Exploration urbaineUne pratique régie par la communauté

« À partir du moment où on entre [dans un lieu] par effraction, c’est un crime », prévient Manuel Couture, relationniste au Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM). L’exploration urbaine, ou urbex, est une pratique qui gagne en popularité depuis plusieurs années, mais elle présente plusieurs dangers tant sur le plan physique que légal.

Cette pratique consiste à explorer des bâtiments souvent en ruine et abandonnés, dont l’accès est généralement interdit au public. Malgré son illégalité, plusieurs règles officielles et non écrites régissent l’urbex au Québec.

Bien qu’il n’existe pas de lois mentionnant spécifiquement l’exploration urbaine dans la province, « les règles viennent du Code criminel, dans lequel on parle d’effraction », indique M. Couture. « Les immeubles abandonnés appartiennent toujours à quelqu’un. Briser des trucs pour entrer ou [en briser] une fois dedans, ça représente des méfaits. »

Il est facile de se mettre au courant des lois encadrant l’urbex au Québec. Une recherche sur Internet suffit pour trouver un avertissement publié sur le site web québécois pour amateurs de photographie urbaine et rurale, Urbex Playground. « En aucun cas, Urbex Playground ne vous invite à visiter ces lieux sans le consentement de ses propriétaires […] et y pénétrer peut se résulter par des actions juridiques contre vous. »

Les règles officielles

Les urbexeurs et urbexeuses sont bien au courant de la législation. « Les lois, c’est facile à trouver, c’est l’infraction de propriété privée », affirme Philippe Rosset-Balcer, un étudiant montréalais au cégep de Drummondville ayant pratiqué l’urbex durant son adolescence.

Sans loi spécifique sur l’exploration urbaine, les peines imposées aux urbexeurs et urbexeuses varient beaucoup. « Des fois c’est juste une amende, des fois c’est une poursuite judiciaire » , souligne Chantal Charest, photographe d’urbex.

Selon l’explorateur et l’exploratrice urbain(e)s, s’il y a bien une manière de s’attirer des ennuis, c’est de se faire prendre avec du matériel suspect. « Tu ne veux pas te faire pogner avec des outils pour casser quelque chose pour entrer », précise Philippe Rosset-Balcer.

Les règles de la communauté

« En urbex, la seule trace que tu vas laisser, c’est des traces de pas […] Tu ne touches à rien, tu ne brises rien », affirme Chantal Charest. « Là, il y a des gens qui y vont à trop et c’est dans ces cas-là que les lieux se font abimer. »

Selon Philippe Rosset-Balcer, il ne faut « surtout pas passer le mot à tout le monde » lorsque l’on fait une découverte.

« Je n’aime pas que les jeunes aillent prendre des photos et des vidéos. Ils entrent là en groupe de cinquante »

Philippe Rosset-Balcer

L’étudiant reproche à ces jeunes de publier des vidéos qui encouragent les gens à reproduire leurs comportements dangereux et nocifs à l’égard de la communauté.

« C’est là qu’il y a des accidents qui peuvent arriver », avance Philippe Rosset-Balcer. 

Dans une vidéo Instagram, on voit une trentaine de jeunes s’infiltrer dans un bâtiment dont l’entrée est interdite. Ils et elles filment même les policier(e)s dans la rue juste en bas. Les commentaires de la communauté d’urbex sont pleins de reproches. « Le spot va être dead à cause de vous », réprimande un(e) internaute.

Respecter les lieux explorés est pourtant payant pour les explorateurs et les exploratrices qui souhaitent éviter les démêlés avec la justice. « Nous, on s’en tirait à chaque fois », raconte Philippe Rosset-Balcer. Il assure ne jamais avoir rien brisé et ne jamais avoir eu de problèmes avec la sécurité. « [Les agent(e)s de sécurité] nous laissaient partir avec un avertissement. »

Les dangers pour les novices

L’enjeu de la sécurité des novices et des jeunes adeptes de l’urbex inquiète le SPVM. « Il y a des bâtiments dangereux, les gens se blessent très gravement et il faut faire des sauvetages. Les gens se mettent vraiment en danger sans le savoir. Par exemple, ils se rendent dans des égouts où il n’y a pas d’oxygène », déplore Manuel Couture du SPVM.

Bien qu’une réponse positive ne soit pas assurée, il est possible de demander la permission de visiter les lieux aux propriétaires des bâtiments. Cela élimine ainsi les risques d’être accusé d’entrée par effraction. 

« Je sais que les gens recherchent l’adrénaline. Demander avant [aux propriétaires] peut enlever ça, mais il faut toujours être prudent et essayer de trouver des endroits moins à risque », conseille Manuel Couture.

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