Espace NISKADes étudiant(e)s autochtones soulèvent des enjeux de visibilité et d’appartenance

Tout près de la cafétéria du pavillon Hubert-Aquin et de la bibliothèque centrale, le local NISKA offre un espace de repos et de travail ainsi que des services aux étudiant(e)s autochtones de l’UQAM. Cependant, son faible taux d’utilisation soulève des enjeux d’identité et d’appartenance au sein de la communauté.

Parmi les services offerts par le NISKA, créé en 2018, les étudiant(e)s autochtones peuvent bénéficier de mentorat, d’accompagnement personnalisé et de soutien en français. 

« Les personnes autochtones, surtout celles qui arrivent de leur communauté, n’ont pas nécessairement tous les repères ou outils pour pouvoir bien intégrer un monde universitaire où on peut perdre beaucoup de points sur la langue écrite », explique Loryane Fontaine, Innue membre de la communauté Matimekush-Lac John et étudiante au Baccalauréat en enseignement du français langue seconde qui offre du soutien en français au NISKA. 

De nombreuses activités sont organisées au cours de l’année, telles que des cercles d’entraide et de partage, dont certains sont ouverts aux allochtones.

Quand on entre au NISKA, il y a deux ou trois personnes, tout au plus. « On est bien placé parce qu’on est un peu au centre de tout, mais c’est aussi un désavantage parce qu’on l’est tellement qu’on passe inaperçu », explique Loryane Fontaine.

Selon les étudiant(e)s rencontré(e)s au NISKA, la basse fréquentation du centre est attribuable en partie à l’aménagement de ce dernier. Ils et elles proposent que le manque de fenêtres, d’espace et d’insonorisation dans le local en sont la cause « Mais au moins, on a un espace », précise Loryane Fontaine.

Philippe Bélanger-Landry, un étudiant Cri, membre de la communauté Brunswick House en Ontario, offre des services de mentorat au NISKA. Il explique que les statistiques du nombre d’étudiant(e)s autochtones à l’UQAM reposent sur un système d’autodéclaration. 

Selon les estimations du NISKA, seulement une vingtaine des 100 étudiant(e)s autodéclaré(e)s participaient aux activités ou venaient régulièrement au centre l’an dernier. Malgré tout, Philippe Bélanger-Landry remarque une progression : « de plus en plus de personnes s’intéressent au NISKA ».

Insécurité identitaire

Selon Malorie Yawenda Picard, une étudiante Wendate, membre de la communauté de Wendake et habituée du NISKA, la faible fréquentation du centre pourrait être liée au sentiment de non-légitimité de certain(e)s étudiant(e)s autochtones.

« Moi, je suis la troisième génération. Est-ce que j’ai  le droit d’être ici ? C’est ça la grosse question »

Malorie Yawenda Picard

Depuis environ cinq ans, elle a commencé à se défaire de certaines croyances et à renouer avec sa culture. « C’est fini l’autochtonisme dans la nation Wendat, ils sont complètement assimilés », croyait-elle, n’ayant pas grandi en communauté. Ces idées, Malorie Yawenda Picard les alimentait avec les bribes d’information qu’elle entendait dans sa famille par-ci par-là. 

Tout comme Malorie Yawenda Picard, Loryane Fontaine a fait face à un enjeu d’appartenance n’ayant pas grandi à Matimekush-Lac John [sa communauté]. Au cours de son parcours scolaire, elle ne trouvait pas d’espaces « autochtones » où rencontrer des gens comme elle.  Les deux femmes ne partagent donc pas la réalité, les références et certains enjeux de ceux et celles qui ont grandi dans des communautés autochtones.

« C’est toujours une question d’identité, on ne se trouve pas assez autochtone », explique Loryane Fontaine. Le NISKA est un espace où elle peut rencontrer des gens qui partagent des préoccupations similaires. Elle s’y sent comprise sans devoir expliquer ou éduquer les gens qui s’y trouvent aux  défis historiques et actuels des Premiers Peuples. 

Pour Malorie Yawenda Picard, se libérer du sentiment d’imposteur est un long cheminement intérieur. « Ces étudiants-là qui sont comme moi, qui ont cette appartenance-là, l’affirmer, la nommer en venant ici [au NISKA], c’est quelque chose », déclare-t-elle. Venir au centre est une forme de participation à la décolonisation des Premiers Peuples pour elle. « Je sens que j’ai un devoir de participation à quelque chose .»

Solidarité et partage

Philippe Bélanger-Landry précise que l’équipe du NISKA tente de favoriser le « bien-être culturel ». Ceci passe par la bienveillance et par le respect dans les échanges ainsi qu’en donnant l’opportunité aux étudiant(e)s de proposer des activités. Le but est qu’ils et elles aient l’opportunité de partager différents aspects de leur culture ou de leurs expériences avec le reste de l’université, explique-t-il.

Le fait que les postes de soutien soient occupés par des étudiant(e)s autochtones est un facteur clé, selon Philippe Bélanger-Landry. D’après lui, il est important qu’il y ait une réalité partagée entre les gens qui fréquentent le centre.

Loryane Fontaine et Philippe Bélanger-Landry expliquent que si un(e) étudiant(e) allochtone souhaite soutenir le NISKA, le mieux est de participer aux activités « pour tous » que le centre organise.

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *