FNC : les Atikamekws réclament justice

Plongées en plein cœur d’une affaire judiciaire non résolue qui a profondément marqué la communauté atikamekw de Manawan, les familles des victimes recherchent toujours justice et vérité 46 ans après le crime. C’est ce que raconte Soleils Atikamekw, présenté en ouverture de la compétition nationale de la 52e édition du Festival du Nouveau Cinéma (FNC).

Dans ce long-métrage, la réalisatrice Chloé Leriche illustre un événement tragique qui a marqué la communauté atikamekw. Le film se présente comme un témoignage authentique, s’efforçant de refléter la vérité de manière fidèle. Frôlant la frontière entre la fiction et le documentaire, Soleils Atikamekw présente de réels témoignages de la communauté atikamekw de Manawan.

Le film nous transporte en 1977, à Manawan, lors d’un matin funeste où cinq personnes atikamekw auraient été noyées à l’intérieur d’un véhicule englouti au fond d’une rivière où se trouvaient également deux Québécois qui ont réussi à s’en extirper. Pour les Atikamekws, ce qui aurait dû être reconnu comme une tragédie injuste a été étiqueté comme un accident par une Sûreté du Québec (SQ) marquée de racisme systémique, selon la communauté.

L’affaire est tombée dans l’oubli, laissant la communauté blessée non seulement par le drame initial, mais aussi par l’inaction et, parfois, le mépris des autorités. Cet abandon se transpose même dans le film, où les représentants de la SQ dénigre les jeunes Atikamekws en les surnommant « les Indiens » et en les dénigrant ouvertement.

Le drame de 1977

Le matin du 26 juin 1977 où la SQ se rend aux abords de la rivière du Milieu pour repêcher la camionnette qui s’y est enfoncée, les policiers arrêtent un couple de la communauté atikamekw et forcent le jeune homme du couple à ouvrir l’arrière du véhicule pour identifier les corps des victimes. 

Quand le jeune homme ouvre la porte arrière de la camionnette, il découvre les corps entassés des cinq jeunes. Sous le choc, il tente de fuir la scène, mais les policiers le forcent à regarder les corps et à les identifier un à un. 

Lors du FNC, les familles des victimes et des membres de la communauté atikamekw se trouvaient au fond de la salle du cinéma Impérial où était présenté le film. À la diffusion de cette scène, plusieurs personnes se sont mises à hurler et ont éclaté en sanglots. Certaines ont même quitté la salle quelques minutes pour reprendre leur souffle. La preuve que même 45 ans après les faits, les plaies sont encore ouvertes.

La douleur déchire les personnages, ils et elles hurlent par moment, mais vivent ce deuil dans un silence assourdissant. La communauté est très soudée, les membres sont présents et présentes pour les autres et veillent sur les familles proches des victimes.

En quête de vérité

Soleils Atikamekw démontre la nécessité de rétablir la vérité et la justice lorsque de tels événements surviennent. 

Les jeunes Québécois blancs suspectés expliquent dans le film que la camionnette a malencontreusement glissé dans le lac et qu’ils ne sont pas responsables de la mort des cinq victimes. Ils se sont extraits du véhicule sans chercher à secourir les cinq autres personnes. Dans leur déclaration, ils mentionnent avoir bu un café avant de se rendre au poste de police pour déclarer l’accident. Un café mal digéré par les familles des victimes qui ne comprennent pas pourquoi ils ne se sont pas pressés d’appeler les secours.

Malgré une réouverture de l’enquête en 2016, près de 40 ans après les faits, la situation est restée inchangée et laisse un goût amer à la communauté atikamekw. 

La réalisatrice Chloé Leriche offre un témoignage poignant de cette injustice. Son film est marqué par une grande sensibilité, tant dans sa réalisation que dans son scénario, qui évite habilement les pièges du sensationnalisme. 

Les images fortes se fondent dans un réalisme éloquent. L’une d’elles, par exemple, montre les camarades des victimes assis(e)s au bord du lac du Milieu après la découverte du véhicule submergé, tandis qu’un filet d’eau s’écoule du coffre ouvert à côté d’eux : la scène poignante parle davantage que des mots.

Mention photo : Soleils Atikamekw

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