Avec Dans les voûtes du DOC, la plateforme indépendante dédiée au documentaire international Tënk présente une série de onze documentaires indépendants canadiens n’ayant encore jamais été diffusés en ligne. Parmi ceux-ci, on retrouve Making of a Judge, un film réalisé par Linda V. Carter, qui explore la vie parsemée d’embûches de son père, le juge George E. Carter.
Né d’une collaboration avec l’Association des documentaristes du Canada (DOC), le projet a pour objectif de donner une nouvelle vie à certains films qui ont façonné le milieu artistique, mais qui n’ont jamais été accessibles en ligne.
Un jury a été formé pour sélectionner la programmation de onze documentaires. Du 28 janvier au 26 mars, cinq d’entre eux sont disponibles, dont le documentaire Making of a Judge, réalisé en 2010 par la fille du premier juge noir du Canada.
Une histoire de succès
Le juge George E. Carter, né en 1921, aborde de façon légère et amusée les épreuves de sa vie dans ce film de 49 minutes. Son père a quitté la Barbade pour s’installer à Toronto après la Première Guerre mondiale. Ainé d’une famille de 14 enfants, George a grandement été encouragé à poursuivre ses études. Il devient avocat en 1948, puis juge en 1979.
L’histoire inspirante de George est racontée par ceux et celles qui l’ont connu de son vivant. Sous forme de bribes anecdotiques, ils et elles évoquent sa résilience et son humour, qui lui ont permis de passer à travers toutes les embûches. « Le racisme systémique dont il a souffert, il en parlait comme s’il l’avait accepté, mais il l’a surmonté. Il était un survivant et un modèle pour les autres », raconte la juge Mme Lauren E. Marshall, dans le film. Il a notamment dû être porteur de bagage pour une compagnie de train pendant ses études en droit ; l’un des rares emplois que pouvaient occuper les hommes noirs.
George, souriant de ses quelques dents restantes, se remémore sans problème les étapes de sa vie, livrant ainsi un récit très intimiste. C’est une chance d’avoir pu avoir accès à son histoire de sa propre bouche, alors qu’il avait déjà 91 ans au moment du tournage.
Une réalisation maladroite
Malgré le rythme plutôt dynamique et les propos pertinents, la qualité du documentaire ne rend pas justice à l’homme qu’il honore. La qualité des captations sonores est inégale, bien qu’intelligible. La succession d’images fixes et de photos, dont on ne sait ni l’origine ni le contexte, donne parfois l’impression d’un diaporama d’images, rendant le tout assez amateur. C’est le premier film de Linda V. Carter, ce qui pourrait expliquer cette impression.
Le montage semble maladroit car il multiplie les temps morts entre les différentes parties du film. Le tout est davantage ressenti comme une lettre d’amour d’une fille à son père plutôt que comme une œuvre télévisuelle achevée.
Sur les traces des injustices
Au-delà de ses défauts, le film permet de mettre en lumière un récit méconnu. L’auditoire peut plonger concrètement dans les épreuves que des milliers de personnes marginalisées qui ont vécues en tentant de briser les murs.
Bien que le racisme au Canada soit souvent considéré plus insidieux qu’aux États-Unis, il existe. C’est un aspect inusité du film, qui l’aborde sans tabou. « Le racisme est plus facile à comprendre et à interpréter aux États-Unis, mais ici c’est plus subtil. », explique Sheldon Taylor, professeur au département d’histoire à l’Université de Toronto, qui témoigne dans le film.
Néanmoins, George E. Carter relate les moments difficiles sans amertume, en se concentrant sur ses réussites. « Je crois que le plus grand moment de ma vie, c’est ma nomination de juge de la province de l’Ontario », lance-t-il. Il estime qu’au cours de sa carrière, il a pu servir la communauté avec ses connaissances sur les problématiques sociales. Il a amené un regard différent sur celles-ci. Il a aussi aidé dans l’établissement de l’aide juridique.
Encore aujourd’hui, George E. Carter est un modèle pour la jeune génération. Il représente la ténacité et la réussite. Avec ce film, il donne la possibilité à d’autres personnes de rêver à leurs aspirations les plus ambitieuses.
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