Dossier IALes étudiant(e)s en graphisme subjugué(e)s par l’IA

Devant la vague d’IA, les étudiant(e)s du Baccalauréat en design graphique et expériences visuelles s’adaptent pour survivre. Ils et elles acceptent la restructuration du métier à venir, malgré quelques réticences. 

« Le métier de designer va toujours exister », affirme sans détour Richard Pion-Larochelle, étudiant au Baccalauréat en design graphique et expériences visuelles. C’est avec les yeux pétillants qu’il décrit au Montréal Campus l’avenir qu’il envisage pour son métier. 

Certes, certains emplois n’existeront plus à cause de l’IA, admet Richard Pion-Larochelle, en prenant l’exemple de ses ami(e)s musicien(ne)s qui ont utilisé Midjourney pour une pochette d’album. « Les contrats d’illustrateurs vont partir en premier », reconnaît-il.

Toutefois, il est d’avis que le progrès fulgurant de l’IA n’est pas synonyme de la fin du métier, même s’il amène son lot d’incertitudes. Il oblige plutôt une redéfinition du rôle de graphiste.

Son professeur et directeur du programme, Sylvain Allard, abonde dans le même sens. Les compétences pratiques ont laissé place à des habiletés de jugement visuel, considère-t-il. 

« Plus besoin d’énormément d’habiletés techniques pour faire un triangle équilatéral [avec l’IA]. Lorsqu’il faut choisir entre quatre images, il faut avoir un regard critique sur l’image, une sensibilité visuelle. Nous, c’est ce qu’on enseigne à l’UQAM. » 

L’IA ou l’humain ?

Pourquoi employer un(e) graphiste si l’IA peut faire le même travail pour moins cher ? La question dérange. Pour Raphaël Vanasse, étudiant au Baccalauréat en design graphique et expériences visuelles, il est inévitable que les entreprises avec un budget plus serré se tourneront vers l’IA ; et ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose pour les graphistes. 

« Les grandes agences montréalaises ou les sociétés d’État ne pourront pas utiliser l’IA, car elle ne peut rejoindre tous les points qu’un designer amène », argumente-t-il. 

L’émotion et les accidents techniques rendent l’image unique ; c’est ce qui distingue un contenu généré par l’IA de celui fait par l’humain(e), explique Sylvain Allard. 

Il avance également que les tendances sont fondées par des jeunes qui repoussent les normes établies. « J’ai de la difficulté à concevoir des tendances émanant de l’IA, parce que c’est du ressenti, de l’intuition. »

Quelques bémols

Malgré une grande confiance en la capacité du métier à se réinventer, l’inquiétude perdure chez une partie des étudiant(e)s en design. La vitesse de l’évolution de l’IA fait parler d’elle. 

Richard Pion-Larochelle s’interroge sur ce que fera la relève en design si les outils avec lesquels elle s’est familiarisée pendant sa formation deviennent désuets dans 10 ans. « [Pour être prêt pour le marché du travail], est-ce que je devrais apprendre à maîtriser Midjourney ? Dall-E ? Photoshop ? », se demande-t-il. 

Pour sa part, Raphaël Vanasse se préoccupe de l’enjeu des droits d’auteur. « Si je prends de l’inspiration de six œuvres et que j’en crée une autre, est-ce que l’image m’appartient ou un sixième appartient à chacun ? », se questionne-t-il. Difficile de se positionner quant à ce qui devrait définir le droit d’auteur avec l’IA, selon lui. 

L’IA comme outil

Plusieurs designers, comme Richard Pion-Larochelle, utilisent ChatGPT pour générer un texte sommaire rapidement, en attendant la version finale du texte envoyé par un(e) client(e). Il est ainsi plus facile pour eux et elles de visualiser les éléments graphiques se juxtaposant au texte, sur un produit comme un dépliant ou une affiche.

Sylvain Allard utilise l’IA dans ses cours pour créer des images précises. « Au lieu de chercher une image longtemps, je la crée moi-même. » 

Richard Pion-Larochelle se sert aussi de l’IA pour agrandir les photos. « Si c’est une photo en format portrait, mais que tu la veux en format paysage, l’IA peut remplir le reste de la photo. »

Pas la première révolution 

L’appareil photo, Internet, les réseaux sociaux… L’industrie du graphisme n’en est pas à son premier bouleversement majeur. Sylvain Allard relativise la peur de l’arrivée d’un nouveau joueur. « Même si le média change, notre but de communiquer avec des images ne change pas. » 

« Les peintres avaient peur que les photographes prennent leur place. Aujourd’hui, c’est deux compétences différentes », constate Raphaël Vanasse, avec la même lueur optimiste que son collègue Richard Pion-Larochelle au fond des yeux.

Qu’est-ce que Midjourney ?

Midjourney est une IA générative qui crée des images à partir d’une description textuelle sur Discord, une plateforme de clavardage en ligne initialement conçue pour les gamers.  

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *