Répondre à des questions de culture générale à travers une activité compétitive et ludique ? Ce désir est réalisable grâce à Génies en herbe, un jeu-questionnaire réunissant des adeptes du primaire et du secondaire, tout comme des membres de ligues supérieures. Au grand dam de plusieurs participants et participantes, aucune ligue strictement universitaire n’est actuellement mise en place.
Si Génies en herbe s’avère aujourd’hui être une activité accessible et ouverte, y participer semblait bien plus complexe à sa création. S’inspirant d’un concept similaire, mais en anglais, la chaîne de télévision Radio-Canada lançait en juin 1973 son émission Génies en herbe, invitant des élèves du secondaire provenant de partout au Québec à s’opposer dans des parties de quatre contre quatre.
L’histoire, la géographie, les sciences, la musique, le sport et le cinéma sont entre autres abordés par un animateur ou une animatrice. À l’aide de leur témoin déclencheur, les huit participants et participantes sont appelé(e)s à répondre à une centaine de questions sur une durée d’environ trois quarts d’heure.
L’émission présentait de temps à autre des étudiants et des étudiantes de tous les horizons de la francophonie. Les herbogénistes, nom des participants et des participantes de Génies en herbe, venaient parfois de pays tels que la France, la Belgique et le Sénégal.
Imitant dans un sketch des herbogénistes délinquants, le groupe humoristique à succès Rock et Belles Oreilles a contribué à démocratiser l’activité aux yeux du grand public au cours des années 1980.
Le début d’une nouvelle ère
Si l’émission originale Génies en herbe diffuse sa dernière saison en 1997, le glas demeure bien loin d’être sonné pour l’activité. Les écoles secondaires s’approprient dorénavant le concept pour réaliser des compétitions tout au long de l’année contre d’autres établissements scolaires.
De fait, plus de 130 équipes du secondaire issues des quatre coins du Québec se sont inscrites à l’édition 2023 du tournoi provincial, qui s’est tenue du 20 au 22 mai derniers.
La mémoire, les connaissances variées, la rapidité et la gestion du stress sont des qualités primordiales à acquérir afin d’être un bon joueur ou une bonne joueuse de Génies en herbe.
« À l’école, Génies en herbe permet d’échanger sur des sujets divers, de partager ses découvertes, socialiser, rencontrer des jeunes d’autres écoles », peut-on lire sur le site officiel du Mouvement provincial Génies en herbe/Pantologie.
« Si je n’avais pas su au début de mon secondaire que, par exemple, c’était Victor Hugo qui avait écrit Notre-Dame de Paris et qu’il faisait partie du monde du romantisme, peut-être que je n’aurais jamais été intéressée autant par la littérature française », livre Pascale Moko Foko, herbogéniste et étudiante au double DEC Histoire et civilisation – Arts, lettres et communication, option Langues au Cégep du Vieux Montréal.
La Ligue civile de Montréal, dissociée en deux calibres (divisions A et B), regroupe après le secondaire les herbogénistes désirant continuer le Génies en herbe à l’âge adulte.
Le niveau s’avérant démesuré pour certains et certaines, Simon Landry, ancien étudiant au cégep de Saint-Hyacinthe en sciences de la nature, a décidé de fonder Teste-Toi, une ligue intercollégiale de Génies en herbe, en automne 2020.
« Il y a trois ans, de mon initiative, on a trouvé que ça prenait un entre-deux pour les gens qui sortaient du secondaire et qui avaient envie de continuer à faire du Génies en herbe. C’était trop décourageant d’avoir seulement la Ligue civile qui existait », avance Simon Landry.
« Il y a une belle communauté qui se crée autour du Génies en herbe. Puisqu’on est peu à en faire, les liens qui se forment sont très forts, il y a beaucoup de rencontres qu’on fait en dehors des compétitions », renchérit l’herbogéniste.
Une activité comme nulle autre
Contrairement aux sports ou à l’improvisation, le Génies en herbe ne se présente généralement pas comme l’activité la mieux vue socialement. « Il y a un peu ce stéréotype-là, l’archétype du joueur de Génies en herbe, déplore Simon Landry. C’est beaucoup plus valorisé d’être un sportif que quelqu’un qui répond à des questions. C’est un peu archaïque comme façon de voir les choses, mais je crois qu’il y a encore un fond de [cette pensée-là] », continue-t-il.
Pascale Moko Foko s’aligne sur ces propos. « C’est peut-être un cliché, mais c’est une activité qui demeure vraiment stigmatisée, confie l’étudiante. Quand on parle de Génies en herbe, on a une idée de jeunes un peu marginaux qui ne sont qu’intéressés par l’école ».
Pourtant, l’herbogéniste voue un grand amour à cette activité, qu’elle pratique depuis 2015. « Je n’arrête pas de dire que la raison pour laquelle je suis la personne que je suis aujourd’hui, c’est parce que j’ai commencé le Génies en herbe en secondaire un », établit celle qui est aussi entraîneuse d’une équipe de Génies en herbe à l’école secondaire Joseph-François-Perrault, à Montréal.
« Je crois que [Génies en herbe] amène surtout une grande ouverture sur le monde, […] de s’intéresser à ce qui nous entoure, de s’intéresser à ces recherches d’apprentissage constantes, de ne pas se contenter de ce qu’on sait, mais toujours vouloir en savoir plus », partage Simon Landry.
« Les conversations sont toujours plus plaisantes, à mon avis, avec des personnes qui sont cultivées et qui ont quelque chose à dire », croit-il.
Génies en herbe semble de plus en plus s’implanter dans la culture populaire québécoise : en 2018, les Éditions Gladius lançaient le jeu de société Génies en herbe, tandis que Radio-Canada renouvelait en 2019 le concept de son émission d’antan avec 100 génies, animé par Pierre-Yves Lord.
Malgré cette renommée, aucune ligue universitaire de Génies en herbe n’existe actuellement. « Peut-être que quelqu’un va la fonder un jour, qui sait ? » conclut Pascale Moko Foko.
Mention illustration : Camille Dehaene | Montréal Campus
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