Des jeunes gens swignent et chauffent le plancher de danse au rythme des vieux airs venus d’Acadie.
Philippe Jetté pratique la danse traditionnelle depuis plus de 12 ans. Il n’a pourtant rien du vieux pépé se trémoussant sur un air accrocheur que l’on pourrait associer à de la danse folklorique. Quelques fois par semaine, il se rend dans la petite salle de pratique de sa troupe et troque ses running shoes pour des souliers de bois. Un, deux, trois pas, et le voilà qui gigue sur le plancher de danse. Aujourd’hui âgé de 27 ans, Philippe fait partie de ces jeunes danseurs qui font brasser la cabane sur fond de folklore.
«C’est la musique qui m’a graduellement mené vers la danse, explique d’emblée l’artiste. À la base, je suis un joueur d’accordéon.» C’est en suivant des cours avec Martin Mayotte, un professeur réputé, qu’il s’est découvert un véritable amour pour la danse traditionnelle. Président de la troupe folklorique Les Petits Pas Jacadiens depuis plus d’un an, Philippe Jetté bûche fort pour transmettre sa passion. Créé il y a plus de 37 ans dans la région de Lanaudière, le collectif se donne pour mission de transmettre les rudiments des danses anciennes aux plus jeunes. Aux dires du jeune homme, les ateliers de danse traditionnelle organisés toutes les deux semaines attirent une horde de jeunes adultes entre 17 et 30 ans. «En général, ils viennent jeter un coup d’oeil pour rigoler un peu. Très vite, ils embarquent avec nous et finissent toujours par y prendre goût», affirme le danseur lanaudois.
En plus d’être un passe-temps au même titre que le ballet ou le hockey, la danse traditionnelle se veut un moyen efficace de socialiser et de se rassembler. «Il y a véritablement des sentiments d’appartenance et d’identité très fort qui y sont associés», indique Philippe Jetté. Le constat est le même du côté du professeur de danse en ligne Ronald Lacoste. «En général, les jeunes qui vont aux soirées de danse en ligne trippent, commente-t-il. Il n’est pas rare de voir des jeunes se joindre à nous essentiellement pour rencontrer d’autres jeunes comme eux.»
La mal-aimée
Contrairement au swing ou à la danse contemporaine, la danse folklorique a encore des croûtes à manger pour conquérir le coeur de la jeunesse. Plusieurs considèrent cette danse comme étant dépassée. C’est le cas de l’étudiante au Cégep régional de Lanaudière à Joliette, Julie Grégoire, qui n’y a pas trouvé son compte. «Quand je suis allée dans un atelier de danse en ligne, je me suis sentie très quétaine. J’étais entourée de personnes plus ou moins âgées et j’avais honte!», avoue-t-elle à la rigolade.
Pour le professeur Ronald Lacoste, l’incompréhension entourant l’univers de la danse traditionnelle chez les jeunes ne date pas d’hier. «Ce type de danse vient principalement de la culture acadienne, une culture qui touche davantage nos grands-parents, voire nos arrière-grands- parents, beaucoup plus que nos jeunes», observe-t-il. Philippe Jetté est du même avis. «Il s’agit là du jugement typique que les gens posent sur ce qui leur est étranger, comme n’importe quoi», soutient-il.
Ronald Lacoste se réjouit toutefois de la couverture médiatique de plus en plus significative dont bénéficie la danse folklorique, grâce, notamment, aux nombreuses festivités qui s’organisent durant l’été, comme le Festival mémoires et racines à Joliette. Fier de l’ampleur du mouvement, le jeune président des Petits Pas Jacadiens, Philippe Jetté, entrevoit aussi l’avenir de cette danse sous un oeil optimiste. Loin de ranger ses souliers au vestiaire, il s’installe à l’accordéon, tappe du pied et fait danser ses petits jacadiens au rythme d’un air traditionnel.
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Depuis quelques années, la troupe des Petits Pas Jacadiens tente d’élargir son public cible en initiant les enfants de quatre à douze ans. «On essaie progressivement d’incorporer la danse traditionnelle dans les camps de jour durant l’été et les jeunes enfants semblent vraiment s’amuser», explique le président Philippe Jetté La troupe compte actuellement plus d’une trentaine de membres et s’est produite en spectacle un peu partout en Europe.
Crédit photo : Daphné Caron
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