Mon cercle d’amis se résume principalement à des individus au diapason de mes convictions politiques, religieuses et sociales. En ces termes, on pourrait me décrire comme quelqu’un de socialement conservateur. Sur le coup, c’était un constat troublant. Et puis, après réflexion, je me suis dit que c’était sans doute normal.
Il est aisé de se proclamer ouvert d’esprit et grand défenseur de la diversité. Mais, quand on prend le temps d’examiner d’un peu plus près son entourage, cette utopie à laquelle on aime adhérer se modère subitement. On choisit souvent la voie facile, celle de s’entourer inconsciemment d’individus qui nous confortent dans nos croyances.
Dans cette édition, deux thèmes de contre-cultures sont abordés. Il ne m’en fallait pas plus pour me noyer dans un océan d’ignorance. Les skinheads, les redskins, les boneheads, les néo-nazis. Des termes qui inspirent machinalement la méfiance. Si dans certains cas, cette crainte est fermement justifiée, dans d’autres, elle mérite une réflexion. Pour des raisons évidentes, notre journaliste a rencontré sous le couvert de l’anonymat des hommes et des femmes rattachés à des groupes qualifiés d’extrême gauche. Des gens pour qui la justice sociale est un combat quotidien qui passe inévitablement par l’action.
Leur existence même sous-tend quelque chose de plus profond. Dans son ADN, Montréal reste une ville ouverte où il fait bon vivre. Mais, comme partout ailleurs, il s’agit d’une métropole happée par le fléau de la pauvreté et sujette à des actes haineux de la part de groupuscules isolés. Il serait difficile de me faire croire que Montréal est affranchie de toute idéologie homophobe ou raciste.
Si la majorité de la population dort sur ses deux oreilles, pour ces groupes, le moindre geste à caractère haineux en est un de trop. Bien que je ne souhaite pas faire l’apologie de ces mouvements, je me permets de dire qu’il s’agit, sur le fond, d’un combat plutôt noble. Les moyens utilisés pour remporter leur lutte restent toutefois à débattre.
Par la discussion, le débat, les conférences ou par la publication de leurs propres journaux, ils informent, ils sensibilisent, ils attaquent l’idéologie adverse. Toutefois, quand le temps de la discussion se termine, des gestes aux antipodes de la joute verbale peuvent être posés. Tout ça nous ramène à un débat qui ne s’achève jamais. Peut-on justifier des actes violents par des principes valeureux?
Une question férocement débattue lors de la grève étudiante de 2012. La réponse devrait pourtant être simple. La violence désignée comme légitime est à mon avis un concept aux contours flous et à l’essence plutôt dangereuse. Une conviction difficilement défendable perpétuant inlassablement un vilain cercle vicieux.
Toutefois l’erreur, que plusieurs ont fait lors du Printemps érable, c’est de définir un mouvement complexe et hétérogène par un seul et unique aspect. Tout en gardant un esprit critique, il serait donc dommage de réduire ces mouvements à un simple esprit de cassage de gueule.
Si je suis en désaccord sur plusieurs aspects, je dois tout de même dire qu’en me renseignant sur leurs convictions, ça m’a permis de m’interroger sur les miennes. Un exercice plutôt simple, qu’on ne fait que trop peu souvent.
Louis-Philippe Bourdeau
Chef de section Société
societe.campus@uqam.ca
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