Cri du cœur de la presse écrite

Des revenus publicitaires en chute libre, des mises à pied qui s’accumulent, des journaux qui ferment boutique : la presse canadienne est en crise et exhorte le gouvernement d’intervenir pour assurer la survie de la presse écrite face aux géants américains Facebook et Google.  

Dans un panel organisé à l’UQAM mercredi, plusieurs journalistes québécois se sont rassemblés pour dénoncer la situation. Leur constat est simple : Google et Facebook aspirent toute la publicité, ne laissant que des miettes aux journaux, qui eux, produisent du contenu pour les médias sociaux. « C’est une domination économique de deux géants qui, pour l’instant, lorsqu’ils vendent de la publicité sur le marché canadien, ne collectent aucune taxe », note le journaliste de La Presse Charles Côté, en présence de collègues du Journal de Montréal et du Devoir.

Simultanément, la présidente de la Fédération nationale des communications (FNC-CSN), Pascale St-Onge, a présenté à Ottawa une lettre, signée par plus de 7 000 personnes, qui demande l’aide du gouvernement fédéral pour soutenir la presse écrite.

70 % de la publicité, 0 % du contenu

Facebook et Google accaparaient à eux seuls 70 % des revenus publicitaires en ligne au Canada en 2015, selon un rapport du Forum des politiques publiques du Canada (FPP). Un pourcentage qui ne cesse d’augmenter, selon les panélistes réunis à l’UQAM. « Une publicité qui part du Journal de Montréal ne va pas nécessairement à La Presse. Elle va en général à Facebook et à Google, qui ne créent pas d’information, et qui ne font que publier la nôtre », explique le journaliste du Journal de Montréal Stéphan Dussault.

Pourtant, Facebook tire des profits importants de la presse écrite québécoise : environ 23 millions de dollars par an, selon les calculs du professeur de journalisme à l’UQAM et animateur de la conférence, Jean-Hugues Roy.

Comme les médias doivent combler ce manque, ils peuvent être tentés de se tourner vers les contenus commandités. « On a une pression pour implanter de la publicité invasive, qui va se confondre avec les textes. On est vraiment vigilants là-dessus parce qu’il en va de notre réputation », affirme la journaliste au Devoir Lisa-Marie Gervais.

Des propositions qui attendent leur écho

S’appuyant sur le rapport Le miroir éclaté, publié en janvier 2017 par le Forum des politiques publiques du Canada, les représentants de la presse écrite ont lancé plusieurs conseils au gouvernement fédéral, tels qu’une adaptation du cadre réglementaire à la réalité numérique.

« Un annonceur qui met une page de publicité dans une édition papier, il peut la déduire de ses dépenses […] Cette mesure n’a jamais été ajustée au monde de la publicité numérique », explique Charles Côté. Les entreprises de presse souhaiteraient aussi que le gouvernement implante des crédits d’impôt sur la masse salariale dans son prochain budget, ce qui permettrait aux entreprises de presse d’investir dans le développement de leurs plateformes numériques.

Les journalistes se tournent également vers le Fonds du Canada pour les périodiques, qu’ils souhaitent étendre aux quotidiens. Cette mesure pourrait encourager la création de nouveaux médias, en plus de permettre à ceux déjà en place de survivre. Si le journalisme est « l’huile à moteur de la démocratie » pour Jean-Hugues Roy, le gouvernement se doit d’intervenir pour éviter la panne sèche.

« Nous savons qu’il y a plus à faire, mais on va s’assurer de travailler avec les organisations », a déclaré hier le premier ministre Justin Trudeau à la Chambre des communes, sans pour autant promettre l’aide demandée par les journaux.

 

photo : MONTRÉAL CAMPUS

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *