La profession de journaliste n’est pas tant valorisée aujourd’hui. C’est un fait indéniable. Choisir d’incarner la version moderne du Sherlock Holmes, Tintin ou même Scooby-Doo relève d’un grand courage… ou d’une grande naïveté.
Par contre, avant de se jeter dans le vide et de faire du journalisme son gagne-pain, il faut (idéalement) passer par l’université. Et être étudiant en journalisme, ce n’est pas plus facile. Tout comme les «professionnels» sur le terrain, nous – simples étudiants, ambitieux et rêveurs – faisons face aux mêmes préjugés, aux mêmes défis. Toutefois, une chose nous distingue: les attentes du métier.
Justement, la semaine dernière, les étudiants de deuxième et troisième années étaient cordialement invités à une rencontre de 45 minutes avec George Kalogerakis, le directeur de l’information du Journal de Montréal. Le but de cette rencontre: nous sensibiliser aux possibilités d’emplois et expliquer comment ce quotidien – le plus lu à Montréal soit dit en passant – est conçu dans cette ère de multiplateformes.
Au total, huit personnes des deux cohortes se sont pointées au rendez-vous. Depuis le début de notre baccalauréat, professeurs et conférenciers nous font part de leur malaise vis-à-vis du quotidien. Comme quoi le Journal de Montréal, c’est la définition même de la paresse journalistique et qu’il s’agit d’un excellent papier toilette lorsqu’on n’en a plus à la maison.
Voilà que le directeur de l’information vient (essayer) de remettre les pendules à l’heure… et seulement huit personnes semblent intéressées par le débat?
J’ai pensé trop vite… Après ces 45 minutes de torture, je suis plutôt rassuré de ne pas avoir été au milieu de ce qui aurait pu être un bain de sang.
George Kalogerakis arrive dans la salle, épaules droites et sourcils froncés. Il fait un tour de table rapide, semble distrait, regarde à droite et à gauche… Bref, un accueil des plus chaleureux.
Nous avons eu le droit de sa part à un discours mal ficelé, limite troublant. Comme quoi le Journal de Montréal, c’est un journal «le fun», rien d’autre. Qu’au Journal, on s’insulte entre collègues, on se dit des niaiseries, parce que c’est drôle, qu’on n’est pas stressé, qu’on se connait tous de toutes les façons. HAHA, LOL, LMAO… c’est si drôle! Sauf que moi, je ne riais pas avec lui, mais bien de lui.
J’ai fait un stage de 12 semaines dans votre publication en septembre dernier, M. Kalogerakis. J’ai fait partie de l’équipe, comme on dit. Je suis désolé, mais vous avez dressé un faux portrait du Journal de Montréal. Lors de cet emploi temporaire, j’ai été témoin d’une organisation impeccable, d’un travail respectable, d’une publication qui mérite sa place sur les tablettes aujourd’hui et qui a réussi à se relever après avoir bravé un lockout de 764 jours. Malgré cet important conflit de travail, le lectorat n’a cessé de monter. N’est-ce pas le symptôme d’une raison d’être indéniable?
À la place, nous avons eu droit à des phrases telles que (je paraphrase ici) «les journalistes ne sont pas obligés de se rendre dans la salle de nouvelles, les Blackberry et ordinateurs portables dotés d’une clé 3G Internet méga haute vitesse permet de transférer l’information n’importe où ils sont». Ainsi, on peut même faire son journal depuis un Costco.
Ce qui m’attriste le plus dans cette histoire, M. Kalogerakis, c’est que cette réunion avait pour but de chasser les nuages qui sèment la tempête dans votre journal depuis trop longtemps. Si Sherlock Holmes faisait le tour du monde pour enquêter, si Scooby-Doo et son meilleur ami Shaggy affrontaient les maisons hantées pour démasquer le coupable… le journaliste d’aujourd’hui est en pantoufles, chez lui, pépère, et risque même de faire la front page le lendemain matin. C’est un constat plutôt dur à avaler.
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Dans un tout autre ordre d’idée, je tiens à féliciter Isabelle Gaston, l’ex-conjointe du cardiologue Guy Turcotte, pour son courage et son témoignage crève-cœur lors de son passage à l’émission Tout le monde en parle.
Isabelle Gaston, qui a perdu ses deux enfants de 5 ans et 3 ans, tués par leur père, s’est toutefois trouvé un nouveau combat: la bonification de l’indemnisation versée aux victimes d’actes criminels.
Ce que j’admire dans sa démarche, c’est son altruisme. Si ce n’est déjà fait, rendez-vous sur le site Internet de l’Assemblée nationale du Québec pour signer sa pétition. Avant de mettre sous presse, plus de 22 800 personnes avaient donné leur appui à Mme Gaston.
Ewan Sauves
Chef de pupitre Société
societe.campus@uqam.ca
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