Les Noces de Figaro : unir classique et succès

Malgré des stratégies promotionnelles quelque peu discordantes pour tenter de renouveler son public, le premier spectacle de la saison 2023-2024 de l’Opéra de Montréal (OdM) parvient à atteindre sa cible. L’opéra italien Les Noces de Figaro, présenté du 23 septembre au 1er octobre à la Salle Wilfrid-Pelletier, demeure envoûtant, tant pour un public convaincu d’avance que pour un ne l’étant pas.

Il aura fallu plus d’une décennie avant que la scène culturelle montréalaise accueille à nouveau Les Noces de Figaro de Wolfgang Amadeus Mozart, sur un livret de Lorenzo da Ponte. L’histoire raconte celle du mariage  rocambolesque de Figaro et Susanna, respectivement valet de chambre et dame d’honneur d’un riche couple de nobles : les Almaviva. 

Le comte Almaviva, brûlant de désir pour Susanna, menace de jouer les trouble-fêtes et de perturber le mariage de ses caméristes. Figaro et Susanna se doivent d’user de ruses pour déjouer les manigances du comte et tenter de maintenir leur mariage. Chose qui s’annonce ardue pour les fiancé(e)s qui, comme tous les personnages, feront face à des supercheries semant le désordre le plus total.

L’intemporel humour des Noces de Figaro

Même si le livret (texte) des Noces de Figaro date du XVIIIe siècle, il demeure doté d’un grand humour qui ne s’est ni démodé ni effrité. L’enchaînement incessant de quiproquos et d’imbroglios ne peut qu’arracher rire et sourire au public, qui semblait particulièrement réceptif lors de la première, le 23 septembre dernier.

Le baryton Leon Košavić (Figaro) et la soprano Andrea Núñez (Susanna) offrent une performance tout en nuances, jonglant avec brio entre la comédie et la prestance inévitable des opéras. Les comédiens et les comédiennes balancent cet aspect comique tout en gardant l’étiquette de leurs personnages, tous issus de la noblesse.

La mise en scène mérite également d’être applaudie. Ses décors, massifs et changeants, séparent brillamment les actes et les lieux du spectacle tout en maintenant une esthétique cohérente tout au long du spectacle. Les jeux et puits de lumières sont à souligner, créant des ombres particulièrement réussies, notamment lors des solos de la comtesse Almaviva, interprétée par la soprano Kristen MacKinnon. La cantatrice enchaîne sans embûche les tours de force, livrant des performances vocales hors de ce monde, ayant même par moment à chanter couchée, et ce, même sans que cela ruine sa performance grandiose.

Étant interprété en version originale italienne, l’opéra-comique offre un surtitrage bilingue qui contribue grandement à augmenter le caractère accessible d’un art souvent perçu comme intimidant pour les non-initié(e)s. L’œuvre de trois heures gagne en compréhensibilité par la traduction en direct de ses paroles italiennes : une approche qui offre une meilleure clarté tout en maintenant la beauté lyrique et séraphique des chants opératiques italiens.

Une promotion et un spectacle en divergence

Malgré l’humour grand public des Noces de Figaro, l’opéra et sa direction de la part de l’OdM conservent une voix codée de convention et de tradition – ce qui n’est pas intrinsèquement une mauvaise chose. Les costumes, le jeu des comédiens et des comédiennes, la structure narrative et l’interprétation des morceaux sont tous fidèles à ce que l’on s’attendrait des Noces de Figaro : une approche remplie d’échos à des aspects plus traditionnels. L’opéra-comédie présente entre autres des costumes d’époque efficaces – tenues de valet d’antan, longues robes rappelant la noblesse du XVIIIe siècle – mais qui ne réinventent pas la roue.

Cependant, la direction somme toute conservatrice de la production s’oppose à sa promotion grandement teintée de codes queers. Les affiches et les vidéos promotionnelles de l’opéra montrent une tournure moderne qui sous-entend une certaine dose de remaniement de l’opéra classique, alors que ce n’est pas le cas. L’absence de changement en soi n’est pas un reproche, mais elle étonne lorsque mise en parallèle avec la promotion vendant une modernité et une diversité qui, au final, sont absentes.

Les Noces de Figaro est présenté à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts du 23 septembre au 1er octobre. Interprété par l’Opéra de Montréal et l’Orchestre Métropolitain, le spectacle est dirigé par Nicolas Ellis, qui signe sa première direction d’orchestre pour l’OdM.

Mention photo : Vivien Gaumand

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