Sortez votre chapeau et vos bottes western, la musique country est plus populaire que jamais au Québec. Cette année, deux des cinq artistes les plus écoutés dans la province sont issus de ce genre musical, en comparaison à zéro en 2021, selon un récent rapport de l’Institut de la statistique du Québec.
« Enfin, ça fait du bien ! », s’extasie l’auteure-compositrice-interprète et ex-animatrice à la radio, Karo Laurendeau, euphorique de voir son genre musical chéri au sommet des palmarès.
Mené par des chanteurs américains comme Morgan Wallen, Luke Combs et Zach Bryan, le country a connu une grande montée en popularité au Québec – comme partout dans le monde. D’après le rapport de la firme d’analyse de données Luminate, la consommation de ce genre musical a augmenté de 22 % au cours des huit premiers mois de 2023 en Amérique du Nord, ce qui en fait le deuxième genre musical à la croissance la plus rapide, derrière les musiques du monde.
Originaire des Appalaches, aux États-Unis, et popularisée ici au milieu des années 1940 grâce à Willie Lamothe, Paul Brunelle et Marcel Martel, la musique country a souvent été perçue comme clichée. Pour Mme Laurendeau, c’est maintenant chose du passé.
« Le monde s’assume de plus en plus. Avant, je croisais des gens qui me disaient : “moi j’en écoute, mais seulement dans mon auto”. Avec l’arrivée du courant new country, les jeunes adhèrent de plus en plus à ce style de musique. »
Un country transformé
Dans cette résurgence, un créneau en particulier se démarque et y contribue grandement : le new country, une version plus accessible du genre, au confluent de la pop et du rock. « Morgan Wallen est un des meilleurs exemples. Il amène le country ailleurs, dans une avenue plus pop », explique le chanteur et compositeur québécois Matt Lang.
Au cours des dernières années, le nombre de chansons country propulsées à la radio a explosé. Face à l’engouement des auditeurs et des auditrices envers le new country, les stations de radio n’ont eu d’autre choix que d’en incorporer davantage dans leur programmation. Plusieurs grands diffuseurs comme WKND 99.5 (Montréal) et FM 103,3 (Longueuil) ont ajouté à leur grille horaire des émissions entièrement dédiées à ce style musical.
« En 2021, j’étais un des premiers francophones à jouer dans les grosses radios. Avant, il n’y en avait pas. Il y a tellement de variétés de country maintenant, c’est plus accessible », indique Francis Degrandpré, récipiendaire du Félix de l’album country de l’année lors du Premier Gala de l’ADISQ 2023. « Il y a une grosse différence maintenant, la musique country, c’est tellement rendu large. Ce n’est plus juste du country western ou de la Côte-Nord, on parle maintenant de country pop, folk ou rock », ajoute-t-il.
Des chansons comme « Last Night » de Morgan Wallen, ainsi que « Fast Car » et « The Kind of Love We Make » de Luke Combs, ont fait vibrer les radios de la province tout au long de la période estivale.
Pour Mme Laurendeau, il reste encore beaucoup de chemin à faire pour que la musique country obtienne la place qu’elle mérite dans les radios, bien que son temps d’antenne ait augmenté. « Je pense qu’il y a une belle porte ouverte pour qu’on en entende plus, mais la diffusion n’est pas facile. Plus les gens vont en demander, plus ils vont en entendre. »
« Le country, ç’a un côté très rassembleur, on a vraiment besoin de ça ! » – Karo Laurendeau, artiste country
Le rodéo arrive en ville
La folie pour le country ne se fait pas seulement ressentir sur les plateformes d’écoute en ligne et à la radio : les évènements liés à cette musique sont également en pleine croissance. Audray Johnson, responsable de la programmation de LASSO, un festival de musique country à Montréal, a vu le nombre de billets vendus doubler lors de la deuxième édition, à l’été 2023. « Nous savions que la présence de Chris Stapleton allait attirer beaucoup de personnes, mais nous ne nous attendions pas à doubler nos ventes par rapport à la première année. Nous étions agréablement surpris, et c’est signe que le country est de plus en plus populaire », explique-t-elle.
De plus en plus d’artistes américain(e)s de renoms ajoutent le Québec à leurs tournées, énième preuve que la fièvre du country y est bel et bien réelle. À chaque fois, les Québécois et les Québécoises font salle comble. « Ces artistes foulent les stades et battent des records. Luke Combs, par exemple, lors du Festival d’été de Québec en 2021, a battu le record d’assistance de Metallica avec environ 90 000 spectateurs », témoigne Matt Lang, lui qui était sur la scène des plaines d’Abraham avant l’arrivée de la vedette.
Plus essentiel que jamais
Selon Matt Lang, les Québécois et les Québécoises, qui ont eu plus de temps pour découvrir de nouvelles passions en temps de pandémie, se sont laissé tenter par le country et ont été charmé(e)s par sa simplicité. « Les gens ont compris que le country, c’est simple. Ça s’écoute si bien avec une bière », soutient-il. Rapidement, les gens se sont rabattus sur la musique country comme source de réconfort et ont adopté le style qui s’y rattache. « Ils en écoutent, mettent des chapeaux de cowboy, des bottes et des coats de jeans », dit M. Degrandpré.
Une relève prometteuse
« Avec notamment Grande Ourse, un collectif de sept jeunes talents d’ici, la relève du country est très inspirante. Elle propose un son actuel qui sait plaire aux 20 à 30 ans », affirme Karo Laurendeau, extrêmement optimiste quant à l’avenir de son genre musical dans la province. Audray Johnson se montre aussi très positive concernant le futur du country au Québec.
« Il y a un talent incroyable qui se développe en ce moment, plein de jeunes artistes motivés, talentueux, passionnés qui nous montrent que le country, ce n’est pas nécessairement l’image qu’on s’en était fait. Nous allons en entendre de plus et plus et je pense que ça pourrait éventuellement faire partie de notre culture populaire de manière plus assumée », s’exclame Mme Johnson.
Mention photo : Élizabeth Martineau
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