «Depuis la fin de ma formation, je vois environ une centaine de clients par année et la plupart sont des réguliers», confirme l’ancienne étudiante d’ORIAN, Danielle Delisles. Le public est toujours aussi curieux de connaître l’expérience que les astrologues offrent. Carole Lalonde affirme d’ailleurs que de plus en plus de professionnels sérieux, comme des courtiers à la bourse, demandent les services de ceux qui étudient les cartes du ciel. «Il y a beaucoup de grands noms qui consultent les experts de l’astrologie financière. Bien sûr, les noms ne peuvent pas être divulgués. Et puis ça fonctionne, l’astrologie est une science», indique-t-elle.
Pour le physicien et ancien professeur d’astronomie à l’UQAM, Gilles Couture, l’astrologie n’est qu’une source de réconfort. «Ça fait partie de la nature humaine de vouloir prédire le futur. Mais l’astrologie, c’est n’importe quoi», critique-t-il. Alors que les astrologues qualifient leur domaine de scientifique, les experts le critiquent. «En sciences, il faut construire une théorie, puis la vérifier. Il faut faire des expériences encore et encore pour en venir à une seule conclusion. Mais en astrologie, les prédictions sont tellement vagues qu’on peut les interpréter de toutes les façons», continue-t-il.
Danielle Delisles se défend et dit n’avoir rien à prouver. Selon elle, si les techniques enseignées ne proviennent pas d’une école ou d’une institution scientifique, elles seront mises de côté. «En Europe, il y a des écoles réputées où l’astrologie est plus prise au sérieux qu’ici», conclut-elle. Pour l’ancienne présidente d’ORIAN, les conflits entre scientifiques et astrologues ne mènent à rien. «Il est regrettable qu’on se fasse regarder de haut par des professionnels qui auraient avantage à faire appel à l’astrologie», répond-elle.
Un ciel différent
Le physicien note tout de même une grande anomalie dans la technique employée par les astrologues. «Les étoiles se déplacent, explique-t-il. La Grande Ours que nous voyons en ce moment n’est pas la même que celle d’il y a 1000 ou même 100 ans.» Les cartes du ciel utilisées par les astrologues, qui sont anciennes, pourraient donc être erronées. Il faudra de meilleurs arguments pour convaincre Gilles Couture et la communauté scientifique de la légitimité de l’astrologie. «Je veux voir des preuves, mais il n’y en a aucune, déclare-t-il. La prochaine fois que je voudrai connaître mon avenir, je lancerai des dés. Ça aura le même effet que d’aller consulter un astrologue.»
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