Des muséologues se disent inquiets pour l’avenir des musées québécois

À partir du 2 mars prochain, il ne sera plus possible pour les personnes de 20 ans et plus d’aller au musée gratuitement les premiers dimanches du mois. Face à cette nouvelle mesure, des muséologues s’inquiètent pour l’avenir des musées québécois.

Annoncée par le ministère de la Culture et des Communications le 27 janvier dernier, cette décision a bouleversé le monde de la muséologie au Québec. « C’est un gros choc pour la communauté, un choc que j’ai ressenti quand j’ai vu passer la nouvelle », exprime Frédérique Leblanc, étudiante à la maîtrise en muséologie à l’UQAM.

Des pertes importantes

Depuis son instauration en 2018, la gratuité universelle dans les institutions muséales les premiers dimanches du mois a contribué à une hausse de la fréquentation des musées de 35 %. La professeure en muséologie à l’UQAM Anik Meunier explique que les institutions muséales reçoivent des subventions de la part du ministère de la Culture et des Communications pour mettre en place des activités culturelles et des expositions et pour permettre la gratuité tous les premiers dimanches du mois. 

Le directeur général de la Société des musées du Québec (SMQ), Stéphane Chagnon, explique que cette mesure« va réduire l’accessibilité dans les musées » puisque les parents et grands-parents « vont devoir payer le plein tarif ». Désormais, moins de familles les fréquenteront, ce qui représente une perte de revenus importante pour ceux-ci. 

Selon la SMQ, la fin de la gratuité universelle signifie une baisse importante de la fréquentation locale. « 60 % des gens qui allaient au musée le premier dimanche du mois étaient des locaux, des gens de la communauté », ajoute M. Chagnon. 

 « Les premiers dimanches du mois représentaient pour certains 10 à 25 % de leurs revenus annuels. Il se peut que les institutions muséales doivent réduire leurs heures d’ouverture et faire moins d’expositions»

Stéphane Chagnon

La jeune clientèle

Le ministère de la Culture et des Communications soutient que la gratuité pour tous dans les musées les premiers dimanches du mois a connu un grand succès depuis sa mise en place en 2018. Cependant, les budgets qui lui sont alloués sont insuffisants pour conserver cette mesure. Le ministère réserve la gratuité aux moins de 20 ans, pour encourager les jeunes à « développer et diversifier leurs habitudes culturelles ».

Anik Meunier cite des études montrant que les adolescent(e)s visitent les musées gratuitement lors de sorties scolaires, mais y vont rarement la fin de semaine. Ils et elles bénéficient peu de la mesure de gratuité. 

« Je trouve que c’est illogique de donner la gratuité à [un groupe d’âge] qui n’y va pas », tranche Frédérique Leblanc.

Le cas des petits musées

« Les petits musées et les musées en région seront plus affectés [par cette mesure]. Elle va déstabiliser leur planification financière et la programmation des activités culturelles et éducatives », indique Anik Meunier.

Christine Bernier, professeure spécialisée en études muséales, explique que les petits musées ont des partenariats avec de grandes institutions muséales. Ils empruntent des collections et reçoivent des expositions itinérantes. La fin de la gratuité universelle signifie que les petits musées perdront  « l’aide des musées grands frères ».

Les musées en région éprouvent déjà des difficultés financières. Le 23 janvier dernier, le Musée régional de Rimouski a annoncé la fermeture de ses portes pour une durée indéterminée. La nouvelle mesure risque d’empirer les déficits financiers qui touchent les institutions muséales en région. « Cette coupe budgétaire s’ajoute à d’autres coupures. On parle de la mort des institutions muséologiques québécoises», s’insurge Mme Bernier.

Christine Bernier déplore cette mesure en évaluant les conséquences négatives qu’aura la fin de la gratuité universelle sur les musées québécois . « Il faut s’inquiéter de la manière dont le ministère de la Culture et des Communications gère la sphère muséale du Québec à l’heure actuelle », déclare-t-elle.

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