« Le sous-texte d’Internet : tu es seul. »
-Thomas, 26 ans
Cette phrase tirée du premier roman de Guillaume Morissette, Nouvel onglet, traduit avec éloquence l’angoisse d’une génération connectée par les réseaux sociaux, mais déconnectée du réel. En 200 pages, l’auteur originaire du Saguenay raconte non seulement l’histoire de Thomas, un jeune concepteur de jeux vidéo qui veut se consacrer à l’écriture, mais aussi celle des milléniaux.
« En tant qu’être humain, je n’étais bon dans rien de particulier, je ne voyais pas de chemin tout tracé pour mon avenir, comme “Je sais peindre, donc je vais devenir peintre”. »
-Thomas, 26 ans
Dans la mi-vingtaine, Thomas s’interroge sur son avenir. Pour lui, sa « vie [tourne] en rond […] et va de plus en plus vite à chaque tour de piste ». De toute façon qu’est-ce qu’il peut faire avec un diplôme en création littéraire ? « Rien », lui répond en riant son enseignant.
En plus de ses réflexions pessimistes sur son futur, Thomas a de la difficulté à se rapprocher de la gent féminine. Les gens sont d’« impénétrables forteresses émotionnelles en trois dimensions », selon l’apprenti poète. Cette perception du monde qui l’entoure rendra ses rapports sociaux plus difficiles, mais le rapprochera également d’une jeune artiste prénommée Romy.
Dans une écriture minimaliste, l’auteur québécois de souche a troqué la langue de Molière pour celle de Shakespeare afin de « se réinventer ». L’absence de chapitres donne l’impression de lire une lettre ouverte aux jeunes adultes d’aujourd’hui. Cette lettre est rédigée à la première personne du singulier comme si le roman était un journal des pensées du personnage principal. D’ailleurs, les phrases ne se suivent pas nécessairement dans un ordre cohérent. Passer de « le mot de passe pour son ordinateur était “Grossescouilles”, en un mot », à « Du riz », est tout naturel dans ce récit existentiel. Le lecteur est ainsi confronté au fil des pensées de la vie tourmentée de Thomas.
Tout comme l’auteur, le protagoniste de Nouvel onglet est un ancien concepteur de jeux vidéo québécois francophone qui préfère s’exprimer en anglais plutôt qu’en français pour donner un nouveau souffle à son écriture. Le roman a donc une dimension autobiographique, malgré le fait qu’il s’agisse principalement de fiction. Cette mise en abyme donne, encore une fois, à la lecture, l’allure d’une confession, d’un journal intime de l’auteur.
Nouvel onglet est le récit de la solitude virtuelle de la génération de « L’amour au temps du numérique », mais avec plus de classe.
Image: BORÉAL
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