Femme forêt : après la fuite, l’enracinement

Anaïs Barbeau-Lavalette revient en force avec Femme forêt, son nouveau roman. Près de 6 ans après le succès retentissant de La femme qui fuit, l’écrivaine offre aux lecteurs et lectrices une réflexion sur l’appartenance, l’identité et la place de l’humain dans l’univers.

Dans son nouveau livre à saveur autobiographique, Anaïs Barbeau-Lavalette raconte les neuf mois qu’elle, son conjoint, ses trois enfants et une autre famille ont passés dans une maison cachée au creux de la région de son enfance. « Le fait d’être pendant plusieurs mois dans cette vallée où j’ai grandi, où j’étais complètement déconnectée – il n’y avait pas de réseau cellulaire ni Internet – ça m’a un peu frappée à quel point j’étais analphabète de mon territoire », explique l’écrivaine au Montréal Campus.

On devine rapidement que cet exil est déclenché par l’arrivée de la pandémie, mais cette dernière ne demeure qu’un détail dans l’histoire de Femme forêt. L’écrivaine admet toutefois que l’arrêt forcé qu’a imposé le confinement lui a servi d’élan. « Je crois qu’il y a de très belles choses qui naissent de la contrainte. […] Cet effet de lenteur-là m’a permis d’accorder plus d’attention à ce sur quoi je pousse depuis que je suis toute petite », confie-t-elle.

Une découverte du territoire

Sous la plume d’Anaïs Barbeau-Lavalette, la vallée et les êtres vivants qui l’habitent sont mis à l’avant-plan. Dans une langue évocatrice et puissante, l’autrice décrit la nature, l’anime et la fait vibrer de sens, invitant ainsi les lecteurs et lectrices à poser un regard neuf sur le rapport de l’être humain à son environnement. « Tous ces liens entre le territoire et l’humain font des histoires fabuleuses, qui dépassent la fiction. […] On s’est toujours vus au milieu du reste, alors qu’on ne l’est pas, on fait partie de toute cette affaire-là », s’exclame l’écrivaine.

Cette exploration du territoire est ponctuée par les histoires de ceux et celles qui ont habité la vallée, dotant ce roman d’un caractère presque ethnographique. Comme dans l’ensemble de son œuvre, Anaïs Barbeau-Lavalette réserve, dans Femme forêt, une sensibilité particulière aux décalé(e)s, aux exclu(e)s et aux indomptables qu’elle a rencontrés dans la vallée de son enfance. « Ce voisinage-là est bouleversant de marginalité, chaque vie est vraiment étonnante », remarque-t-elle.

Un regard vers l’intérieur

Femme forêt est le premier roman qu’Anaïs Barbeau-Lavalette écrit à la première personne, faisant de ce livre son projet le plus autobiographique. Une décision inévitable, selon l’autrice : « C’est intimidant, super grisant, mais en même temps je pense que ça n’aurait pas pu être autrement », explique-t-elle.

Femme forêt s’inscrit dans la continuité accidentelle de La femme qui fuit, d’après Anaïs Barbeau-Lavalette. « J’ai terminé La femme qui fuit avec le désir renouvelé d’être libre ensemble. J’essaie d’appliquer ça dans ma vie, […] de conjuguer à la fois les racines, les liens affectifs, la famille, les amis et les amours avec ma soif de liberté », confie l’écrivaine. « Femme forêt, c’est une suite de questionnements en ricochet […] c’est-à-dire, comment on fait pour être la femme qui reste? », questionne-t-elle.

À travers ce récit, Anaïs Barbeau-Lavalette tisse donc une introspection à la fois personnelle et universelle sur la liberté, la mort et l’appartenance. Une réflexion vaste, certes, mais que l’autrice réussit à intégrer à son récit avec grâce. L’écrivaine laisse ses questionnements irrésolus, avec une confiance tacite en la capacité des lecteurs et lectrices à les poursuivre avec elle longtemps après la lecture.

Mention photo Fannie Arcand | Montréal Campus

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